Quinzaine de la laïcité

JAURESLaïcité, un si joli mot si mal compris, si mal traité. Pour en mieux expliquer le sens autant qu’en défendre la valeur, le PS organise une quinzaine de la laïcité.

Se replonger dans les pensées de Jaurès permet sans doute de prendre du recul, sur le fond, sur l’origine et sur l’évolution depuis plus d’un siècle.
Article paru dans La Dépêche le 16 juin 1889 sous le titre « Laïcité ».

[…] Nous n’avons pas voulu mettre la guerre dans les villages, mais, au contraire, la paix ; et le vrai moyen d’avoir la paix c’est de mettre chacun à sa place, chaque chose à sa place : le maire dans la mairie, avec pouvoir administratif ; le curé dans l’église, avec la religion ; l’instituteur dans l’école, avec les éléments de la science et de la morale.
[…] Ce n’est pas au Gouvernement à s’occuper des affaires de religion. Le Gouvernement représente les droits et les intérêts de tout le monde, et, dans les questions de religion, tout le monde n’est pas d’accord.
[…] La seule chose que le gouvernement doive faire, c’est d’assurer à chacun sa liberté. Que ceux qui veulent aller à la messe y aillent, que ceux qui ne veulent pas aller à la messe n’y aillent pas. Que chacun soit libre en respectant la liberté des autres. L’Église est parfaitement maîtresse de prêcher dans toutes ses chaires, d’enseigner aux enfants dans toutes les paroisses : « hors de l’Église point de salut ». Mais si le gouvernement obligeait les instituteurs à le dire dans les écoles, si lui, Gouvernement, qui doit protection, liberté et respect à tous, faisait dire dans ses écoles par ses instituteurs : « hors de l’Église point de salut », ce serait abominable.
[…] Nous avons mis des centaines et des centaines d’années à conquérir la liberté de conscience, c’est-à-dire le droit pour chacun de penser et d’agir comme il lui plaît dans les choses de la religion. Il y a des siècles, au Moyen-âge, l’Église était maîtresse de tout…
[… ] Mais les rois et les empereurs ne travaillaient pas pour les nations; ils ne travaillaient que pour eux-mêmes. Et, quand ils eurent affranchi leur pouvoir de l’Église, ils voulurent se servir de l’Église pour maintenir leur pouvoir sur les peuples ; ils comprirent que, si les hommes pouvaient discuter en liberté les choses de la religion, ils discuteraient avec la même liberté les choses de la politique.
Voilà pourquoi il persécutèrent les protestants ; voilà pourquoi ils persécutèrent les jansénistes ; voilà pourquoi ils proscrivirent les livres de Voltaire et de Rousseau, l’Encyclopédie, toutes le œuvres libres ; voilà pourquoi ils livrèrent à l’Église les registres de l’état-civil c’est-à-dire la société tout entière.
[…] La Révolution française a voulu briser ce système de domination, et nous luttons depuis un siècle pour maintenir et affirmer son œuvre ; le despotisme politique et le despotisme religieux ont fait alliance sous l’ancien régime, cette alliance dure encore ; et, si nous ne résistons pas, elle ramènerait, sous forme hypocrite mais odieuse encore, l’ancien régime.
Il n’est pas mort tout entier, car la pensée même dont il vivait, c’est-à-dire l’alliance des rois, des puissants de la terre et des curés, en vue de la domination commune, n’est pas morte encore. Oui, il n’y a plus de religion d’État ; mais, il y a quelques années encore sous le vingt-quatre mai, ceux qui voulaient aller reposer en terre sans être accompagnés d’un prêtre ne pouvaient faire que la nuit leur dernier voyage. Oui, il n’y a plus de tribunaux ecclésiastiques ; mais il y a quelques années, l’influence du clergé arrêtait la justice quand elle voulait toucher à un prêtre. Oui la loi ne connaît plus ni catholique ni protestant ; mais on vient de trouver, dans le dossier d’une affaire civile remontant à une trentaine d’années, cette note, insérée au dossier par un magistrat de l’empire : « Cet homme est une canaille, il n’a pas fait ses Pâques ». Oui, il n’y a plus de religion d’État ; mais tous les hobereaux qui veulent indéfiniment asservir les paysans de France sont groupés autour de l’Église ; mais les hautes compagnies financières, comme celle de Montceau-les-Mines, qui veulent assujettir les travailleurs, les envoient au mois de Marie sous peine d’expulsion.
Et vous voulez que nous introduisions dans les écoles du gouvernement, si peu que ça soit, cette insatiable domination, qui veut étreindre toute la société française ? Non : les écoles publiques appartiennent à la nation et à la liberté. Si nous mettions seulement le petit doigt dans l’engrenage des ambitions cléricales, nous y passerions bientôt tout entiers ; ce n’est point par esprit de guerre, mais par esprit de liberté et de légitime défense, que nous avons exclu de l’école toutes les questions de religion, qui, se mêlant au pouvoir, deviennent immédiatement des questions cléricales.

Pour aller plus loin :

Passeur de monde

bebeJe ne fais pas partie de ceux qui croient ou feignent de croire que depuis que François Hollande a été rélu rien n’a été fait, qu’aucune promesse n’a été tenue. C’est faux et il suffit de suivre ce baromètre des engagements pour s’en assurer : à ce jour 47 des 60 engagements électoraux ont bien été tenus.

Formellement, si quelque chose doit être reprochée au Président, ce n’est pas un dédit post-élection. À vrai dire, il me semble que le désamour vis-à-vis de l’exécutif vient surtout du fait que notre système électoral est en lui-même un vaste mensonge : les raisons pour lesquelles une personne est élue n’ont que rarement un rapport avec l’objet de son mandat. François Hollande a été élu parce que les Français ne supportaient plus Nicolas Sarkozy et qu’il ne portait aucun stigmate rédhibitoire aux yeux des électeurs qui se sont déplacés. C’est suffisant pour gagner une élection mais cela ne dit rien des éléments favorables ou pas qui permettront de mener à bien un mandat. Et si faute il y a, elle incombe autant à l’élu qu’aux électeurs, et elles pèsent encore plus sur ceux qui sont restés chez eux dans un confort protestataire de révolutionnaire de comptoir.

Et quelle part pèse sur moi qui vous écrit et sur vous qui me lisez ?

Je suis prêt à plaider coupable d’avoir globalement vu les changements à venir et les voies possibles mais de n’avoir pas réussi à les faire comprendre et partager. Je plaide également coupable d’avoir cru (ou de m’être convaincu) que le système administratif et politique pourrait accoucher d’un groupe de personnes qui comprendrait ces changements et pourrait mettre en œuvre les profondes réformes nécessaires. Je sais pourtant qu’aucun système n’est en mesure de se réformer lui-même. Les perturbateurs capables de générer une restructuration sont toujours exogènes. Aucun esprit aussi brillant soit-il n’est en mesure de réformer l’État s’il a été formé pour servir l’État et aucun personnage politique n’est de lui-même en mesure de changer un système qui est à la fois sa maison et son horizon.

La parité, le non-cumul des mandats et la réforme territoriale auraient pu être des perturbateurs assez puissants mais ils ressemblent de fait plus à un long chemin de croix qui n’arrivera qu’à produire une machine à eau de boudin.

Sommes-nous condamnés à l’impuissance et aux regrets voire aux larmes ?

Je n’en crois rien. Nous avons beau pleurer sur notre sort et goûter avec délectation l’auto-dénigrement, nous sommes un peuple riche, éduqué et en bonne santé physique et démographique. On a vu pire comme base pour affronter le destin.

Pour nous relever de notre apathie, il nous faut d’abord nous débarrasser des scories qui nous paralysent et redonner un sens et un corps aux valeurs qui nous structurent. Les idéaux de liberté et d’égalité de 1789 ont-ils vraiment gardé le même sens dans notre monde ? Dans une société numérique philosophiquement libertaire, économiquement intrinsèquement libérale mais marxiste par nécessité, comment pouvons-nous espérer conserver des lois et une organisation d’un temps révolu ? Et comment pouvons-nous projeter le destin d’un peuple a travers la tempête du changement climatique ?

Je suis plus que jamais convaincu que la réponse émergera de la pensée et de l’initiative des citoyens. La force vitale de la démocratie vient de ses citoyens, pas de ses institutions. Le citoyen a la légitimité du nécessaire changement perturbateur. Mais cela ne peut se faire qu’en renouant le lien entre nous, en nous donnant les moyens de la cohésion, en remettant au clair nos idéaux, et surtout, surtout, en allant chercher tous ceux qui ne sont pas à même de passer seul le Rubicon. Les changements fondamentaux ne sont jamais souhaités, ils font beaucoup trop peur. Ceux qui ont la lucidité et en ont la force doivent aller chercher tous les autres pour les faire passer sur l’autre rive. Le changement ne peut pas être le fait d’une minorité qui abandonne les autres.

La démocratie offre bien des moyens d’expression à ses citoyens. Nous devons retrouver et réaffirmer des idéaux communs. Nous devons retisser le lien et alors nous pourrons redonner à la République une forme en phase avec l’urgence de l’époque et une vision commune et sereine de l’avenir.

Les ronds de la transition

800px-11._Éolienne_du_Parc_de_Derval-LusangerSi l’idée autant que la nécessité d’une transition énergétique est acquise, le chemin qui y mène semble pavé d’intentions plus ou moins bonnes.

Tout d’abord, il est un peu saugrenu de trouver des discussions sur les sacs plastiques et la vaisselle jetable dans ce débat. Non pas que cela soit sans importance et que oui, les océans se porteront mieux sans déchets plastiques, mais cela me semble d’une autre nature que l’avenir énergétique. Pour ce qui est de l’écotaxe, le débat étant devenu hystérique, cela n’a plus rien à voir avec une question de choix énergétique.

Ensuite, je reste plutôt agacé par des positions finalement très stéréotypées et par la faiblesse des principes généraux.

Pour les principes généraux, je défends avec force l’idée d’une énergie peu chère, abondante, entrant dans le cadre du développement durable. Je défends avec encore plus de force l’idée d’un accès universel et à un coût soutenable à l’énergie nécessaire pour assurer les besoins fondamentaux des citoyens. Cela doit entrer dans la définition même d’un service public de l’énergie et cela s’oppose à une conception rétrograde et malthusienne de l’énergie.

Quant à la technologie, le sujet est plus passionné que passionnant tant il n’est devenu qu’une répétition d’antiennes et de fantasmes.

Commençons par « l’obsolescence programmée ». Il me semble que garder le plus longtemps possible un objet pour diminuer son coût énergétique est un peu court. Ma grand-mère a son frigo depuis plus de 20 ans. Bel exemple à suivre me direz-vous ! En fait, un réfrigérateur dernier cri de classe A++ va consommer entre 25% et 37% que son homologue de classe A. Or un frigo ayant 20 ans a plus de chances de se rapprocher d’une classe Z que du A. Autrement dit, ce vieux frigo symbole de la lutte contre l’obsolescence programmée est une catastrophe énergétique à lui tout seul. Pire que cela, sans un remplacement motivé par l’innovation rapide, vous auriez toujours en poche un téléphone d’il y a 10 ans et certes pas un smartphone dont les possibilités ont transformé radicalement les usages (l’I-Phone est sorti en 2007).

Il apparaît clairement que l’utilisation du pétrole va diminuer dans notre vie quotidienne. La face la plus visible de cette évolution étant l’automobile qui non contente d’avoir des moteurs de plus en plus optimisés se voit adjoindre des sources complémentaires d’énergie. Là, cela se passe plutôt bien et en douceur.

Là où cela se passe plutôt mal et dans le bruit et la fureur, c’est pour la production d’électricité. Le débat s’est focalisé depuis des dizaines d’années sur le nucléaire. Oui la technologie de la fission nucléaire induit des risques aux conséquences désastreuses et oui elle a tué à plusieurs reprises. Mais pour être totalement objectif, elle a tué moins que le charbon. Si le nombre de morts passés et à venir ainsi que le risque sont les critères, il faut interdire d’abord le charbon. Or partout où l’on arrête le nucléaire, on le remplace en grande partie par le charbon.

Si le critère est l’impact climatique, alors le nucléaire est une solution présente et à venir, à ceci près qu’il faut le plus rapidement possible abandonner la fission au profit de la fusion (ITER) qui ne pose en particulier pas de problèmes insolubles de déchets. Le pétrole, le gaz, le charbon et la méthanisation sont néfastes en terme d’impact climatique. Quant aux énergies solaires, éoliennes & hydroliennes, elles sont bien sûr une voie à condition de maîtriser la partie « grise » (pollution indirecte), mais elles sont aussi probablement limitées à une utilisation domestique ou de très petite industrie. On ne sait actuellement pas produire l’énergie nécessaire à l’industrie avec ces technologies.

Enfin, même s’il faut continuer nos efforts pour diminuer la consommation des appareils, je ne crois pas un seul instant à la diminution volontaire de la consommation. À titre personnel je peux bien investir dans des lampes fluocompactes et autre diodes électroluminescente, je ne vois pas comment imposer à ma petite famille une restriction de consommation (j’essaie pourtant !).

La politique énergétique à long terme doit être guidée par un débat sur les principes. Pour ma part : énergie peu chère, abondante, entrant dans le cadre du développement durable, le tout devant avoir une dimension sociétale intégrant un accès minimal universel à l’énergie. Les choix techniques doivent ensuite en découler en intégrant les faits.

La manif anti-tout contre un monde où tout devient possible

La manif anti-tout semble avoir eu un succès limité et le mouvement qui stagnait ne semble pas devoir reprendre de l’ampleur en l’état. Les politiques conservateurs (quand ils ne sont pas réactionnaires) ont du mal à donner une cohérence à leur présence au sein de ces manifestants des différents refus de l’époque.

L’abrogation future du mariage n’étant pas réaliste (comment démarier les gens ?), certains proposent des pirouettes sémantiques en guise de cache sexe : on garde le texte et on change le nom. Ceux-là n’ont sans doute pas compris l’origine et la profondeur du malaise des manifestants.

Ce combat étant à l’évidence perdu, les anti-tout se raccrochent maintenant à la PMA et à la GPA. Ces deux sujets sont de natures différentes.

La Procréation Médicalement Assistée en elle-même ne pourra pas être remise en question, à part peut-être par quelques fondamentalistes, et elle n’est pas remise en cause sur son principe. Il s’agit d’un acte médical justifié et positif. Ce que veulent les contestataires, c’est la limiter aux couples mariés selon la définition religieuse du terme. Cette revendication n’est pas acceptable sur le principe, et serait non applicable en pratique.

Sur le principe, la définition Républicaine du mariage prime sur tout autre. Le mariage impliquant la filiation, aucune discrimination n’est recevable, et simple citoyen ou ministre, il faudra bien finir par être cohérent. Quant à la pratique, à moins d’obliger les gens à fournir une sextape comme preuve de légalité lors de la déclaration de naissance, je vois mal comment vérifier la légalité du « bon » usage d’une PMA.

La Gestation Par Autrui est d’une nature différente car contrairement à l’autorisation sans restriction de la PMA qui n’est qu’un constat de ce qui existe aujourd’hui (eh oui la Terre n’est pas plate !), la GPA pose la question de la re-définition de la filiation physiologique. Cette question ne peut plus être passée sous silence, ni restreinte. Voici pourquoi.

Aujourd’hui, un enfant peut déjà avoir 2 pères et 3 mères. Un père « ADN », un père légal, une mère « ADN », une mère « gestatrice » et une mère légale. Certains voulaient interdire la possibilité d’avoir une mère « gestatrice » qui ne serait ni la mère « ADN » ni la mère légale. Ceci n’était déjà pas vraiment possible puisque la GPA étant reconnue dans certains pays, la loi française ne peut empêcher la naissance de ces enfants, sans avoir pour autant le courage de les reconnaître clairement et définitivement.

19681885Ce n’était déjà pas simple, mais depuis la semaine dernière, nous avons basculé dans un autre monde avec la naissance d’un enfant né d’une mère qui avait subit une greffe d’utérus. La greffe fonctionnelle d’utérus change tout car tôt ou tard on aboutira à une greffe fonctionnelle sur un homme (père « gestateur »). Ce qui était un thème cocasse de film tournera alors à une vraie crise existentielle.

Nous sommes construits sur le stéréotype homme / femme qui était justifié par la façon dont nous sommes conçus et dont nous naissons. Il existe des espèces où le changement de « fonction sexuelle » est un processus normal. Ce n’est (n’était ?) pas le cas de l’Homme. Les avancées médicales sont sur le point de détruire ce stéréotype structurant.

Nous sommes décidément à une époque où les certitudes les plus absolues volent en éclat. Personnellement, je n’ai pas de problème pour accepter le mariage dans sa définition républicaine actuelle. Je n’ai pas de problème pour étendre la PMA à qui le demande et à qui donne des garanties d’avenir pour l’enfant à naître. Je n’ai pas non plus de problème quant à la GPA du moment que la loi règle la question de la marchandisation du corps humain. Mais je ne sais que dire de la dernière évolution qui est en train d’arriver.

Je ne partage pas le refus des anti-tout. Je conçois cependant que certains ne puissent accepter tous ces changements qui explosent à ce point les repères qui nous construisent. Nous ne pouvons pas leur reprocher d’exprimer leurs peurs et leurs refus. Par contre, l’indigence politique de la droite sur ce problème, et la faiblesse de la réflexion et de la vision que l’on rencontre parfois à gauche est beaucoup plus préjudiciable. Si ce problème n’est pas correctement géré, il aboutira à des affrontements violents car une société ne peut s’accommoder d’un écart si grand en son sein.

Droit de la vie. Droit de la mort

cours-europeen-droits-hommesL’actualité m’incite à revenir sur le droit de la mort, un thème que j’ai déjà traité plusieurs fois mais qui au fil des années a bien du mal à trouver une solution satisfaisante.

L’acquittement du docteur Bonnemaison et la décision du Conseil d’État suivi de la décision de la Cours Européenne des Droits de L’Homme sur le cas Vincent Lambert apportent des éléments éclairant sur ce thème.

Tout d’abord, dans mes billets précédents sur le sujet, je défendais le principe même d’une décision aboutissant à l’arrêt de la vie du moment que cela était encadré par la loi et prenait en compte

  • l’avis de la personne concernée, qu’il soit exprimé explicitement ou implicitement
  • l’avis de l’entourage proche
  • l’avis du corps médical
  • l’avis de la société par la voix de la justice

Les deux cas d’aujourd’hui montrent que si la loi Léonetti est une bonne chose, elle n’est pas suffisante, ce qui était connu.

Elle n’est pas suffisante dans le cas Bonnemaison puisqu’il y a hiatus entre les actions du médecin qui sont stricto sensu hors la loi et le jugement de la cours d’assise (et du procureur d’une certaine façon) qui en reconnait le côté légitime et non condamnable. Si la loi avait été correcte, un procès aurait pu avoir lieu pour n’avoir pas respecté la nécessité d’une décision collégiale des tiers concernés et certes pas pour empoisonnement.  Mais comme l’a dit l’avocat du docteur Bonnemaison, on ne peut pas être à moitié coupable et c’est pourquoi l’acquittement a été prononcé.

Le cas Vincent Lambert est encore d’une autre nature puisque toutes les parties ont été consultées et que l’avis final était une décision d’arrêt des soins avec pour conséquence prévisible la mort. Le recours devant la Cours des Droits de L’Homme suspend cette décision pour passer à une décision de niveau supra-national.

À mon sens, il y a là un problème.

Si le cas étudié n’était qu’un problème légal, la hiérarchie de compétences légales, nationales et supra-nationales ne me poserait pas de soucis puisqu’elle résulte d’accords librement signés par l’État sur des cas clairs (à défaut souvent d’être simples). Le soucis est qu’ici on voit clairement que l’on est à la frontière de ce que peut faire le droit et que l’on se heurte aux impératifs d’un consensus moral sur ce qui est bien ou mal. Le droit peut être plus ou moins partagé internationalement. Mais même en prenant le point de vue très français de l’universalisme des valeurs (nos droits de l’homme), il faut bien avouer que sur ce qui est du droit de la mort (mais également de la vie), les fondements culturels d’une société (donc d’un pays) ne peuvent pas être passés sous silence.

Dans le cas Lambert, il y a eu finalement un consensus même si l’unanimité n’a pas pu se faire. Toutes les parties concernées sont arrivés à décider de ce qui pouvait être moralement fait ou pas et donc tranchait là où la justice n’y arrivait pas seule. Le jugement de la Cours De Justice Des Droits de L’Homme ne peut rien ajouter de plus à cela, sa décision qu’elle qu’elle soit sera nécessairement arbitraire, fondée soit sur une interprétation mécanique de textes qui ne peuvent prendre en compte la complexité de la situation, soit fondée sur des éléments moraux qui ne sont pas nécessairement ceux qui s’appliquent à notre société. Et encore sommes-nous ici dans un cas où les valeurs nationales et supranationales sont très proches.

J’ai bien conscience de la brèche que ces réflexions impliquent dans l’idée d’avoir des cours internationales de justice. Le droit ne dit pas ce qui est juste ou pas, il permet de donner une décision acceptable applicable sans contestation dans des cas de conflit. Cependant dans quelques rares cas complexes où les valeurs morales ne font pas l’objet d’un consensus large, la loi et la société sont en crise.

Dans le cas Lambert un consensus avait été trouvé, la Cours De Justice Des Droits de L’Homme ne doit pas aller contre et à mon sens devrait refuser de statuer.

 

Jusqu’ici tout va mal…

noaa-avril-2014Pas le temps de s’apitoyer sur la défaite des européennes (c’est quand la dernière fois où les électeurs nous ont fait confiance sur cette élection ?) ni de  s’étendre sur la dislocation de l’UMP (quand l’argent est une valeur, on finit toujours par périr par l’argent). Quant au FN, même avec un marketing efficace et un relookage « sois propre sur toi et souris sur la photo« , il reste un parti dont la valeur principale est la détestation partagée de l’autre ce qui mène là aussi inévitablement à la dislocation (de la société en l’occurrence).

Non, ce qui me préoccupe aujourd’hui ce sont les dernières statistiques sur la bascule climatique. S’il ne reste plus grand monde pour nous expliquer que l’homme n’y est pour rien et que c’est un phénomène cyclique, cette bonne blague est maintenant à ranger au rang de l’anecdote au regard de ce que l’on constate.

Aux États-Unis, ce printemps a été le plus chaud depuis le début des prises de mesures, les records s’enchaînent et en France avril a été au 5ème rang des mois d’avril les plus chauds depuis 1900.

Les concentrations de CO2 dans l’atmosphère ont pour la 1ère fois de notre histoire dépassé 400 parties par million (ppm) contre 278 ppm au début de l’ère industrielle.

Dit autrement, il est plus que probable que l’on reverra des hivers avec des tempêtes qui ressemblent de plus en plus à des ouragans (drôle de mot sur nos côtes), que toutes les villes côtières vont devoir prendre des mesures soit pour protéger les constructions en front de mer, soit pour les évacuer, que l’on attend de voir si cet été va tourner au climat tropical ou désertique et s’il faudra renommer les pluies d’automne « mousson ».

Cette fois on y est. Si l’État continue à être paralysé il faudra s’en passer. L’époque a au moins cela de positif que c’est possible, les citoyens ont les moyens d’agir et de faire lorsqu’il y a carence. C’est peut-être cela la VIème République.

201404

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Pour approfondir :

 

Changement climatique : confirmation et alarme

IPCC_Working_Group_II_2014-03-31_18-55-43Le GIEC vient de publier son nouveau rapport sur le changement climatique en cours.

 

Ce nouveau rapport fait le point sur les impacts prévisibles et donnent des recommandations urgentes.

Il confirme l’impact de nos comportements sur le climat, appuie sur les effets catastrophiques prévisibles (sécheresses, érosion, submersion, sécurité alimentaire, extinctions massives d’espèces, …).

 

La bataille de l’augmentation de 2°C semble perdue et si nous perdons celle des 4°C, notre situation serait au-delà du préoccupant. Changement climatique : Publication du Rapport… par developpement-durable

Il est temps de dépasser le stade des blablas simplistes et d’aborder les questions qui fâchent :

  • ingénierie climatique,
  • fusion thermonucléaire comme source d’énergie,
  • déplacement préventif de population,
  • accélération du changement de mode de consommation énergétique.

_______ Pour aller plus loin : rapport de préconisation du GIEC.

Un thème (central ?) pour la future campagne municipale

imageVoici une vidéo du site Acteur Public sur une table ronde « Le numérique, un challenge démocratique pour les territoires ».

Ceux qui pensent encore que le numérique est un élément mineur du débat démocratique ont sans doute intérêt à envisager de faire autre chose que de la politique…

Conférence de Michel Rocard sur l’Arctique

1380729767687Michel Rocard était cette semaine à Brest pour une conférence sur l’Arctique.

J’en ai retenu l’idée principale que cette région était devenu un imbroglio juridique international suite au changement climatique en cours.

Le changement climatique d’abord contesté sur sa réalité, puis sur ses causes, provoque de façon spectaculaire une diminution de la surface de la banquise en Arctique et à moyen terme une dislocation prévisible de cette même banquise (vers 2050).

Pour la faune, l’adaptation semble devoir être celle de la migration. Les ours polaires pourraient avoir une chance de survivre en migrant vers les terres et en s’adaptant à un nouvel environnement (par eux-même ou par croisement de l’espèce avec des ours bruns), les poissons remontent vers le nord au fur et à mesure du réchauffement de l’eau.

Pour l’homme aussi, ou plutôt son commerce, ce réchauffement sonne l’heure des grands mouvements. L’ouverture des routes maritimes du pôle sont un enjeu majeur car c’est beaucoup plus court pour une large part des échanges de passer par le pôle plutôt que par Panama ou Suez. Là où cela se complique, c’est que ces routes maritimes seront sous responsabilité des pays frontaliers alors qu’il y a très peu de ports permettant d’assurer la sécurité imposées par les traités internationaux. Au premier accident, ce sera la catastrophe à tout point de vue.

Ce problème de route maritime se couple avec celui de revendications territoriales liées en grande partie à la richesse du sous-sol du plateau continental. Jusqu’ici, on ne s’était guère préoccupé de savoir qui avait des droits sur quoi. Or avec la libération des glaces, les ressources halieutiques ainsi que celles du sous-sol deviennent accessibles et très tentantes…

On regrettera hélas, que contrairement à ce qui s’est passé pour l’Antarctique qui est devenu un havre de paix et de sagesse mondiale, l’Arctique est déjà lui une source majeure de frictions. Et comme les revendications territoriales et l’exploitation de la zone ont déjà largement précédé les accords et le droit, il n’y a presque aucune chance que cette région soit gérée avec sagesse. L’histoire risque fort de retenir que les premières conséquences du changement climatique furent géopolitiques.