Semaine instructive. Le monde médiatique a eu cette semaine deux raisons de s’intéresser à Dominique Strauss-Kahn.
La première est bien sûr le « scoop » dont la mèche a été allumée par le sémillant Brice Hortefeux, scoop sous la forme d’une photo de paparazzi montrant Dominique Strauss-Kahn et Anne Sinclair à côté de la Porsche Panaméra d’un proche du couple. Il semble clair que le but de la manip’ était de jouer sur l’image de la richesse censée rendre incompatible tout engagement de gauche, vieux procès fait naguère à Léon Gambetta, Léon Blum, Pierre Mendès France et tant d’autres. L’UMP a allumé la polémique et a vite reçu le renfort d’une certaine gauche décidément obsédée par l’argent en tant que valeur (même si c’est pour eux une valeur négative, cela ne vaut guère mieux que la conception de l’argent en tant que valeur positive).
Mais chose intéressante, si l’histoire a fait beaucoup de bruit, je ne suis pas sûr qu’elle été si négative pour DSK :
- d’abord parce que les leaders de la gauche ne sont pas tombés dans ce piège déjà mille fois utilisés et certains même telle Ségolène Royal ont appelé leurs militants à ne pas aider l’UMP dans sa tentative de manipulation.
- ensuite parce que l’UMP s’est trompé de symbole. Certes une Porsche cela évoque la richesse, mais la voiture de sport est d’abord dans l’imaginaire collectif des Français un symbole de réussite, un rêve que l’on peut toucher du doigt car même si rares sont les Français ayant les moyens de ce payer ce genre de bolide, c’est un rêve réalisable le temps d’une ballade. Cette image de DSK est d’abord celle de la réussite et ne remet pas en cause son engagement à gauche.
- enfin, l’UMP cherchait également à relativiser le bling bling de Nicolas Sarkozy, mais là aussi, c’est à mon sens raté. Ce qui est reproché à Nicolas Sarkozy c’est son amour ostentatoire de la richesse sur des choses qui ne plaisent pas au Français. Une victoire aux élections cela se fête dans la convivialité d’une bonne bouffe entre amis et militants, pas au Fouquet’s. Les montres hors de prix c’est un truc aussi inutilement has been que clinquant. Le salaire que l’on s’augmente de 140% avec nos impôts est un trait de caractère à la Rastignac, sans grandeur. En comparaison, le vroum vroum de cette image de Dominique Strauss-Kahn est certes peu modeste, mais elle est l’image de la réussite sociale d’un couple. Entre le bling bling et le vroum vroum, il me semble que le coeur des Français penchera vers DSK.
Voilà donc pour la première actualité dont tout le monde ou presque a entendu parler. Mais quelle est donc la seconde me direz-vous ?
La seconde est un article du prix Nobel d’économie, Joseph Stiglitz, qui fut un critique plutôt acerbe des institutions comme le FMI. Et que nous dit ce Nobel cette semaine ? Il nous explique comment DSK a changé le FMI en profondeur. Quelques extraits :
« La crise a démontré que des marchés libres et sans entrave ne sont ni efficients, ni stables. De même, ils ne sont pas nécessairement performants pour fixer les prix (voyez la bulle immobilière), y compris les taux de change (…).
L’Islande a démontré que répondre à la crise en imposant des contrôles de capitaux peut aider les petits pays à limiter son impact. Et la politique non conventionnelle de « quantitative easing » (QEII) de la Réserve Fédérale américaine a inévitablement signifié la mort de l’idéologie des marchés sans entrave : l’argent va là où les marchés pensent que les rendements sont les plus élevés. (…).
L’afflux d’argent dans les marchés émergents provoqué par la politique des Etats-Unis a convaincu les ministres des finances et gouverneurs de banque centrale, y compris ceux qui y sont idéologiquement opposés, de la nécessité d’intervenir. (…).
Le FMI a finalement établi un lien entre inégalité et instabilité
(…)
Pour les progressistes, ces réalités épouvantables font partie de la litanie habituelle de frustration et d’outrage justifié. La nouveauté est que le FMI a rejoint le choeur. Pour reprendre les mots par lesquels Strauss-Kahn a conclu son discours devant la Brookings Institution quelques jours avant la réunion récente du Fonds : « En fin de compte, l’emploi et l’équité sont des éléments de stabilité économique et de prospérité, de stabilité politique et de paix. Cela est au coeur du mandat du FMI. Cela doit être placé au coeur de l’agenda politique. »
Strauss-Kahn se révèle être un leader sagace du FMI (…)«
Ceci me rappelle une autre intervention, celle de Stéphane Hessel au début de l’année dans un entretien à Rue89 :
« Je souhaite qu’aux législatives qui vont suivre l’élection présidentielle de 2012, plusieurs partis de gauche travaillent ensemble : communistes, verts, socialistes, et même des candidats du centre républicain. Mais attention : il ne faut pas qu’ils présentent quatre candidats différents à l’élection présidentielle. Je ne vois que deux candidats possibles en l’état actuel : Martine Aubry et Dominique Strauss-Kahn.
Rue89 : Mais Dominique Strauss-Kahn dirige le FMI, qui fait partie des institutions que vous dénoncez…
DSK a pris le FMI à un moment où il fallait le dénoncer, mais il est en train de le transformer assez utilement. On ne sait pas encore bien tout ce que DSK a fait. Par exemple, le FMI ne fait plus d’ajustements structurels, c’est un progrès.
Personnellement, je préfèrerais Martine Aubry : je la considère comme plus énergiquement de gauche ; mais je sais, pour le connaître, que Strauss-Kahn est aussi un homme de gauche. S’il devient Président, il réformera l’économie française selon les même lignes que celles qu’il a soutenues du temps de Jospin ou de Rocard.
Il y a eu en France une gauche qui a fait des choses, je pense au RMI, à la couverture médicale universelle… Et elle peut en faire demain davantage.«
Voilà deux actualités de la semaine. Il me semble que l’ordre d’importance n’est pas en phase avec l’intérêt réel et que cela méritait un article pour remettre les choses en perspective.
L’histoire de la Porsche vue par LSD : http://www.lsd2012.fr/2011/05/a-propos-de-la-porsche/
Pour mémoire, un autre article de Stilglitz en septembre 2010 : http://www.radiobfm.com/edito/info/81109/joseph-stiglitz-dans-une-recession-mondiale-telle-que-celle-d-aujourd-hui-lausterite-ne-peut-pas-marcher/
Une analyse par slate.fr : http://www.slate.fr/story/37901/porsche-dsk-grande-repetition-2012
Déesse A… répond à Wauquiez !
La journaliste :
Déesse A… mieux vaut tard que jamais… Le 10 mai n’est pas un jour comme un autre
A :
Oui…mais si vous voyez ce que je veux dire… aucun jour ne l’est… si chacun fait ce qui lui plaît !
La journaliste :
Et vous, dans la peau de la primadonna, vous vous y voyez déjà ?
A :
Ça dépend de quel opéra, si c’est du Mozart ou du Salieri que l’on s’apprête à jouer…
le modèle la copie ou la copie de la copie… tout dépend de la partition, en politique comme en musique.
La journaliste :
Et votre Don Juan, qu’est-ce qu’il devient ?
http://www.lejournaldepersonne.com/2011/05/deesse-a/
Pour 2012, je vote pour que notre président arrive à l’Élysée la dedans : http://www.leblogauto.com/2010/09/exagon-devoile-sa-gt-electrique.html
🙂
Le site dskvraifaux.fr vient de publier des éléments qui permettent de détricoter la manipulation créée sur internet autour de la fameuse photo de la Porsche.
On y apprend (de façon vérifiable) comment des proches de l’UMP ont propagé ce bobard (DSK roule en Porsche), comment des activistes comme Emery Doligé ou encore Arnaud Dassier ont servi d’amplificateur de bobard avant d’être relayé par Brice Hortefeux.
Chacun peut penser ce qu’il veut de tel ou tel homme politique, mais je ne vois pas très bien ce que l’on peut penser de positif de telles pratiques. Quelle sera l’étape suivante dans l’infamie ?
Depuis des années je combats la rumeur et la calomnie sur internet, cette façon de faire de la politique est profondément répugnante, honte à ceux qui s’y adonnent.