J’ai pris quelques jours de réflexion et de recul pour commenter le passage de Dominique Strauss-Kahn à France 2 jeudi dernier, et c’est tant mieux puisqu’en plus de cette prestation, je vais pouvoir commenter les réactions…
Sur la prestation d’abord. DSK c’est généralement du solide, de l’argumenté et du responsable, pas de surprise là-dessus, le patron du FMI ne s’est pas fourvoyé dans un lyrisme populiste ni dans un yakafokon tellement en vogue ces derniers temps, ni dans une sécurité technocratique aussi confortable qu’incompréhensible pour le citoyen lambda. L’exercice n’était pourtant pas simple puisque les interpellations enregistrées des français pouvaient facilement inciter à la glissade sur la souffrance du bon peuple de France alors que sa position au FMI offrait généreusement à DSK la position de celui qui plane à quinze mille au-dessus des autres. Mais non, rien de cela dans l’explication du dysfonctionnement bancaire actuel, rien de cela dans l’analyse de la situation des salariés de Continental non plus.
Ce qui m’a cependant le plus retenu jeudi soir, c’est sans doute la hauteur internationale et le respect affiché par M. Boutros-Gahli (Youssef, pas Boutros) le ministre des finances égyptiennes. Dire qu’ici, une certaine gauche passe une bonne partie de son temps à nous expliquer que DSK c’est le FMI ultra-libéral et qu’il ne fallait surtout pas y aller. Manifestement, du côté des pays qui restent à la porte du G20, on n’est vraiment pas d’accord avec les gauchistes français. J’en viens à me demander combien d’autres français jouissent d’une si bonne réputation à l’extérieur de nos frontières (et accessoirement pourquoi nous aimons tant nous auto-flageller…).
Passons aux commentaires. Que d’articles tout d’un coup, avec un thème qui revient (avec plus ou moins d’ironie lorsqu’il s’agit du canard), c’est l’image du “french sauveur”. Je déteste personnellement l’idée du sauveur, d’où qu’il vienne, mais force est de constater qu’en période de panade et devant l’incompétence généralisée, c’est journalistiquement tentant… Du coup, constatant ce soudain regain d’intérêt et comme je suis curieux et taquin, je suis allé voir du côté de Libé si eux aussi ne se seraient pas laissé allé à quelque chose de positif ( http://www.liberation.fr/recherche/?q=dominique+strauss-Kahn ). Ouf, il y a bien un article sur son passage à France 2, mais comme à leur habitude lorsqu’il s’agit de DSK, on y trouve la vacherie règlementaire (en fin d’article : http://www.liberation.fr/politiques/0101558049-strauss-kahn-un-retour-pour-le-futur). La gauche bien pensante peut continuer à roupiller tranquille.
Côté oueb maintenant. Il semblerait que les équipes de Pierre Bergé aient eu du travail. Le message à faire passer est en gros “avec tout l’argent qu’il brasse au FMI, DSK sera vu comme le candidat des riches“. Il se trouve au passage que c’est la doctrine de Claude Guéant pour sauver la mise à Nicolas Sarkozy en 2012… Alors, quelle est donc l’argumentation contre ce plus riche que moi tu meurs ? Eh bien en substance (je vous résume, pour la profondeur de l’argumentaire il faudra vous taper la prose internet vous-même), c’est DSK qui a inventé le bouclier fiscal, les stock-options et autres bonnes choses du moment, et en plus Dominique a un salaire qui oscille entre 400 000 et 500 000 suivant les blogueurs (somme généralement citée en euro ; pour info, c’est 325 000 euros par an). Bien sûr, au passage chacun s’ingénue à citer d’autres articles en en déformant quelque peu le contenu. En voici un exemple d’école :
Le premier article (DSK est méchant il a inventé le bouclier fiscal) renvoie sur l’article II (la gauche a inventé le bouclier fiscal) qui renvoie sur un article du canard décrivant une obscure loi datant de 1988 puis amendée, en balançant au passage quelques inepties sur la fiscalité européenne (si le coeur vous en dit, voici un document du minéfi sur la réalité de cette fiscalité). Ouf, l’honneur de Sarko est sauf, c’est Strauss-Kahn qui a tout inventé de la politique catastrophique actuelle. CQFD.
Et les français, qu’ont-il pensé ? Moins de mal qu’une certaine gauche semble-t-il puisque les seuls politiques qui trouvent grâce à leurs yeux sont Dominique Strauss-Kahn et François Bayrou. Et que représent-ils fondamentalement ? La démocratie chrétienne pour Bayrou, la social-démocratie pour DSK, une certaine vision raisonable des choses pour les deux.
Mais pour l’instant, un seul pèse sur la politique mondiale, un seul citoyen pour construire une nouvelle Démocratie Sociale Keynésienne.