Trois choses m’ont inspiré cette semaine, trois “évènements” qui ont en commun d’avoir capté beaucoup d’attention médiatique mais de ne pas avoir généré beaucoup de fond utile aux citoyens de France.
Tout d’abord, bien sûr l’intervention de Nicolas Sarkozy à la télévision. Longue intervention attendue après un mandat qui accumule les échecs, qu’ils soient dus aussi bien à des problèmes mondiaux qu’à des erreurs et des errements de gouvernement. Qu’en dire ? Après un départ très brouillon, nous avons eu droit à une suite de déclarations qui pour une fois n’étaient ni péremptoires, ni définitives, mais qui se voulaient point de départ de discutions. Cette humilité et cette retenue auraient été les bienvenues en 2007, mais je craints fort aujourd’hui qu’elles ne soient que la conséquence d’une trouille insurrectionnelle. Est-ce de ma part un procès pour manque de sincérité supposée ? Je crois que pour se fixer une opinion, il suffit de se pencher sur le cas de Gandrange qui est le plus flagrant : oui, Nicolas Sarkozy a menti cyniquement devant toute la France ce soir là. Alors, pour ce qui est du reste, chacun pourra au choix lui laisser encore une fois le bénéfice du doute ou se préparer à réparer une erreur de bulletin de vote.
Deuxième “évènement”, “Le monde selon K“, le livre de Claude Péan sur Bernard Kouchner. Un livre fait par un homme qui ne semble décidément pas aimer les écarts entre l’apparence et la réalité, un livre sur les ambigüités politiques, un livre qui écorne l’une des rares images de noblesse qui reste à la France. Rien d’illégal reproché à Bernard Kouchner, rien d’immoral, juste peut-être l’impardonnable faute de ne pas être l’incarnation du french docteur, le sauveur des indigents et du monde, risquant sa vie par simple générosité humaniste. Les humains sont faillibles, certes, mais je ne peux m’empêcher de penser qu’à gauche il y a décidément deux façons de finir sa carrière : soit comme Pierre Mauroy ou Michel Rocard, dignement, de façon préparée, discrètement, ou soit comme Bernard Kouchner ou encore Jack Lang, en voguant d’écueils en échouages au fil de l’interminable naufrage d’une vie politique que l’on se refuse à quitter à temps.
Enfin, dernière écume plumitive, un autre livre, sur Rachida Dati cette fois “Belle-amie“. Là, le moins que l’on puisse dire c’est que l’histoire est compliquée. Mais ce qui m’intéresse c’est moins l’histoire d’une transposition vraie ou exagérée d’un belle-ami version Maupassant à une belle-amie fin du XXème siècle, que l’évolution des mœurs politiques et sociales sous-jacentes. Jusqu’ici, le pouvoir, la politique et le sexe étaient des histoires bien codifiées sous la Vème République : un mâle dominant et prédateur qui une fois arrivée au pouvoir picorait dans une cours les femelles qui l’intéressaient par soumission, acceptation ou sollicitation selon les cas. Ce livre nous laisse entendre que ce schéma serait à revoir et que d’une part la féminisation des postes de pouvoir dérive aussi sur la prédation, mais que d’autre part, et c’est ce qui est sans doute le plus dangereux pour la démocratie et la République, cette prédation sexuelle a changé de nature dans le sens où elle ne serait plus la “confiserie du pouvoir” mais bien le pouvoir par la sexualité. Dit autrement, nous ne sommes plus dans un exercice “sain” et rationnel du pouvoir avec des à-côtés, mais un exercice du pouvoir qui serait basé sur une subordination sexuelle. Cela convient sans doute parfaitement aux bonobos, mais en ce qui concerne la République, il est inadmissible qu’elle puisse être dirigée sur autre chose que la raison et l’intérêt de ses citoyens. Alors je ne sais pas quelle est la part de vérité sur le cas Dati, ce qui a en soit peu d’importance, mais je crois qu’il serait urgent de remettre de l’ordre si ce livre reflète effectivement une dérive de la conduite de l’État.