L’union européenne terre d’avenir pour l’Islande

EuropePeut-être sommes-nous depuis trop longtemps au sein de l’Europe pour bien saisir combien l’Union représente un espoir d’avenir pour les peuples.

Peut-être avons-nous baissé trop longtemps les bras devant l’idéologie dominante du laissez-faire le marché, tapez dans la caisse et méprisez les lendemains et que nous avons perdu la volonté de renverser l’ordre établi, pour promouvoir ne serait-ce qu’une République social-démocrate en France sur le modèle classique des autres pays européens.

Et bien les Islandais viennent judicieusement de nous montrer le chemin à suivre pour le prochain vote. Après avoir viré avec pertes et fracas le gouvernement libéral qui avait mis leur État en faillite, leur nouveau gouvernement social-démocrate s’apprête à demander leur adhésion à l’Union dans les plus brefs délais.

Pensez-vous pouvoir agir plus vite que les Islandais en virant les dirigeants calamiteux avant le crash final ?

C’est y plus pire ou moins plus pire ?

J’écoutais ce matin sur BFM un chroniqueur qui s’emportait à propos des nouvelles prévisions du FMI, prévisions pessimistes que certains auraient souhaitées ne pas entendre, ou du moins entendre diffusées au péquin de la rue. L’argument était en gros que pour que les choses aillent mieux, il fallait dire que cela allait mieux car en disant pas que cela va mieux on ne peut pas combattre efficacement la crise. En voilà un qui soit devrait prendre deux ou trois cours de psychologie et de management ou à défaut se pencher sur ses archives et extraire toutes les prévisions optimistes de notre gouvernement ces deux dernières années, prévisions surestimées qui ont conduit à l’imprévoyance plutôt qu’à un effet de croissance optimiste…

Mais au-delà de la sainte colère de ce chroniqueur méthode Coué, on peut quand même constater que nous semblons avoir atteint une sorte d’étape en apesanteur où il semble difficile de savoir si nous allons continuer à tomber, si nous en restons là ou si nous sommes en mesure de repartir.

Apesanteur financière tout d’abord. Après une valse bancaire, le système financier semble avoir stoppé l’hémorragie (du moins du côté éclairé du monde financier car côté paradis fiscaux on perçoit des bruits de naufrage) et le mot d’ordre semble être d’avancer avec prudence pour ne pas mettre le pied sur une mine oubliée. Difficile cependant d’être sûr que les fondations du coffre-fort sont à nouveau solide ou qu’un irresponsable n’a pas gardé la clé.

Apesanteur économique ensuite. La question est là de savoir si les sociétés qui ont déposé leur bilan ou sont en passent de le faire ont détruit assez d’offre pour qu’offre et demande soient revenus à des niveaux compatibles (et dire que certains ont refusé l’idée même de relance par la consommation). C’est particulièrement clair avec l’industrie automobile américaine qui, comme je l’avais évoqué il y a plusieurs semaines, va très probablement perdre Chrysler et sans doute GM, le tout au profit des autres constructeurs dont Ford. Si c’est le cas, les relais de trésorerie suffiront, sinon l’économie ne peut que reprendre sa destruction de valeur.

Apesanteur sociale enfin. Là c’est plutôt étonnant car même si on constate quelques conflits très visibles (Continental, Caterpillar, …), les cris de douleurs semblent comme étouffés. On m’a raconté il y a peu (c’est un récit que je n’ai pas pu vérifier) que les gens commençaient à demander des devis de travaux dans le but de les présenter chez leur banquier pour obtenir des prêts. A ceci prêt qu’une fois obtenus, ces prêts ne finançaient pas des travaux mais la consommation du quotidien. Pour les français, la crise n’en est qu’à son début contrairement au monde financier, elle vient de frapper à la porte contrairement aux banquiers. Alors oui, pour les français, il faut dire les choses comme elles sont, et surtout leur montrer par des actes qu’ils ne sont pas seuls, que l’on combat à leurs côtés, que l’on fera ce qu’il faut pour qu’ils ne se retrouvent pas à la rue.

Mais qui est on ? Le FMI a le pouvoir (et le devoir) d’annoncer la tendance la plus vraisemblable mais qui est à la manœuvre ? Le plan de relance français est toujours aussi faiblard, les aides, comme celles décidées pour les apprentis semblent tellement restreintes là où ils faudrait toucher tant de monde. Le gouvernement actuel à bout de souffle devra encore atteindre les résultats des élections européennes pour être remplacé (et encore, le remaniement sera fonction de l’ampleur de la sanction éventuelle des français). Finalement, la France politique est elle aussi en apesanteur alors que nous avons besoin d’actions, de leaders compétents, efficaces, volontaires, et accessoirement humbles face aux défis.

DSK ou l’image de la Démocratie Sociale Keynésienne

Strauss-Kahn et ChabotJ’ai pris quelques jours de réflexion et de recul pour commenter le passage de Dominique Strauss-Kahn à France 2 jeudi dernier, et c’est tant mieux puisqu’en plus de cette prestation, je vais pouvoir commenter les réactions…

Sur la prestation d’abord. DSK c’est généralement du solide, de l’argumenté et du responsable, pas de surprise là-dessus, le patron du FMI ne s’est pas fourvoyé dans un lyrisme populiste ni dans un yakafokon tellement en vogue ces derniers temps, ni dans une sécurité technocratique aussi confortable qu’incompréhensible pour le citoyen lambda. L’exercice n’était pourtant pas simple puisque les interpellations enregistrées des français pouvaient facilement inciter à la glissade sur la souffrance du bon peuple de France alors que sa position au FMI offrait généreusement à DSK la position de celui qui plane à quinze mille au-dessus des autres. Mais non, rien de cela dans l’explication du dysfonctionnement bancaire actuel, rien de cela dans l’analyse de la situation des salariés de Continental non plus.

Ce qui m’a cependant le plus retenu jeudi soir, c’est sans doute la hauteur internationale et le respect affiché par M. Boutros-Gahli (Youssef, pas Boutros) le ministre des finances égyptiennes. Dire qu’ici, une certaine gauche passe une bonne partie de son temps à nous expliquer que DSK c’est le FMI ultra-libéral et qu’il ne fallait surtout pas y aller. Manifestement, du côté des pays qui restent à la porte du G20, on n’est vraiment pas d’accord avec les gauchistes français. J’en viens à me demander combien d’autres français jouissent d’une si bonne réputation à l’extérieur de nos frontières (et accessoirement pourquoi nous aimons tant nous auto-flageller…).

Passons aux commentaires. Que d’articles tout d’un coup, avec un thème qui revient (avec plus ou moins d’ironie lorsqu’il s’agit du canard), c’est l’image du “french sauveur”. Je déteste personnellement l’idée du sauveur, d’où qu’il vienne, mais force est de constater qu’en période de panade et devant l’incompétence généralisée, c’est journalistiquement tentant… Du coup, constatant ce soudain regain d’intérêt et comme je suis curieux et taquin, je suis allé voir du côté de Libé si eux aussi ne se seraient pas laissé allé à quelque chose de positif ( http://www.liberation.fr/recherche/?q=dominique+strauss-Kahn ). Ouf, il y a bien un article sur son passage à France 2, mais comme à leur habitude lorsqu’il s’agit de DSK, on y trouve la vacherie règlementaire (en fin d’article  : http://www.liberation.fr/politiques/0101558049-strauss-kahn-un-retour-pour-le-futur). La gauche bien pensante peut continuer à roupiller tranquille.
Côté oueb maintenant. Il semblerait que les équipes de Pierre Bergé aient eu du travail. Le message à faire passer est en gros “avec tout l’argent qu’il brasse au FMI, DSK sera vu comme le candidat des riches“. Il se trouve au passage que c’est la doctrine de Claude Guéant pour sauver la mise à Nicolas Sarkozy en 2012…  Alors, quelle est donc l’argumentation contre ce plus riche que moi tu meurs ? Eh bien en substance (je vous résume, pour la profondeur de l’argumentaire il faudra vous taper la prose internet vous-même), c’est DSK qui a inventé le bouclier fiscal, les stock-options et autres bonnes choses du moment, et en plus Dominique a un salaire qui oscille entre 400 000 et 500 000 suivant les blogueurs (somme généralement citée en euro ; pour info, c’est 325 000 euros par an). Bien sûr, au passage chacun s’ingénue à citer d’autres articles en en déformant quelque peu le contenu. En voici un exemple d’école :

Manipulation Manipulation

Le premier article (DSK est méchant il a inventé le bouclier fiscal) renvoie sur l’article II (la gauche a inventé le bouclier fiscal) qui renvoie sur un article du canard décrivant une obscure loi datant de 1988 puis amendée, en balançant au passage quelques inepties sur la fiscalité européenne (si le coeur vous en dit, voici un document du minéfi sur la réalité de cette fiscalité). Ouf, l’honneur de Sarko est sauf, c’est Strauss-Kahn qui a tout inventé de la politique catastrophique actuelle. CQFD.

Et les français, qu’ont-il pensé ? Moins de mal qu’une certaine gauche semble-t-il puisque les seuls politiques qui trouvent grâce à leurs yeux sont Dominique Strauss-Kahn et François Bayrou. Et que représent-ils fondamentalement ? La démocratie chrétienne pour Bayrou, la social-démocratie pour DSK, une certaine vision raisonable des choses pour les deux.

Mais pour l’instant, un seul pèse sur la politique mondiale, un seul citoyen pour construire une nouvelle Démocratie Sociale Keynésienne.

Comment débarasser son bilan des hyper-actifs toxiques ?

ump et bolchevismeJ’avais à peine fini de publier mon article sur l’UMP néo-bolchévique que le gouvernement Sarkozy se précipitait au micro pour nous fournir quelques exemples croustillants de sa nouvelle doctrine.

Nous avons bien sûr eu la grand messe de Saint-Quentin. Entre deux annonces qui ne sont que la reprise de mesures déjà annoncées, on notera la poussée de fièvre sécuritaire classique (ici contre les bandes de jeunes violents), une belle ode au partage de richesse (il fallait oser, il a osé) et les croquignolesques commissaires, non du peuple mais de la réindustrialisation. Peut-être a-t-on jugé les fontionnaires territoriaux, nationaux et autres préfets ainsi que Patrick Devedjian peu efficaces et débordés, d’où l’idée de niveaux missionnaires destinés à rassurer (que peut-il faire d’autre sans moyens d’ailleurs) ? Si ce n’est pas de la bonne bureaucratie bolchévique cela, qu’est-ce d’autre ?

Ce n’était déjà pas mal, mais il y a mieux encore. Ayant sans doute jugé le PS trop à droite à son goût, Nicolas Sarkozy semble se préparer à entrer au NPA et à leur montrer ce que c’est qu’être anti-capitaliste. Le terrain de jeux est bien sûr le très médiatique sujet des stock options et autres rémunérations des cadres supérieurs des entreprises. Ah, quelle merveilleuse invention que ces stock-options et ces parachutes dorés ! Comme il est bon de pouvoir dire tout et n’importe quoi en faisant peuple ! Le discours semble d’une rigueur implacable : une entreprise va mal (ici Valéo mais n’importe laquelle fera l’affaire), le patron est débarqué et part avec des stocks options ou un parachute doré alors que l’Etat doit dans le même temps voler au secours de la-dite société. Immoral n’est-ce pas ? Immoral assurément, mais pas forcément là où l’on veut bien nous le montrer !

On veut nous faire croire que le problème est ici qu’une personne quitte une société avec les numéros gagnants du loto alors que l’entreprise et les salariés souffrent. Et bien j’affirme que c’est du flan et que le problème n’est pas là du tout ! Certes, je n’ai pas franchement de sympathie pour la personne qui part dans ces conditions, mais ce qui me choque vraiment moi, c’est que d’une part des personnes ont jugé totalement normal de signer la clause du contrat qui garantissait de telles conditions de départ et que d’autre part, aujourd’hui parce que cela fait “bien”, on remet en cause un contrat tout à fait légal et librement consenti. Il est inacceptable de trouver au sein d’une même entreprise de telles écarts de rémunération, et il est inacceptable de faire croire que c’est justice que de casser ainsi une clause contractuelle, d’autant plus que cela ne servira même pas d’exemple puisque la vraie injustice de départ (les écarts de rémunération entre les moins bien payés et les mieux payés) n’est absolument pas remise en cause. Hypocrisie et cynisme.

Il me semble qu’il serait pourtant facile de régler ce problème : que l’écart de rémunération (fixe et variable) ne dépasse pas un facteur 30 pour tout le monde au sein de l’entreprise. Voilà une façon simple, claire de faire et de redistribuer la richesse (30 smics mensuels, cela laisse de quoi vivre même si certains vont devoir se restreindre un peu).  Alors si vous voulez vous battre pour une meilleure équité salariale, battez-vous pour une telle mesure plutôt que de vous laisser berner par les parachutes et autres stocks.

Mais cette fumeuse histoire de vilains patrons (car il est bien entendus que les chefs d’entreprises sont forcément des salauds n’est-ce pas), ne cachent-elles pas autre chose comme l’échec de plus en plus retentissant de deux années de gouvernement Sarkozy. Le chiffre du jour c’est celui du chômage qui pour le dixième mois d’affilée plonge : 80000 chômeurs de plus en février. En perdition économique totale en France, humilié par la Chine et snobé par Obama en politique étrangère, ayant échoué sur les objectifs affichés en 2007 que reste-t-il à Nicolas Sarkozy sinon une fuite en avant ?

Pourtant, à l’heure où le volontariste doublé d’efficacité d’Obama semble donner les premiers signes encourageants aux États-Unis, il serait plus que nécessaire d’avoir un chef d’État compétent, cohérent, rassembleur. De cela nous n’avons pas. On pourra quand même regarder Dominique Strauss-Kahn jeudi soir chez Arlette Chabot pour mesurer toute la différence entre un homme de tête qui a le sens de l’État et un insensé à la tête de notre État.

Il y a au moins un homme qui représente bien la France aux yeux du monde.

Protectionnisme et agitationnisme

Coupé PeugeotIl y a quelques semaines, j’écrivais un article qui défendait l’idée du protectionnisme dans un cadre bien précis qui est celui des besoins vitaux des citoyens satisfaits par des services publics (ou des délégations privées du service public), le tout dans un cadre européen pour ce qui nous concerne.

Ce type de protectionnisme ne s’opposant pas fondamentalement à une logique de marché puisqu’une négociation peut parfaitement être mise en place pour prendre en compte les acteurs privés de possibilité de vendre leurs bien sur un secteur protégé. Dit autrement, si l’on décide que les besoins alimentaires de base doivent être satisfaits par un service public “verrouillant” ce marché, il faudra négocier avec les exportateurs qui intervenaient sur ce marché une compensation de type service public local (a priori, consommer du riz en France correspond au même besoin vital partout dans le monde et si ce marché doit être protégé en France, il en est sans doute de même partout dans le monde. Notre pays retrouverait alors une partie de ce qui fait sa grandeur : une vision humaniste et internationaliste de son modèle de société).

L’idée du “bon modèle protectionniste” étant (rapidement) exposé, y en a-t-il un mauvais ? (mal)Heureusement, en terme de contre-exemple, nous n’avons pas à chercher longtemps, il suffit de se tourner vers notre gouvernement et de son cacophoneur en chef. Suite à son plan d’aide à l’industrie automobile, la majorité des dirigeants européens ont levé leur bouclier pour parer une orientation qui leur apparait à tous comme étant protectionniste. Nicolas Sarkozy se défend cependant après coup d’avoir décidé de mettre en place du protectionnisme.

Est-ce effectivement une mesure protectionniste, et si oui en cas est-ce du mauvais protectionnisme ?

L’aide Sarkozy est en fait un prêt, l’argument est donc de dire qu’il est remboursable et qu’il se substitue seulement aux banques dont le moindre défaut et d’être peu prêteuses en ce moment. Un prêt, c’est donc bien remboursable et ne constitue pas une aide déloyale en cash, sauf que les intérêts viendront en diminution des futurs bénéfices que que si cet argent vient servir aux investissements, l’amortissement de ces investissements viendra encore diminuer la note. L’État banquier fait une opération rentable mais le trésor public perdra plus que les revenus des intérêts de l’État banquier. On retrouve ici un mécanisme de défiscalisation, il faut juste être français pour bien en saisir l’intérêt. Il s’agit effectivement d’un mécanisme de protectionnisme, mais du même type que celui du dumping fiscal de certains pays européens (ici plutôt dé-fiscal). Il serait vraiment plus qu’utile de mettre en place un serpent fiscal européen pour éviter les mécanismes fiscaux qui effectivement faussent la concurrence.

Mais au-delà, une aide protectionniste à l’industrie automobile, même si elle était concurrentiellement loyale, serait-elle adaptée et acceptable ?

Aider Peugeot, Renault, Volvo (ou Ford, Toyota, …) ne servira absolument à rien si leurs sous-traitants venaient à faire faillite : aujourd’hui, les grandes marques automobiles ont un métier de motoriste, de R&D et d’assembleur, mais il y a très longtemps qu’une grande partie des éléments automobiles ne sont plus construits par eux. Or aujourd’hui, ce sont les sous-traitants qui sont les plus fragiles car ils font partie des variables d’ajustement des constructeurs.

Une aide en trésorerie pour les acteurs de l’automobile est-elle aujourd’hui suffisante ? Sans doute pas : si cette mesure avait été prise il y a un an, ces entreprises auraient eu le temps de s’adapter ; aujourd’hui, nous sommes en train de passer d’un problème de trésorerie à un problème de dimensionnement de l’appareil de production. Le marché est là, mais il a singulièrement rétréci (inadéquation de l’offre et de la demande) et il va sans doute devoir technologiquement muter (nous sommes en plein dans la rupture énergétique). Dit autrement, ces entreprises ont un savoir-faire, un marché, des perspectives d’avenir, mais elles sont en grande difficulté à cause des mutations nécessaires. Nous sommes en plein dans un des cas où les nationalisations temporaires ont un sens.

L’argument “vital” est-il ici recevable ? Cette industrie représente de l’ordre de 10% des emplois (de mémoire), mais ne correspond à aucun service public. De mon point de vue, l’activation de cette clause n’est pas recevable : clairement, toute aide directe doit se faire dans le cadre d’un programme européen concerté et défendable à l’OMC (aide en contre-partie d’une limitation d’exportations par exemple). Par ailleurs, il était vraiment inacceptable, voire puéril, d’annoncer un plan d’aide en désignant un de ses partenaires européens comme cause de ses maux : certes Nicolas Sarkozy se rêve encore à la présidence européenne en lieu et place des tchèques, mais ce n’est pas en affichant un mépris agressif envers nos amis européens que l’on arrivera à quelque chose de positif. Qu’ils reçoivent ici les humbles excuses personnelles d’un anonyme citoyen français pour cette grossièreté.

En résumé, le plan Sarkozy pour l’automobile est effectivement de nature protectionniste à travers des mécanismes fiscaux. Il ne correspond pas à la préservation de besoins vitaux pour les citoyens mais a une grande importance vis à vis d’un secteur qui emploie beaucoup de salariés. Il est probablement inadapté (prêt) en regard des vrais enjeux (restructuration industrielle, rupture technologique à faire). Il est agressif et inéquitable vis à vis de nos partenaires européens et risque d’entrainer en retour d’autres mesures protectionnistes car il n’a pas été négocié et accompagné de contre-partie.

Rappelons-nous, qu’au delà du point de vue idéologique, le protectionnisme a une face sombre qui est le repli nationaliste et agressif sur soi. En diminuant unilatéralement les échanges, ils diminue d’autant la création de valeur et donc amplifie la crise.

Le protectionnisme doit être réservé aux services vitaux pour les citoyens d’un pays.

La fixette qui nous perdra

Hoover DamLe bon sens semble être une chose aussi rare que les prêts bancaires en ce moment.

Le gouvernement vient de nous annoncer son plan aux mille projets telles mille fleurs plantées dans le jardin de France. Qu’en dire ? Si l’époque le permettait, je dirai avec humour qu’il s’agit là d’une vieille recette parmi les vieilles recettes si facilement méprisées lorsqu’elles viennent d’en face. Oui, bien sûr, travailler sur les infrastructures est un investissement intelligent, s’il est cohérent.

L’est-il ? A court terme, cela va maintenir des emplois et peut-être en créer quelques uns. Mais cela va-t-il à moyen terme nous permettre d’être plus compétitif grâce à de meilleures infrastructures ? Cela va-t-il nous permettre de résoudre le problème de la rupture énergétique ? Cela va-t-il nous permettre de prendre le virage de la rupture climatique ? Lorsque l’on voit que ce sont les infrastructures routières qui se taillent la part du lion, on peut en douter. Où sont les investissements dans les technologies pour demain (matin !) ? Où sont les synergies qui consolideront le tissu industriel ? Où sont les sources de développement des nouveaux services ? Où sont les amortisseurs qui empêcheront les faillites par effet de dominos ?
Cela résoudra-t-il la crise profonde du logement (trop mauvaise adéquation entre offre et demande, trop peu de nouvelles constructions, en particulier HLM) ? Là, c’est plus que douteux : le plan aide les promoteurs sans s’attaquer au fond de la crise immobilière.
Cela est-il suffisant en nombre ? Bien sûr que non, 1000 projets sont totalement insuffisants par rapport aux besoins. On peut espérer que tout cela ait un effet positif, mais nous avons des raisons de craindre une profonde erreur sur l’estimation des besoins. Ce gouvernement a compris trop tard la réalité et les implications de la crise financière (alors que les signes étaient déjà là au printemps 2007, il a fallu attendre l’hiver 2007 pour avoir une prise en compte claire et 2008 fut une course avec systématiquement plusieurs temps de retard sur la crise devenue économique). Le gouvernement n’est toujours pas en phase avec la réalité : Patrick Devedjian n’annonce-t-il pas une croissance positive alors que le FMI envisage une tendance vers -2% et que l’Allemagne donne des estimations entre -3% et -5% ? Sur ces dernières années, ce gouvernement a eu systématiquement tord par rapport aux prévisions du FMI. Aveuglement et imprévoyance inacceptables !
Est-ce suffisant en terme de champ d’application ? Sur ce point, le gouvernement Sarkozy tient un cap erroné de façon totalement psychorigide. Il est évident pour tout le monde, sauf eux, que la crise financière a déclenché un profond déséquilibre économique entre offre et demande. La capacité de production des différentes économies est maintenant largement au-dessus de la demande, et ceci va en s’accentuant au fur et à mesure où les gens perdent leur emploi ou ont peur de le perdre. Par ailleurs l’argument des echecs passés ne tient pas plus : nous ne sommes plus à l’époque où les importations menacaient les filatures Boussac et que le franc était attaqué ! Par ailleurs, aujourd’hui la faible demande est motivée à la fois par la peur de la crise et par un pouvoir d’achat qui ne permet pas d’être optimiste. Cette crise de la demande résulte au minimum de la conjonction d’éléments objectifs de crainte et du sentiment d’avoir été trahi (”travailler plus pour gagner plus” nous promettait-on). L’activisme affiché de Nicolas Sarkozy s’est transformé en mouvement brownien anxiogène.

En plus de la relance de la consommation, que pourrait-on faire ? Revenir aux fondamentaux du contrat républicain et le moderniser. Les services publiques doivent avoir pour but de subvenir aux besoins élémentaires des citoyens. Aujourd’hui, à force de casse et de raccommodage, leur objectif est devenu nébuleux, leur efficacité en baisse, leur coût en hausse. Par ailleurs, la nature profondément redistributive et palliative des aides est complètement obsolète à une époque où la diversité de situation est la règle, où le salarié et souvent aussi un micro-capitaliste ou un micro-entrepreneur, où le retraité ne l’est plus forcément totalement, où le travailleur même régulier n’a plus forcément un salaire suffisant pour vivre. J’aimerais me tromper, mais le RSA actuellement mis en avant ne résoudra pas le problème de fond de l’inefficacité de la redistribution.

Il faut passer à autre chose, passer à la gratuité partielle ou totale de la satisfaction des besoins fondamentaux fournis par les services publics ou leurs délégations (eau, énergie, nourriture, logement, soin, transport, information). Des ambryons mis en place par la gauche (CMU par exemple) ou les régions (gratuité partielle des transports) ont ouvert la voie et montré la faisabilité : allons au bout de la démarche. Là est le vrai investissement pérenne, là est l’investissement d’infrastructure et de services qui fournit un avantage concurrentiel, là est l’amortisseur de la crise pour tout un chacun, là est l’avenir des citoyens et de notre République.

Vive le protectionnisme

Emmanuel ToddJ’ai assisté cette semaine à une conférence d’Emmanuel Todd pour la présentation de son dernier livre “Après la démocratie“. L’homme est un intellectuel pétillant, direct, un rien gamin riant de ses blagues, non sans une certaine (auto)dérision.

La conférence m’a été d’autant plus agréable que je me trouvais face à un homme exprimant sans ambages la condamnation de tant de choses que j’ai pu combattre ici et ailleurs, au premier rang desquelles une vacuité totale du message politique de la dernière présidentielle (et de la suite), si ce n’est la capacité de dire ce que les gens veulent entendre sans y ajouter une once de contenu, de projet politique.

Mais au-delà de la critique des personnes, Todd nous interpelle sur un nécessaire protectionnisme économique s’insérant certes au sein des lois du marché, mais s’opposant au libre-échangisme, l’argument étant que si le libre-échange mondialisé génère des richesses, il permet surtout une montée des inégalités à un niveau inconnu dans l’époque contemporaine occidentale. Le libre-échange est “égalitaire” dans le sens d’une diffusion mondiale d’une hyper-richesse pour très peu, de la généralisation d’une classe d’ultra-pauvreté et d’une baisse moyenne de la richesse pour la plupart ; une sorte d’égalité internationale des hyper-inégalités planétaires. De fait, c’est bien ce que disent les études démographiques, et en particulier, les jeunes générations européennes bien que mieux formées que leurs aînés, bien que disposant de moyens technologiques supérieurs, bien que bénéficiant d’un plus haut niveau de productivité, sont condamnés en l’état à avoir une vie financièrement inférieure à leurs parents. C’est une hérésie de l’histoire.

Le protectionnisme est-il fondamentalement en opposition avec la social-démocratie ? Je crois, et c’est un avis très personnel, que cela va dépendre des critères idéologiques que l’on y applique, et donc des bornes et des objectifs que l’on se fixe. Si l’on décrète que certains éléments fondamentaux comme l’auto-suffisance alimentaire, énergétique, médicale, intellectuelle, financière ne peuvent être livrés au libre-échange puisqu’ils représentent des éléments vitaux pour notre société alors nous pouvons entrer dans une logique de service public non-concurrentiel avec des arguments recevables (peut-on confier un élément vital à une mécanique aveugle sans but identifiable, ou à la mystique de la main invisible du marché ?). Je crois que dans le cadre du critère “vital pour notre société”, le protectionnisme a un sens et qu’il est acceptable pour les sociaux-démocrates.

Doit-on aller plus loin et faire comme Obama qui a promis d’appliquer une politique protectionniste pour par exemple aider Boeing dans son combat contre Airbus ? Discutable, mais je crois que non : dans ce genre de cas, l’aide de l’État est une chose défendable, mais elle ne doit pas verrouiller les échanges. Boeing n’est pas vital pour le citoyen américain même s’il est clair que cette société est une source de richesse.
Le débat libre-échange vs protectionnisme doit être arbitré par l’idéologie. Nous, socdems, nous donnons pour objectif de donner un sens à notre action en regard des objectifs de notre société (notre identité individuelle s’inscrit dans un destin collectif, pas dans une concurrence d’individus isolés agissant selon la loi du démerde-yoursel). Cela est applicable sur ce problème économique et je crois que nous pouvons nous construire un discours et une politique cohérente sur ce sujet, en acceptant sans problème les lois du marché mais sans tomber dans le piège tendu par les ultra-libéraux : nous voulons des lois et des principes pour réguler le marché, ce qui veut dire que dans certains cas l’État n’a pas à intervenir, mais dans d’autres, jugés vitaux pour la société, il doit le faire et peut aller sans se renier jusqu’au protectionnisme.

Un petit regret a l’issue de cette conférence : lorsque je lui ai demandé son pronostic sur la manière dont allait finir notre République (remise en cause institutionnelle par les parlementaires bafoués, sursaut idéologique des partis ou révolution des chômeurs jetés dans la rue), il m’a fait une réponse sur ce qu’il jugeait souhaitable (modification au sein du système institutionnel) et non sur ce qu’il jugeait probable. Mais peut-être faut-il interpréter cela comme le fait que le probable n’est pas souhaitable…

Relancer la consommation ou pas ?

Faut-il faire de la relance économique en partie avec une relance de la consommation ?

France Sarkovision nous affirme que ce serait une erreur parce que cela en a été une dans un passé déjà lointain, en particulier avec tonton. A priori l’argument pourrait pour une fois tenir la route, sauf que comparaison n’étant pas raison, après examen il reste d’être jugé comme totalement idiot, ou pour le moins, à contre-courant de ce qu’il faut faire (mais c’est une spécialité de la politique économique sarkozyste).

Pourquoi la situation de la France des années 80 n’a-t-elle rien à voir avec ce que nous vivons ?

D’abord parce que les deux crises successives que nous vivons (financière puis économique) ne sont vraiment comparables qu’à la crise de 29 de part leurs rapidité et intensité.
Mais plus important, dans les années 80 la France était économiquement infiniment moins intégrée à l’espace européen qu’elle ne l’est maintenant et que la politique économique française est ultra-dépendante de la politique économique des leaders européens et que ceux-ci ont décidé de planifier une relance fondée en partie sur la consommation. Alors oui, une relance de la consommation favoriserait les importations, mais des importations en grande partie européennes et nos voisins faisant de même, l’action collective concertée serait bel et bien une vraie source de relance. Mais voilà, Sarko est d’abord un individualiste adepte du démerde-yourself.
L’entourage sarkozyste ignore-t-il ce diagnostic ?

Pas tant que cela si l’on en juge par les arguments qui prévallaient pour la fumeuse loi sur l’ouverture des magasins le dimanche, dont l’argument principal était que cela allait faire augmenter la consommation !

Alors pourquoi cette incohérence ?

Peut-être parce que sa seule qualité n’a jamais été rien d’autre que de savoir accéder au pouvoir, en aucun cas à l’exercer, et qu’il est incapable de nommer des gens compétents. Le prochain remaniement me fera-t-il mentir ?

Saint Nicolas et la hotte de la relance

Après nous avoir expliqué pendant un an et demi que tout allait bien et que les réformes porteraient leurs fruits, le gouvernement Sarkozy qui vit sans doute ses dernières semaines a non seulement dû constater que les fameuses réformes n’avaient ni anticipé, ni amorti la crise économique en cours, crise déclenchée par l’effondrement de l’ultra-libéralisme financier certes, mais surtout crise qui serait de toute façon survenue puisque les éléments structurels (énergie, climat, démographie) tendaient tous à aboutir à un problème de modèle économique. Hélas, dans un monde d’apparence et de communication à la petite semaine, rien n’avait été anticipé, rien n’avait été préparé et il faut maintenant essayer de recoller les pots cassés.

Notre très agité président s’est donc fendu d’un plan de relance qui mérite que l’on s’y arrête et que l’on s’exerce à l’art difficile des prévisions.

D’abord, impossible d’y couper avec Sarkozy, la forme. Qu’est-ce qui est mis en avant : les 26 milliards d’euro. Typique d’une personne qui affiche manifestement l’argent comme valeur fondamentale, mais sans intérêt. Est-ce beaucoup, peu, assez ? Est-ce seulement réel, c’est à dire de l’argent collecté puis ajouté aux budgets existants, ou comme pour les banques une sorte de chèque de caution récupérable, est-ce issu de la planche à billet, est-ce issu de crédits déjà prévus mais pas versés, ou encore est-ce de l’argent-Kadhafi c’est à dire une enveloppe baudruche qui ne mène à pas grand chose de concrêt ? Bien malin et savant celui qui le sait et pourra nous l’expliquer de façon claire. Mais, même si c’est bien ce qui est mis en avant, l’important n’est pas tant le montant que les mesures qui seront mises en œuvre.

Sarkozy le néo-libéral-paternaliste-franchouillard, après avoir déjà plusieurs fois mangé son chapeau (et fait partager le festin aux députés de sa majorité), vient de se convertir à l’interventionnisme musclé de l’Etat, en premier lieu dans les services publics, y compris ceux qu’ils voulaient vendre il y a encore quelques mois comme la Poste. Le plan prévoit 4 milliards d’euros d’investissements publics pour les entreprises publiques (EDF, La Poste, etc.) et 2,5 milliards pour les collectivités locales. J’ai quelques doutes sur le sens d’allouer des crédit à la loi de programmation militaire (ce n’était donc pas financé), “l’entretien et la mise en valeur du patrimoine” (mais encore ?), les hôpitaux (bonne nouvelle), la rénovation des tribunaux (n’était-ce pas une des motivations de la nouvelle carte judiciaire ?), les moyens de la gendarmerie et de la police (un grand classique sarkozyste), et les infrastructures routières, ferroviaires et fluviales (seule vraie bonne annonce pour ce qui concerne les deux dernières).

Sur cette partie d’intervention très keynésienne de l’Etat français, il me semble que si le principe est défendable, pour qu’il soit bon il faut plus que la répétition de méthodes qui ont jadis permis d’améliorer les choses. Encore une fois, nous voyons bien le problème conjoncturel (crise financière qui déclenche et révèle une crise économique), mais fondamentalement, nous nous heurtons à trois problèmes structurels majeurs et inédits. Quant à investir massivement, investissons dans un sens qui donnera l’espoir de résoudre ces problèmes structurels, ne nous contentons pas de mettre un peu d’essence dans un 4×4 General Motors ! Alors oui il faut investir du côté d’EDF, mais avec un objectif à cours, moyen et long terme de produire une énergie encore moins cher et encore moins impactante pour les écosystèmes. Oui il faut investir dans les infrastructures de transport, mais avec un objectif qui est de reconstruire un nouveau modèle économique du secteur qui inverse les impacts négatifs sur l’énergie et l’écologie. Est-ce le cas ? On peut en douter et il faudra beaucoup d’intelligence aux hauts fonctionnaires chargés de ces crédits pour orienter les choses dans le bons sens.

Deuxième élément, l’exonération de charges pour les TPE. Après son erreur quasi historique du paquet fiscal à contre-emploi, quelqu’un a réussi à convaincre Sarkozy qu’une clé de la crise se trouvait du côté des très petites, petites et moyennes entreprises. Mieux vaut tard que jamais, mieux aurait vallu anticiper les problèmes de trésorie comme nous l’avions écrit ici (et ailleurs) il y a plusieurs mois. Alors oui il faut aider l’emploi en aidant les PME à embaucher, mais pour la peine, il serait bon de remettre à plat toutes les relations économiques et sociales entre l’Etat, les collectivités locales et les petites entreprises. Là aussi, sortons de la nécessaire action conjoncturelle pour prendre de la hauteur et reconstruire l’avenir. Je passerai sur le remboursement anticipé des dettes de l’Etat envers les entreprises : par quel raisonnement pervers a-t-on pu arriver à considérer qu’il était normal que l’Etat se fasse de la trésorerie sur le dos des français ?

Annonce de la construction de logements sociaux. Là, il y a un côté formidable : cela fait combien de fois que l’on nous fait une annonce de ce genre ? Je craints fort qu’il y ait des gens qui ont objectivement intérêt à entretenir la pénurie de logements dans un certain nombre de villes, dont Paris. Cet intérêt à entretenir la pénurie aboutit invariablement à des morts chaque hiver ; il s’agit d’un crime qui devra être puni comme tel. Parallèlement, même en évacuant pudiquement ce problème, là aussi j’aurais aimé que cet effort, pour tant est qu’il soit réel, se fasse en prenant en compte le problème de rupture climatique et énergétique (encore et toujours). Je me suis fait ici et ailleurs le défenseur d’une nouvelle vision volontaire d’un nouvel urbanisme, c’est l’occasion rêvée de transformer deux problèmes en solution. Je craints fort d’être déçu. On notera aussi l’intéressant “assouplissement des règles d’urbanisme”. Là, j’ai quelques doutes sur l’honnêteté du résultat.
Autre annonce, très dans le vent, une allocation aux “bénéficiaires” (les veinards !) du RSA. Oui à court terme, non à moyen et long terme. Les sociaux-démocrates cherchent à privilégier d’autres voies que la redistribution palliative. Alors oui toute somme versée en plus à ceux qui en ont besoin est une injection nécessaire de morphine, mais non, cela ne peut pas être la solution. Mettons en œuvre les garanties minimales pour qu’ils accèdent, sans condition, à un espace privée minimal de vie, à un niveau mimimal d’énergie (électricité), à un niveau minimal de transport en plus des niveaux minimaux de soins, d’éducation et d’assitance “humaine”. La dignité leur sera rendue d’abord en leur donnant la possibilité d’exister au jour le jour sans avoir l’impression de mendier le dose quotidienne d’aide sous perfusion. Le chantier est énorme, bien au-delà des capacités de ce gouvernement.

Enfin, dernier élément que je relèverai pour ce post, la prime à la casse. On en connaît l’effet limité, mais encore une fois, je craints fort que cet argent ne serve pas efficacessement à basculer vers un nouveau modèle énergétique pour les transports. D’ici quelques mois apparaîtront normalement la première grande évolution des moteurs et la France n’est pas trop mal placée dans ce domaine, mieux que les allemands et infiniment mieux que les américains. Ici, la fin du vieux modèle de l’industrie automobile et quasi consommé et il est finalement peu probable que les géants américains soient tous encore des acteurs majeurs de l’industrie dans quelques années. Il ne faudrait pas que cette prime amortisse le déclin d’un modèle périmé, mais au contraire qu’elle facilité le passage à un nouveau modèle. Sera-ce le cas ? Je l’espère, mais je craints qu’une fois encore la vision de ce gouvernement ne soit trop myope. J’espère que les citoyens seront plus sages et responsables.

Tant qu’on perd ils jouent !

Dans la litanie des mauvais résultats économiques, les chiffres du chômage de ce mois marquent le passage d’un seuil tristement symbolique : la France compte à nouveau plus de 2 millions de chômeurs.

Naturellement, inénarrable Christine Lagarde s’est fendue de quelques déclarations de nature à nous rassurer : après avoir affiché pendant un an et demi une sérénité digne de bouddha, elle fait aujourd’hui dans le “c’est inévitable”. Inévitable avec ce gouvernement, c’est incontestable, mais rêvons un peu, et imaginons deux minutes que nous ayons un vrai gouvernement avec des gens un minimum raisonnables et compétents.

D’abord, il est facile de tout mettre sur le dos de “la crise”. Crise il y a certes, mais d’une part rien n’a été fait pour contrer par avance les effets de cette crise, et d’autre part les mesures qui ont été prises en matière d’emploi allaient en fait à contre-courant de ce qu’il était souhaitable de faire.

Tout vient d’une double erreur de ce gouvernement, Sarkozy en tête. D’abord l’erreur de croire que la démographie allait résoudre toute seul le problème. Il est vrai que cette démographie est historiquement favorable mais ce n’est pas en appliquant la décidément stupide théorie libérale du “laissons-faire le marché” que l’on résout les problèmes. Ayant cru que cela allait aller mieux tout seul, ce gouvernement s’est dans un premier temps dispensé d’accélérer la diminution du chômage par des mesures volontaires. Pourtant, les années Jospins avaient largement démontré combien une politique énergique de lutte pouvait être bénéfique.

Deuxième erreur concomitante, idéologique cette fois. La droite n’a jamais compris la force des 35h est n’a eu de cesse de les tuer. C’est bien le sens des mesures prises sur les heures supplémentaires défiscalisées et sur l’allongement de la durée de cotisation pour la retraite. La première mesure est purement dogmatique, la seconde aurait eu un sens si le taux de chômage avait été ramené au niveau du quasi plein emploi. Mais ces mesures ont été prises à contre-courant de l’évolution économique et n’ont non seulement pas eu d’effet positifs, mais ont accéléré le retournement de tendance, réussissant même à annuler les effets positifs de la démographie. Comment ?

En période difficile, les entreprises ont bien sûr besoins de moins d’heures de travail. L’ajustement peut se faire de différentes façons : vacances “forcées”, chômage technique, renvoi des intérimaires, renvoi de salariés permanents. Le choix du dirigeant se fait à la fois sur sa conscience (il s’agit de personnes), sur les facilités légales et le temps de réaction en cas de reprise. Or l’aubaine des heures supplémentaires permet une très grand flexibilité : il peut parfaitement se “débarrasser” d’un peu plus de personnel qu’il ne faudrait car en cas de reprise, il peut facilement compenser par le recours aux heures supplémentaires ; il est plus facile de ne pas employer d’interimaires lorsque l’on sait que sa propre main d’oeuvre sera prête à réagir si besoin est. Cela a donc un effet accélérateur et amplificateur de tendance pour ce qui est de la hausse du chômage et a contrario retarde la baisse.

La situation est encore aggravée par l’allongement de la durée de cotisation aux caisses de retraite. D’un côté, cet allongement est nécessaire pour des raisons de financement (à moins de trouver un autre moyen), mais dans le cas présent, non seulement cela ne va pas permettre de boucher les trous (les vieux cotisants ayant toutes les chances d’être aussi de vieux chômeurs, les rentrées seront faibles), mais cela accélère le déséquilibre du chômage. Parce que cette mesure est prise à contre-cycle, elle va échouer sur son but premier et amplifier le problème du chômage. Tout faux !

Depuis son arrivée, ce gouvernement a accumulé les choix à contre-emploi (paquet fiscal, chômage, pouvoir d’achat, retraite), c’est presque devenu sa marque de fabrique. Alors certes la crise est arrivée en plus, mais lorsque l’on accumule l’incompétence et la poisse, on entraine forcément le pays dans le gouffre.