Eau amère

Qu’il est compliqué d’agir pour empêcher que le risque ne se réalise. Les conséquences de la tempête nous le rappelle douloureusement.

Depuis que je tiens mon blog, j’ai à de nombreuses reprises relayé des travaux sur les conséquences du changement climatique (Quatrième rapport du GIEC sur le changement climatique, Un Nobel qui dérange, La fonte des illusions), j’ai essayé de voir à travers les événements inhabituels les signes de la réalité de ce changement (6 octobre 2009 : le début d’une ère inconnue), et j’ai à ma façon et avec mes moyens, essayé de réfléchir à ce qu’il était possible de faire (Les villages sont arrivés !). Il ne fallait pas vraiment être devin d’ailleurs pour écrire ma crainte de “changements climatiques avérés voire une rupture climatique possible qui auront pour conséquence […] le déplacement de populations habitant en zones devenues non habitables (extension du marais camarguais, zones côtières inondées ou devenues trop dangereuses, …)”

Bien sûr, je n’espérais pas, moi petit militant du bout du monde, arriver à faire la décision, mais au moins poser ma pierre au côté de tous ceux qui savent que les dégâts de Xynthia ne resteront pas un épiphénomène, une conséquence de la faute à pas de chance. Dès l’instant où l’on avait compris que le climat était en train de se réchauffer (au moins pour les proches années à venir), il était évident que ce genre de drame allait se produire, comme il est évident qu’il se reproduira.

Il est alors de bon ton de se poser la question “à qui la faute” et notre président, jamais à un paradoxe près, nous y a rapidement invité. Certes, et comme il justifie chaque jour son surnom de Nico la poisse, on pourrait se contenter, comme l’a fait le nouvel obs, de ressortir quelques-unes de ses déclarations passées, déclarations qui ne pouvaient que lui revenir tôt ou tard en pleine figure comme les idioties qu’elles sont. Bien sûr qu’il était idiot de remettre en cause la loi littoral pour pouvoir bâtir plus facilement (”[la loi littoral doit] être mise à jour sans pour autant que l’économie générale du dispositif soit bouleversée. Je crois qu’il faut à la fois la renforcer pour mieux lutter contre les cas de détournement qui ont été constatés, et l’assouplir pour ne pas entraver le développement normal des communes, tout en conservant l’objectif général de protection de l’environnement”. Ajouté à ses déclarations sur la politique urbaine du grand Paris où il appelait à un assouplissement de la loi pour pouvoir construire en zone inondable, cela ressemblerait presque au gag d’un comique se tirant par maladresse des balles dans le pied si nous avions le cœur à rire. Alors bien sûr le changement de contexte peut excuser quelque peu l’insoutenable légèreté de cet être, mais l’idiotie de ces paroles n’arrivera pas à nous faire oublier qu’en matière d’urbanisme, comme du reste d’ailleurs, cet homme ne comprend décidément rien à rien (au passage et toujours sur le thème de l’urbanisme, souvenons-nous que si la France a échappé à sa propre bulle de subprime, c’est simplement parce que notre chef de chantier national n’a pas eu le temps de mettre en œuvre sa politique de la “France de propriétaires” qui consistait, comme aux États-Unis, à solvabiliser artificiellement des gens qui ne pouvaient pas l’être). Plus que des paroles plus ou moins maladroites en fonction du contexte, c’est bien le fond de la politique sarkozyste en matière d’urbanisme qui est le problème : pour lui, c’est d’abord de l’économie, pour nous c’est avant tout notre cadre de vie quotidien. Vu sous cet angle, certaines priorités changent…

Maintenant, au-delà du problème posé par cet homme, saurons-nous prendre notre courage à deux mains pour affronter la réalité ou faudra-t-il d’autres tempêtes, d’autres tornades, un évènement Cévennol majeur, pour commencer à revoir notre urbanisme, quitte à accepter détruire volontairement certaines de nos habitations ? Bien sûr que l’idée d’avoir à raser sa maison ou son appartement en prévision de catastrophes à venir est un acte assez terrible, immensément difficile, mais c’est sans doute le prix à payer pour épargner des vies. On n’arrête pas l’eau, quelle que soit la hauteur ou la solidité des infrastructures. L’homme qui est arrogant face à la nature doit s’apprêter à en payer le prix. Mais il est également vrai, que ce genre de décision ne doit pas être prise individuellement, mais collectivement. Faut-il encore pour cela disposer d’un architecte compétent et responsable, d’un meneur d’hommes capable de convaincre, de mobiliser, de rassembler, d’un capitaine capable de diriger le bateau, de le faire traverser toutes les tempêtes Xynthia. Il est plus que temps de revenir aux fondamentaux de la politique.

Tempete Xynthia

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