Clara et la naissance du nouveau millénaire

Naitre est souvent une joie, tout le temps une aventure, parfois une révolution.

Comme je l’ai maintes fois défendu ici, le projet d’enfant, en plus de l’aventure humaine, est un des points fondamentaux qui justifie que la République légifère sur la famille, la protège, l’aide. Et grâce à CLARA, la République vient de faire une avancée majeure en matière juridique.

CLARA n’est pas une petite fille, mais une association qui a pour origine le désir de Sylvie et de Dominique d’avoir un enfant et de l’impossibilité de Sylvie de porter cet enfant. Dans leur cas, la solution était d’avoir recours à une mère porteuse (la GPA ou Gestation Pour Autrui), ce qui est illégal en France mais parfaitement légal et encadré dans d’autres pays. Après plusieurs tentatives, une mère de famille californienne accoucha des jumelles de Sylvie et Dominique le 25 octobre 2000. Les enfants furent reconnus par l’état de Californie.

Et c’est à ce moment que la loi française se retrouve en déphasage avec la réalité : la République ayant interdit la GPA se retrouva face à une réalité, un couple et ses jumelles, et une impossibilité légale : reconnaitre l’existence des enfants. Il s’en suivit une longue procédure judiciaire, des tracasseries de toutes ordres, dont certaines se sont terminées au poste de police.
Après 6 années de combat, par jurisprudence, la loi française reconnait de facto l’existence légale des deux jumelles et la GPA. Ceci constitue probablement la plus grande avancée juridique en matière de droit des familles depuis la reconnaissance de l’avortement et la loi Veil en 1975, à ceci prêt que la loi Veil soulageait ce qui reste une tragédie personnelle, alors que la décision reconnaissant la GPA légitime ce qui est une joie et un évènement structurant du couple.

Il existe bien des définitions personnelles du mariage (le patronyme, le patrimoine, le sacrement religieux, les gènes, l’amour, l’enfant, a contrario – l’union libre contre l’idée du mariage -, le plaisir, l’intellect, …).

Par contre, l’Etat se doit d’avoir une définition cohérente et un but précis en matière de mariage, ou d’union des êtres. L’Etat a intérêt à s’intéresser à cet aspect très privé, parce qu’il structure la société, il permet de fixer les citoyens sur un projet stable et de long terme, il oblige les individus à développer leur dimension sociale, il en fait des êtres plus responsables et altruistes, et surtout, il donne la clé de l’avenir de la société à travers un projet d’enfant, futur citoyen.

La République se doit d’aider tous ceux et celles qui entrent dans ce cadre, et la reconnaissance de la GPA est un pas essentiel qui remet nos lois en phase avec les possibilités technologiques de notre époque, le tout en accord avec le souhait réfléchi des individus. Si cette définition du mariage était adoptée, il permettrait également de dépassionner le débat sur l’évolution du mariage (dont le pacs n’est qu’un avatar) et l’homoparentalité.

Le sens de l’ADN

Les débats actuels sur l’utilisation de test ADN par l’état à des fins de contrôle des familles mériterait mieux qu’une foire d’empoigne sur fond de manipulation plus ou moins démagogique. Effectivement, les technologies développées autour de l’ADN posent de réels problèmes éthiques et juridiques à notre société. Hélas, accoler cette problématique avec celle de l’immigration et finir de troubler le jeu par une dérive orwellienne de l’état est un excellent moyen de noyer la vraie réflexion dans le flots des petites crispations et des grands renoncements aux principes moraux.

ADN inversee

Il y a plus d’un an, j’ai posté ici une série d’articles sur “qu’est-ce qu’un enfant ?”. Au regard de l’actualité, ces réflexions me semblent toujours aussi nécessaires. Les questions clairement posées par l’actualité (et détachées des autres considérations) sont les suivantes :

  • L’ADN définit-il la filiation familiale, et si oui, jusqu’à quel niveau (l’état reconnaît-il les enfants de famille recomposée au même titre que les enfants d’un même lit) ?
  • Une fausse filiation détectée par analyse ADN entraîne-t-elle des conséquences civiles ou pénales ? Pour l’état (c’est le cas évoqué ici) ? Pour le conjoint ou les enfants en quête d’identité (ce sont les cas évoqués dans mon 1er post) ?
  • Qui a le droit d’accéder à l’analyse ADN ? Le père, la fratrie, la famille au-delà du foyer, les héritiers, voire dans certains cas les actionnaires d’une société faisant valoir un droit à l’information sur l’héritier d’une dynastie industrielle, les citoyens exigeant la vérité sur leurs élus, le voisinage soucieux de la moralité du quartier…
  • Est-il possible d’empêcher le recours à un test très facile à faire, peu coûteux, discret, faisable n’importe où sur la planète ?

On le voit, en quelques questions, on passe d’une loi nauséabonde à un casse-tête moral et juridique. Or nous n’échapperons pas à ce casse-tête, ni pas la lâcheté, ni par l’aveuglement. Il est fondamental d’y apporter une réponse rationnelle, morale et politiquement volontaire.

Qu’est-ce qu’un enfant ? Part II : l’enfant, la société et l’Etat

Familles recomposées, monoparentales, homoparentales, allongement de la vie et retard des premières naissances, hausse du niveau de vie, tout bouleverse les repères familiaux et intergénérationnels. Il me semblait qu’il y avait tant à dire sur le sujet. Et, puis, alors que
je réfléchissais à mon post, est arrivée l’épisode de l’expulsion des enfants scolarisés dont les parents sont irrégulièrement en France.
Et moi qui partait de l’idée de l’importance fondamentale de l’enfant pour la société et l’état (espoir, soutien futur et futur citoyen…), je me retrouvais devant une situation où, au nom de l’état, on sacrifiait l’avenir de ces enfants, où on jetait en pertes et profits tous les espoirs qu’ils représentaient.
Cette affaire montre clairement que la primauté n’a pas été mise sur la protection de l’enfance, mais sur le respect de la loi vis à vis de leur parents. Comme démocrate, je veux bien écouter tous les points de vue, mais je dois avouer que celui-ci me choque, et en regardant mes filles, je me demande dans quels cas leur avenir pourrait être sacrifié au nom d’un objectif supérieur.

Bien sûr, cet ordre de priorité n’est pas partagé par tous, mais comment peut-on en arriver là ? Pour la société, l’enfant n’est-il qu’une charge qui se décline en maternités, sécurité sociale, écoles ? Une contrainte économique en somme.
Pourtant, du point de vue de la société, je pense plutôt y voir le ciment d’un couple, la raison de se battre contre les vents contraires, l’espoir d’améliorer la nation en formant un meilleur citoyen.
Dans le cas des enfants expulsés, l’état aurait pu y voir, pour les parents immigrants, une raison se s’intégrer, de se fondre dans la “normalité française”, un moyen et un levier puissant d’intégration, et même, une façon de faire de l’immigration choisie (concept que je goûte peu par ailleurs) : former sur place ceux dont on va inévitablement avoir besoin pour règler le problème de la courbe démographique des actifs.

A vrai dire, je m’interroge sur les priorités de notre société, si jamais elle en a encore. Je ne suis pas un moraliste, mais quand même, au delà de l’agitation médiatique, je n’aime guère une société qui ne cherche pas à protéger des enfants.

Journée de Solidarité avec les Enfants Expulsés

Début juillet, Dominique Strauss-Kahn et le réseau RESF lançaient l’appel suivant :

Cher(e)s ami(e)s,

Nous ne pouvons accepter que des enfants, aujourd’hui scolarisés chez nous, soient dans quelques jours, au petit matin, emportés, transportés, déplacés.

Je sais que beaucoup d’entre vous êtes en vacances, mais cette cause est essentielle. Je compte sur vous pour ces quelques heures de solidarité au cour de l’été.

Depuis plus de 10 jours que cet appel a été lancé, j’ai pu lire dans divers blogs un tas d’âneries et de mesquineries, qui hélas ne diffèrent guère du fond de commerce habituel : immigration massive cachée, hordes de familles polygames avec 15 mômes, racisme ordinaire mais aussi récupération médiatique et autres basses attaques venant hélas aussi de la gauche.

Moi qui ait l’esprit simple, sinon simplet, je n’y vois qu’une chose : des enfants a qui toute société se doit de faire ce qu’il faut pour leur donner un avenir. Alors peu importe que ces vilains petits canards soient majoritairement bronzés ou bridés, peut importe que leurs parents aient passé la frontière sans papier ou sous une bâche, peut importe d’ailleurs qui sont leurs parents.
Cet appel est un appel entre ces gosses et nous, nation orgueilleuse et cultivée qui prétend éclairer le monde. Si nous ne sommes pas capables de recueillir et de donner une éducation à des enfants, quels qu’ils soient, alors nous ne vallons rien parce que c’est la honte que nous verrons dans les yeux de nos propres enfants.

Il y a un peu plus d’un an j’étais un citoyen râleur comme les autres, mais un citoyen qui attendait sa deuxième fille. Et j’ai alors décidé d’essayer de faire un peu plus que de râler comme les autres, parce que je ne voulais pas laisser à mes filles ce pays dans l’état où il est actuellement. Il y a sans doute mille façons de soutenir cette action, en y participant physiquement, en en parlant sur internet ou autour de vous ou de la façon qu’il vous plaira, aujourd’hui, demain certes, mais tous les jours d’après également.

Que chacun fasse ce qu’il peut, comme il le sent, mais faites quelque chose. C’est une histoire entre vous et ces enfants, à vous de voir.

Qu’est-ce qu’un enfant ? Part I : biologie vs société

Comme je l’évoquais dans mon post précédent, regarder en face évoluer notre société permet de réfléchir sur des choses qui nous paraissent évidentes depuis longtemps, mais qui sont en fait loin de l’être, ou qui ne le sont plus.
J’ai déjà donné mon sentiment sur l’enfant comme élément de définition du mariage du point de vue de la société et du risque qu’il y a à conclure trop rapidement sur ce point, mais au delà du mariage, qu’est-ce qu’un enfant pour la société et quels sont ses liens avec ceux qui l’entourent ?

Au temps où les choses étaient simples, il y avait un père et une mère ayant donné naissance à cet enfant, lui assurant sa subsistance, son éducation et lui transmettant équitablement biens matériels et culturels.
On remarquera assez rapidement que cette époque où les choses étaient simples, n’a en fait pas duré très longtemps dans notre histoire (pour peu qu’elle ait vraiment existé) ; soit que les biens n’aient que rarement été transmis équitablement entre les sexes (le patrimoine pour ne pas sortir de la famille allait souvent aux garçons de façon privilégiée) ou au sein de la fratrie (l’aîné était l’héritier pour ne pas diluer le patrimoine), soit que les responsabilités aient été inéquitablement assumées entre les deux géniteurs (le père ou la mère en fonction de l’âge de l’enfant).
Et lorsque l’on s’éloigne un peu de notre époque ou de nos campagnes, les sociétés humaines nous ont gratifiées d’autres originalités comme la prédominance de la descendance des sœurs, la prééminence de l’adoption sur la descendance naturelle, l’acceptation de l’infanticide, …

Au regard du passé et d’un présent changeant, il apparaît souhaitable de faire un peu de tri :
– biologie : la transmission de gènes définit-elle l’enfant pour notre société et ceci peut-il ou doit-il être étendu ?
– sociologie : c’est le point le plus débattu actuellement avec la discussion sur les familles monoparentales, homoparentales, recomposées et maintenant la discussion sur l’arrivée de droits des grand-parents. On touche ici plus particulièrement aux éléments de subsistance, d’éducation et d’héritage mais sur un mode très affectif.
– mystique : même si notre société est devenue très terre à terre et “scientifique”, nous n’avons pas totalement évacué les aspects mystiques et des considérations d’âme ou a minima de “souffle de vie”. Doit-on s’y risquer ou faire l’impasse ?

La société doit-elle reconnaître les liens biologiques ?

La question est loin d’être triviale et une réponse simple qui chercherait à l’évacuer trop rapidement me semble vouée à l’échec, tant du point de vue de l’appréciation individuelle que de la capacité à survivre en cas de désastre.
Dans l’immense majorité des cas, donner la vie est un choix et, même si ne nous en sommes pas pleinement conscient, ce choix et motivé par notre destin biologique qui est de transmettre nos gènes, comme tout être de la biosphère.
Tout homme peut avoir deux certitudes dans sa vie, et l’une d’elle est qu’il est a priori fait pour transmettre la vie. Evidemment, une fois les gènes transmis, on peut se dire que l’enfant a sur ce point une destinée autonome. Ce n’est sans doute pas le cas, car la force qui a conduit
à diffuser ses gènes, conduira également à préserver ceux qui lui sont les plus proches, et en priorité ceux de sa descendance (d’où le certain bon sens ce certaines sociétés africaines qui privilégient la descendance de la soeur plutôt que celle de l’homme qui est alors certain de préserver statistiquement 25% de ses propres gènes, alors que pour les enfants de sa femme, il n’a pas de certitude). La génétique a donc des consèquences sur la socialisation.

Ce lien biologique doit-il alors est transcrit dans la loi ? Je pense que oui, mais ma réponse est ouverte à contestation car elle aurait plusieurs conséquences peu en phase avec notre société :
– cela signifierait qu’un enfant biologique a “plus de poids” qu’un enfant adopté (et donc la prééminence de la biologie sur le choix)
– cela signifierait que l’anonymat de l’accouchement sous X ne peut être préservé, ni qu’un père ne peut être rendu ignorant de sa descendance ou de sa non-descendance (l’adultère redeviendrait légalement répréhensible s’il est entaché de mensonge !)
– cela pourrait signifier qu’une mère porteuse ne peut être exclue de tous droits et devoirs envers l’enfant (même si l’échange génétique est a priori exclus, quel est l’importance biologique des échanges avec l’enfant ?)
– cela pose également le problème de la filiation du clonage ou pourquoi pas, celui d’une contribution génétique multiple (36 personnes donnant un chromosome). Ces derniers cas sont des cas de science fiction, mais la réflexion qui y est liée me semble très instructive et révélatrice (de plus, interdire n’est pas empêcher alors cela viendra un jour).

Quel intérêt la sociétés peut-elle avoir à reconnaître et/ou favoriser le lien biologique ?
Principalement celui de permettre à chacun de connaître sa descendance et son ascendance et donc à contribuer à donner une identité aux citoyens en regard de l’histoire de la société.
Un citoyen qui sait qui il est a de meilleures chances de se définir vis à vis de la société. Sans histoire familiale, un citoyen est un immigré intemporel au milieu des siens.
On ne peut pas ignorer l’importance que prennent la généalogie ou la quête d’identité des enfants abandonnés et passer ce lien en pertes et profit. Savoir qui on est et d’où l’on vient construit l’individu ; l’échange entre géniteurs et enfants doit être légalement préservé de façon particulière.

Enfin, en cas de catastrophe sociale, c’est la pression génétique qui recompose les cellules humaines et même si personne ne souhaite se retrouver dans une situation où la société n’existe plus, il me paraît important de conserver ce point lié à l’instinct de survie (je ne peux m’empêcher de penser au film “le choix de Sophie” en écrivant ces lignes).