La mondialisation ne converge pas vers une société unique

Global_Corp_Control_470x260J’étais cette semaine à Brest pour une conférence donnée par Emmanuel Todd. Le sujet était en substance de voir si le phénomène de mondialisation que nous vivons va conduire à une convergence des sociétés mondiales vers un modèle unique.

Tout d’abord, Emmanuel Todd a rappelé que ce n’était pas la première fois que nous subissions un mouvement de mondialisation. Le début du XXème siècle était déjà dans ce mouvement (avec d’autres mécanismes qu’aujourd’hui). Or ce mouvement n’a non seulement pas abouti à une convergence des modèle, mais au contraire a abouti à une exacerbation des différences qui, mal maîtrisées, ont fini en guerre mondiale.

Todd analyse la nature des sociétés à partir de trois grands marqueurs : la natalité, l’alphabétisation et la structure familiale (dans une moindre mesure, le vieillissement de la population intervient également dans le sens d’un frein ou d’un accélérateur des changements). Or ce qui semble expliquer fondamentalement les choix de société c’est le modèle familial.

Si l’on constate bien une convergence mondiale vers une famille type (duo parental dont le niveau d’éducation est en hausse, fécondité aux alentours de 2 enfants / couple), la nature des relations au sein de cette famille reste profondément différente.

Rien qu’en Europe, on trouve par exemple des types familiaux français et anglais qui sont plutôt proches mais qui diffèrent toutefois sur des relations plus libérales outre-manche et plus égalitaires en France. Ce qui explique selon Todd que les modèles économiques soient plutôt de nature très libérales au Royaume Uni et que nous restions si attachés à l’égalité en France.

Les Allemands eux (comme les Japonais) fonctionnent sur un modèle naturellement inégalitaire où prime le respect de l’ordre établi, parfois même selon un mode très martial. Là aussi, on ne manquera pas de se souvenir de l’attitude actuelle de l’Allemagne dans la crise européenne, attitude dure sans grande considération pour les plus faibles.

Enfin, il reste dans le monde beaucoup de sociétés marquées par des liens familiaux fondés sur le cousinage qui rendent très difficiles l’ouverture vers l’extérieur.

On remarque donc que le fait économique et la marche vers la mondialisation ne sont pas les éléments structurants de nos sociétés.  Ce n’est pas parce que nous échangeons et consommons les mêmes produits que cela nous définit. En ce sens, la mondialisation n’est pas une menace identitaire. Ce pourrait être même le contraire puisque cela rend finalement plus visible le modèle du voisin et nous incite à réaffirmer notre identité… comme cela avait été le cas au début du XXème siècle. Todd semble penser qu’en fait, cette réaffirmation identitaire est un facteur de performance. Il est vrai que l’exemple de l’Allemagne qui justement a récemment fait sa révolution identitaire grâce à l’accident historique de la réunification fait partie des gagnants de la mondialisation tout en affirmant clairement sa différence identitaire.

La mondialisation est un facteur économique important, mais elle ne change pas notre identité. Nous sommes Français (et Bretons et citoyens d’Iroise pour ce qui me concerne) de part notre histoire collective et notre construction familiale. L’affirmation de cette identité n’est pas un archaïsme qui serait économiquement ridicule. Elle est une affirmation nécessaire aux chemins que nous pouvons tracer pour l’avenir, aux actions que l’on peut collectivement mener.

2013-09-17 18.09.15

 

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