Tout d’abord, je vous présente mes meilleurs vœux pour cette nouvelle année, vœux pour vos familles mais aussi pour nos actions futures en qualité de militants ou sympathisants. J’espère que 2013 commencera à nous apporter les premiers fruits de nos victoires électorales de 2012.
Et pour ce premier post de l’année, je vous propose une synthèse de réflexions sur des échanges que nous avons pu avoir entre camarades finistériens de la motion Hessel sur un sujet délicat, non pas sur le fond, mais sur le côté parfois enflammé qu’il peut susciter, à savoir la parité.
À l’origine de cet échange, il y avait une remarque personnelle sur de possibles collisions entre l’application de la parité et la légitimité démocratique, ou dit autrement, la parité (différenciation sexuée) prime-t-elle ou non sur la démocratie (citoyenneté par nature non discriminante) ? Cette question se pose d’autant plus lorsque les « échantillons » électoraux sont réduits, ce qui était le cas lors de la constitution de nos instances fédérales.
Une des difficultés de ce genre de débat est de ne pas tomber dans une rhétorique mille fois répétée et pimentée « d’agacements » mille fois ressassés. Une autre difficulté et d’avoir une égalité « paritaire » dans le dialogue puisque tout argument avancé par un homme est rapidement suspect de machisme (on rappellera d’ailleurs que le féminin de macho est macha).
Enfin, je dois confesser pour ma part que depuis que je suis entré au PS, le débat sur le sujet m’a toujours paru décalé par rapport à la réalité de la société actuelle. J’ai maintes fois assisté médusé à des échanges parlant d’une société qui n’est pas celle dans laquelle je vis. La société française d’aujourd’hui n’a rien de parfait en terme d’égalité, mais je reste persuadé qu’elle n’a rien à voir avec la société marquée par les combats féministes des années 70.
J’ajouterai enfin pour clore cette longue introduction que la nature violente souvent prise par ce débat ne fait en rien partie de mes valeurs et n’est pas justifiable. Le combat pour l’égalité de tous et l’équité de chacun ne peut en aucun cas être un combat des femmes contre les hommes (je suis marié, j’ai deux filles et je refuse que ma femme et mes filles puissent être des sous-citoyennes), mais bien un combat de tous contre les inégalités et les injustices qui en découlent.
Voici une première réflexion de Paul Legoff sur le sujet.
Lors du dernier Conseil Fédéral l’application de la règle de la parité a suscité un débat à cause du faible nombre de candidates (11 pour 10 postes) comparé à celui des candidats (27 pour 10) . Le mot parité signifie égalité parfaite entre hommes et femmes mais pour quel objet : le nombre d’élus ou le nombre de candidats ? Si la parité est évidemment exigible en matière de salaire à travail égal qu’en est-il en matière d’élection?
S’il est vrai que nous naissons libres et égaux en droits il est néanmoins évident qu’il y a des différences entre l’homme et la femme sur le plan anatomo-physiologique, sur le plan physique et psychologique. Par exemple la femme a le privilège de pouvoir enfanter et , au passage, j’indique qu’en terme médical la parité signifie enfantement (du verbe latin « parere » qui signifie enfanter). Dans ce domaine la parité n’existe pas entre les femmes car il y a des nullipares( sans enfant) et des multipares ( avec plusieurs enfants) mais elle existe encore moins entre les hommes et les femmes! Ici la parité n’est pas pour demain !
Sur le plan physique, sauf cas particulier, la morphologie des corps est , à l’évidence, différente à l’avantage de la femme . En revanche, dans le domaine du sport, l’infériorité de la femme apparaît nettement dans toutes les disciplines. De même si on écoute un opéra on constate que les voix masculines et féminines ne sont pas interchangeables . Faudrait-il imposer par la loi que la femme puisse courir le 100 mètres plat en moins de 10 secondes, à l’égal de l’homme, ou qu’il y ait autant de ténors féminins que masculins? Ce serait ridicule . Pourquoi en va -t-il différemment en matière de politique où les différences psychologiques et affectives entre les deux sexes jouent probablement un grand rôle? Il ne s’agit pas d’invoquer une infériorité de compétence de la femme par rapport à l’homme mais n’y a-t-il pas des dispositions différentes selon le sexe pour certaines activités? Par exemple les femmes ont pris de dessus dans les écoles de la magistrature et les facultés de médecine (deux tiers de femmes dans les promotions actuelles) et on ne peut que s’en réjouir .
Mais si beaucoup de femmes ont les qualités requises pour réussir en politique sont-elles en nombre suffisant? On observe chez les femmes une certaine réticence à se porter candidate à une élection et même à militer. Est-ce une conséquence de raisons sociétales et sociales comme les stéréotypes invoqués par certains ou du tempérament féminin moins agressif, plus imprégné de douceur que celui de l’homme, moins viril du fait d’une imprégnation hormonale différente susceptible de constituer un handicap dans le monde sans pitié de la politique ? Quoi qu’il en soit la loi actuellement en vigueur, qui a pour but d’assurer la promotion des femmes en politique peut dans certaines circonstances dépasser le but recherché et créer des injustices voire une atteinte à la démocratie comme on a pu l’observer lors du l’élection du Conseil Fédéral où le nombre de candidates était très inférieur (11 pour 10 places) à celui des candidats (27 pour 10 places) . En somme ce qui est en cause c’est la définition de la parité : ne devrait-elle pas signifier une égalité du rapport entre le nombre de candidats et le nombre de postes à pourvoir et non le nombre d’élus égal pour les deux sexes quel que soit le nombre de candidats?
Une loi doit être respectée mais elle peut aussi être modifiée
Paul introduit ici plusieurs points qui d’ailleurs ne sont pas que liées au sexe, et qui découlent des caractères physiques et psychologiques des individus. Nos différences personnelles entraînent des différences de comportement et d’aptitude qui structurellement ne facilitent pas la parité « naturelle » (d’où le besoin d’une loi, même imparfaite). Je relèverai au passage un non-dit : la compétence est souvent avancée pour justifier la parité. Hélas, rien dans le processus électoral actuel n’est mis en œuvre pour faire de ce critère un élément discriminant. On espère que nos élus sont compétents (heureusement cela arrive régulièrement !), mais le processus électoral favorise principalement les bateleurs de foire au détriment des visionnaires compétents, des Sarkozy au détriment des Rocard.
Autre élément découlant de ces différences entre sexes : les clichés et les stéréotypes qui sont d’une nature autre que la psychologie et la physiologie des individus. Nombre de ces clichés induisent une perception négative de la femme, la renvoyant à un rôle passif et donc niant une partie de sa citoyenneté. C’est de moins en moins vrai mais cela demeure vrai. Ceci ne peut pas être changé par la loi et je ne suis pas sûr que cela n’ait évolué que sous la seule action du féminisme. L’égalité de traitement dans les familles et les écoles, l’exemple de femmes ayant accompli leur destin non pas parce qu’elles étaient des femmes mais parce qu’elles étaient des personnes qui voulaient apporter leur pierre à l’édifice global de notre société, apportent il me semble plus de progrès profonds que la loi. La loi est une nécessité faute de mieux. Mais il suffit de voir les différences entre le Finistère qui est exemplaire et la majorité des autres départements pour comprendre que les progrès réels ne sont pas issus de la loi. Et c’est parce que plus qu’ailleurs, les socialistes finistériens ont intégré l’égalité homme/femme que je pense pouvoir écrire ce post (on attendra les réactions pour voir si j’ai raison…). Si la loi suffisait, alors un choix de candidatures par scrutin stochastique aurait résolu le problème depuis longtemps !
Le dernier élément sur lequel je voulais revenir, est l’argument sur les violences faites aux femmes. Cet argument est tout à la fois le plus douloureux et le plus pernicieux car il plombe de façon certaine les efforts pour débattre sereinement de l’égalité homme femme. Pourquoi ?
Tout d’abord les statistiques sur les meurtres familiaux sont présentées de façon très partielles. On dénombre environ 150 meurtres familiaux d’adultes par an, 122 femmes tuées l’an dernier pour 24 hommes. Les infanticides dont il est très difficile d’estimer le nombre exact sont d’une vingtaine de cas par an (les chercheurs estiment qu’ils seraient en fait 5 fois plus nombreux). Enfin, nous manquons de statistiques pour ce qui concerne les violences au sein des couples homosexuels. Alors oui la violence au sein des familles est totalement inacceptable et doit être traitée, mais son utilisation dans le débat sur la parité, en désignant chaque homme comme meurtrier potentiel, introduit plus qu’un biais : les meurtres familiaux ne se réduisent pas à un problème de brute avinée et prédatrice, ils nous renvoient à notre propre incapacité à agir lorsqu’autour de nous nous suspectons un tel problème et que nous détournons les yeux. Ne mêlons donc pas un sujet douloureux à un débat complexe.
La parité est un vrai thème de fond. C’est un combat légitime débuté il y a bien longtemps, combat qui fut mené à une époque sous la bannière du féminisme. Chaque époque a ses combats et ses succès, ce qui fut le cas du féminisme. À mon sens cependant, le combat actuel pour la parité, ou plutôt pour l’égalité citoyenne qui dépasse la question des sexes, doit être mené d’une façon différente, inclusive et consensuelle plutôt que de façon discriminante et très véhémente. Je suis un homme de mon temps, un père qui participe activement à l’éducation de ses enfants, un mari qui participe très largement aux tâches domestiques. Je suis aussi un militant qui veut œuvrer pour une représentation plus juste des citoyens et pour une refondation politique sur d’autres bases que le show médiatique dont nous sommes trop souvent les spectateurs navrés (mais complices). L’émancipation des individus est également une des valeurs que je défends, ce qui signifie aussi que partout où je combats un mauvais modèle, je dois bien me garder d’en imposer un autre fut-il meilleur à mes yeux : l’égalité et la parité doivent s’imposer à toute la société, mais nous devons éclairer l’individu sans pour autant l’obliger à adopter le modèle que nous pensons bon de notre point de vue. Le choix lui appartient. Éternel dilemme.