Les faucheurs de marguerites

OLYMPUS DIGITAL CAMERALe projet de l’aéroport de Notre Dame des Landes oscille toujours entre l’euthanasie et la résurrection. Avec la chaîne humaine de vendredi dernier, l’euthanasie a un peu repris le dessus mais comme son premier défenseur est le premier ministre, il semble clair que le point marqué cette semaine n’est que temporaire.

Mais au-delà des actions plus ou moins spectaculaires, que révèle ce conflit ?

P2779373D2180231G_px_512_D’abord qu’en matière d’aménagement du territoire, les choix ne sont pas fondés que sur la rationalité. Si Nantes a effectivement un problème de développement aéroportuaire, la création d’une infrastructure de cette ampleur a nécessairement des implications régionales. Et en terme d’aménagement régional justement, de priorité de développement, ce projet ne prend guère en compte la présence de l’aéroport de Rennes (sinon sous forme de rivalité en terme de leadership) ou l’isolement péninsulaire de Quimper & Brest. Au moins, si le projet de Notre Dame des Landes devait être abandonné, pourrait-on formuler le souhait que les 550 millions d’euro de budget soit réaffectés à la construction des lignes TGV Brest-Morlaix & Quimper-Lorient.

Mais plus profondément, il me semble que ce mouvement de contestation  porte en lui une dimension conservatrice dans un monde qui change vite, très vite, sans doute trop vite. Après tout, pourquoi dans une période économiquement catastrophique une partie non négligeable de la population se mobilise-t-elle ou a minima trouve-t-elle sympathique ce mouvement contre la construction d’un aéroport au milieu de nulle part ? La construction générerait forcément de l’activité économique & de l’emploi, son exploitation ultérieure également. Rationnellement (à nouveau), les champs et les marais de la campagne nantaise devraient peser peut de choses dans une telle situation. Or on voit se rejouer la lutte du Larzac près de 40 ans plus tard et peut-être comme à l’époque, sans en comprendre la nature émotionnelle profonde.

Nous ne sommes pas au début du XXème siècle dans un monde dirigé par une bourgeoisie qui pense que demain sera à l’identique d’aujourd’hui. Nous ne sommes pas dans un monde de progrès lent, régulier et maîtrisé. Nous ne sommes pas dans un monde où chacun identifie sa place avec clarté.

Et ceci ne se limite au seul symptôme de l’aéroport nantais. Pourquoi le mariage pour tous, qui après tout est une réforme qui n’a aucun impact pour tous ceux qui se déclarent contre, a-t-il tellement agité les foules ? Parce que lui aussi détruisait une certitude culturelle tenue pour vérité immuable : un mariage c’est un homme et une femme. Et bien non.

bebeEt que se passera-t-il lorsque les gens comprendront que du point de vue médical et biologique, un enfant n’est plus le fruit d’un seul homme et d’une seul femme justement, mais en l’état des connaissances actuelles, potentiellement d’un homme et de deux femmes (trois lorsque la greffe d’utérus aura complètement réussi). Nous ne savons plus dire clairement ce que donner la vie signifie. Et il existe tant d’autres changements radicaux en marchent !

Nos certitudes culturelles, philosophiques, identitaires sont battues en brèche par cette époque. Mon propos n’est pas ici de dire si c’est bien ou pas, s’il faut y aller ou le refuser. Non, mon propos et plutôt d’essayer d’aider chacune et chacun à mettre un nom sur ces peurs du changement, d’inciter à la réflexion, et politiquement permettre de tracer sereinement un chemin éclairé vers un avenir construit en commun.

Presque un an

Francois-HollandeIl y a un an, nous étions dans l’entre deux tours de l’élection présidentielle. Beaucoup de choses ont été faites en un an. Cette semaine a d’ailleurs vu l’aboutissement d’une des grandes réformes sociétales avec le mariage pour tous, et pourtant mon sentiment est que l’essentiel n’a pas encore été atteint.

Les dégâts cumulés de 10 ans de gouvernement de droite et de presque quatre ans de crise financière puis économique n’ont pas été réparés. À peine la dégradation a-t-elle été endiguée. Dans de telles conditions, il n’est pas étonnant que les Français ne se satisfassent pas de l’action gouvernementale.

Que faire alors pour les mois à venir ? Au-delà des incantions plus ou moins intéressées, il semble clair qu’un nouveau train de mesures s’impose, à la fois pour redonner un peu de souffle à des Français dont certains sont à la limite de l’apoplexie mais aussi pour adapter notre pays, enfin, aux bouleversements extraordinairement profonds qui nous touchent. Si nos politiques ont un peu de mal à en comprendre la nature, les difficultés fiscales pourraient bien les amener à sortir des modèles de sciences-po et de l’ENA pour ouvrir les yeux sur le nouveau monde qui se construit sous nos yeux.

Comme je le disais il y a quelques temps, dans une économie de la connaissance, il est inefficace de taxer des biens matériels dont la valeur monétaire chute. Dans une économie dématérialisée, il est inefficace de taxer les flux matériels. Dans une économie basée sur des mécanismes de gratuité, il est inefficace de taxer la valeur ajoutée. Dans une économie où l’on rompt avec le modèle énergétique, il est inefficace à terme de taxer le modèle que l’on abandonne. Dans une économie où l’homme cherche à maîtriser son empreinte sur les écosystèmes il est inefficace de taxer des éléments qui ne prennent pas en compte cette empreinte (si le carbone est un élément de cette empreinte, alors le carbone doit être un coût pour ceux qui le gaspillent et un revenu pour ceux qui en font le meilleur usage). Dans une économie où l’individu acquiert des capacités jusque-là réservées aux producteurs de la vieille économie, il est inefficace de continuer à baser la majorité de ses revenus fiscaux sur un modèle qui s’étiole.

Société et économie de la connaissance, société et économie numérique, société et économie en équilibre avec les écosystèmes, société et économie post-pétrole, société et économie des nouveaux individus et acteurs économiques, rien ne ressemble à ce qu’un gouvernement a pu connaître. Il est temps d’être aussi audacieux en ce domaine que nous l’avons été pour le mariage pour tous.

Courage et tenacité !

marianneJe ressens comme un gros flottement au sein de la classe politique et médiatique française en ce moment, et ceci ne se limite pas au seul parti socialiste en charge de la conduite du bateau.

On s’était presque habitué à l’idée qu’un ex-président de la République puisse être suspecté d’avoir dépassé le cadre de la loi dans l’exercice de ses fonctions, ceci au nom de la zone grise de l’exercice du pouvoir. Si Sartre devait aujourd’hui récrire Les main sales, nulle doute que le fond changerait peu mais que le ressort idéologique serait plus faible, remplacé par une vision un peu vaine du pouvoir.

On s’était presque habitué à l’idée qu’une personnalité politique, ministre ou simple élu moins sous les feux de la rampe, puisse être suspectée d’avoir utilisé sa fonction pour son intérêt très personnel, tissant par la même occasion un réseau de compromissions mutuelles autour d’une bourgeoisie de l’ordinaire corruption, de la richesse d’abord mais surtout des idéaux. Le plus surprenant finalement dans des affaires comme celles de Cahuzac aujourd’hui ou de Woerth hier, n’est pas tant l’idée que ces hommes aient pu choir (ce ne sont que des hommes ! ), mais plutôt qu’ils trouvent presque normal leur comportement et qu’au lieu d’aller se cacher, amplis de honte, au fin fond du monde, ils prétendent à mener la vie qu’ils avaient avant le scandale, comme si de rien n’était.

Ce qui transparait à travers l’affaire Cahuzac, c’est qu’un homme se réclamant des valeurs de gauche est allé chercher un prête-nom du côté du FN (Philippe Peninque) et qu’en conséquence, si le gouvernement PS n’a été que tardivement informé des dessous de l’affaire Cahuzac, le parti d’extrême droite lui l’était dès le début. Quant à la droite, vu qu’elle a disposé pendant 10 ans des moyens d’investigation des services du renseignement intérieur, et surtout qu’elle avait en sa possession le rocambolesque enregistrement à l’origine de l’affaire, on peut avoir un doute légitime sur son niveau d’ignorance sur ce cas. In fine, la question inévitable qui me vient à l’esprit est de savoir si ce n’est pas l’UMP en sous-main qui a « nommé » Cahuzac aux finances après en avoir fait de même à la présidence de la commission des finances, dans le but d’avoir un moyen de contrôle sur les conséquences possibles de potentiels problèmes.

Du coup, dans ce théâtre d’ombres où tout le monde essaie de contrôler tout le monde, on s’était presque habitué à l’idée que le fameux 4ème pouvoir ne fasse des révélations que tout le monde connait déjà et limite son indignation aux indignes déjà condamnés par la vindicte populaire. Médiapart a pu nous en faire douter mais Le Monde cette semaine semble nous avoir « rassuré » avec Offshore Leaks. Ce scandale ayant été révélé au niveau mondial, il était difficile de n’en pas parler. Mais ce qui s’est passé cette semaine est particulièrement édifiant. Alors que les médias suisses, luxembourgeois et surtout belges s’emparaient assez largement de l’affaire, Le Monde s’est contenté de nous livrer le nom d’un proche de la présidence (dont le cas ne semble pas d’ailleurs être frauduleux), d’un mort qui sent bon la finance (Rothschild)  et du patron d’une PME de mode (on se demande bien pour le coup ce qu’il a dû faire pour déplaire…). Pour le reste, on attend toujours et on espère…

Mais le plus grave dans cet autisme moral ambiant, c’est qu’alors que l’État demandait au Monde de fournir des informations, ce dernier s’est drapé dans sa dignité pour refuser au nom de la protection des sources. Sans blague ! Il me semble que dans cet énorme masse de documents, un certain nombre pouvaient sans problème être communiqués sans compromettre les sources. Il me semble aussi que dans une situation où la dette accumulée devient insoutenable et que le montant de la fraude fiscale annuelle est de l’ordre de la moitié du déficit public, la question de sauvegarder (voire de restaurer !) la souveraineté de la République face aux marchés, la question de redonner un sens moral au comportement de chacun face à l’argent, devraient peser un peu plus dans la balance. Or dans l’histoire, j’ai beaucoup de mal à croire à la protection des sources et je suis par contre très tenté de croire à la protection des cibles de ce scandale. J’espère me tromper, les jours à venir nous le diront.

La capacité à supporter l’insupportable a des limites et avec la misère générée par la crise actuelle, ces limites sont atteintes. Ceci est d’autant plus vrai que cette crise a été directement déclenchée par des comportements liés à la cupidité et à une corruption de l’intégrité morale en matière d’argent. Il faut en sortir.

Si les médias historiques ne sont pas en mesure de remplir leur mission de contre-pouvoir, alors les citoyens doivent prendre le relais. La numérisation du monde le permet et l’exemple de wikileaks nous a montré qu’en matière d’information, même les chasses-gardées comme la diplomatie pouvaient faire l’objet de puissantes remise en questions. On peut discuter du bien-fondé de la chose, mais dans le cas qui nous occupe nous sommes arrivé à un tel niveau de dysfonctionnement que l’objection de principe devient secondaire.

Quant à la classe politique, il est illusoire de croire qu’elle s’auto-réformera car aucun système clos n’est en mesure de le faire. Ne militant  pas pour une révolution toujours hasardeuse et douloureuse, je pense qu’un large renouvellement et des réformes structurelles fortes sont des solutions raisonnables et pertinentes. Les pistes sont déjà nombreuses : non cumul des mandats, parité, interdiction effective des conflits d’intérêts, transparence du patrimoine, examen des parcours professionnels, pluralité des profils du personnel politique, retrait provisoire en cas de mise en examen et définitif en cas de condamnation pour délit volontaire ou crime, limitation dans le temps de l’exercice d’un même pouvoir, …

Le gouvernement Ayrault a commencé à travailler sur le sujet. C’est bien mais nous devons le pousser à aller beaucoup plus loin et plus vite. En matière morale, le changement c’est maintenant pour les intentions, mais cela doit être surtout opérationnel dès les prochaines élections en 2014.

L’éclat vacillant de la probité

Quelques jours ont coulé sur l’affaire Cahuzac et l’offshore leaks ce qui permet de passer de la légitime émotion à la nécessaire réflexion.

Sur Cahuzac, tout n’a pas été nécessairement dit ou découvert mais l’essentiel est connu : un homme non intègre a été nommé à une fonction qu’il a sali en même temps qu’il se déshonorait en méprisant de plus tous ceux qui subissent aujourd’hui une effroyable crise économique. Il reste tout de même à savoir comment nous avons pu nous faire « refiler » un homme avec ce profil et si certains architectes de la fraude fiscale n’y ont pas contribué.

L’offshore leaks est encore trop flou pour en tirer des conclusions. Je me méfie pour ma part du côté un peu trop orchestré voire teasing des révélations. Commencer les révélations en mettant en avant un proche de la présidence pour s’apercevoir ensuite que les choses ne semblent pas illégales en ce qui le concerne tient plus des procédures accrocheuses que de la méthodologie journalistique rigoureuse. Distiller ensuite, jour après jour des noms de sociétés ou de personnes tient plus du feuilleton que du journalisme. On attend des faits mis en perspectives par des analyses, pas des effets de manche. On attends aussi des informations sur les sources. Et on se pose également légitimement quelques questions :

  • pourquoi quelques établissements des îles Caïmans et pas ailleurs ?
  • quelle part relève de la fraude fiscale, quelle part relève du blanchiment mafieux ?
  • si le magot représente 1250 milliards d’euro sur ce seul scandale, à combien peut-on estimer l’ensemble de la fraude fiscale mondiale ? 600 Md€ en France semble un montant un peu faible si 50Md€ sont identifiés aux seules îles Caïmans. Puisque les Français qui paient honnêtement leurs impôts sont au maximum des efforts qu’ils peuvent consentir, je pense qu’il y a là plus qu’une piste de solution à nos problèmes financiers.

Je vois aussi dans l’offshore leaks un autre élément radicalement nouveau lié à la numérisation du monde. D’abord, sans un travail initial de numérisation (fait par qui ?) il n’aurait probablement pas été possible de transmettre une information qui, si elle avait été envoyée sur un support papier, aurait nécessité plusieurs camion(s). Ensuite, un autre point remarquable est la révélation mondiale du scandale, là aussi rendue possible par l’hyper-connectivité numérique. Dans ce nouveau monde qui se construit, il est beaucoup plus facile de capter l’information privée voire secrète et de la diffuser à une échelle maximale avec des moyens même réduits. Les sphères privées, professionnelles ou personnelles, se réduisent à très grande vitesse sans qu’il soit réellement possible de le contrôler. Ceux qui n’ont rien à se reprocher ne pourront que le regretter pour leur pudeur, mais ceux qui sont sortis des clous doivent maintenant savoir qu’ils ont du souci à se faire. Il ne reste plus dans leur cas qu’à passer des révélations aux condamnations.

PericlesReste enfin à réfléchir sur ce que le Parti Socialiste doit faire dans cette affaire. S’indigner, oui évidemment. Mais aussi aller au bout de l’indignation en agissant, et partout où c’est possible, en devançant l’évolution de la loi. Je pense en particulier aux procédures qui plus que jamais doivent permettre aux citoyens de contrôler que les candidats qui se présentent devant eux sont effectivement intègres, sont ceux qu’ils prétendent être. Nous n’attendons pas des saints pour diriger nos villes, pour participer aux assemblées locales ou nationales, mais si quelqu’un se présente en prétendant être ce qu’il n’est pas, alors cela doit pouvoir être connu.

J’appelle mon parti à s’engager sur cette démarche sans attendre qu’une loi soit votée. Et je les mets en garde sur la tentation d’essayer d’y échapper : le monde qui se construit ne laissera à terme aucun autre choix que celui de l’exposition publique totale des acteurs politiques. Vouloir y échapper revient à se condamner à court ou moyen terme. J’appelle également mon parti à prolonger le travail de rencontre avec les Français (les ateliers du changement) avec une thématique sur les outils pratiques à mettre en œuvre pour contrôler la probité des acteurs politiques. Nous n’avons pas seulement besoin de leur vote une fois de temps en temps, nous avons besoin de leur soutien et surtout sur les changements à apporter, de leur aide. C’est parce qu’ils reconstruirons avec nous de nouveaux outils et une nouvelle façon de faire de la politique, que la politique retrouvera l’éclat qui éclaire et construit l’avenir.

 

Appel à projets dans la troisième circonscription du Finistère

bleunvenLa 3ème circonscription du Finistère se caractérise par des enjeux urbains, ruraux, et littoraux.

Les collectivités territoriales et les associations ont un rôle déterminant dans les domaines de la cohésion sociale, la protection de l’environnement, la culture, et le soutien à l’épanouissement de la jeunesse sur le territoire, thèmes qui ont été identifiés comme prioritaires par le comité d’attribution de la réserve parlementaire au titre de l’année 2013.

C’est dans ce cadre que Jean Luc BLEUNVEN, député, lance un appel à projets en direction des collectivités et des associations de la circonscription ayant des projets en lien avec ces thématiques.

6 projets associatifs et 3 projets émanant de collectivités territoriales seront ainsi subventionnés pour l’année 2013, au titre de la réserve parlementaire que Jean Luc BLEUNVEN peut mobiliser pour le territoire.

Les dossiers sont à déposer, pour le 31 mars 2013 au plus tard à la permanence de Jean Luc BLEUNVEN, député, 36 rue des trois Frères Le Roy – 29860 PLABENNEC

 

Plus d’informations disponibles sur le site :

http://www.jeanlucbleunven.fr/attribution-de-la-reserve-parlementaire-2013/

Comment s’accorder sur la façon d’être d’accord (ou pas)

emploiL’accord sur la compétitivité emploi signé en janvier dernier arrive au parlement, ce qui génère des remous à gauche. L’objet de ce post n’est pas d’en discuter sur le fond, cela me semble un peu technique pour m’y aventurer dans un post internet, mais de prendre un peu de recul par rapport à ce que les réactions autour de cet accord révèlent.

Tout d’abord, il s’agit d’un compromis, ce qui signifie que les différentes parties concèdent des choses pour en obtenir d’autres. En soit c’est inhabituel dans un pays où la façon normale de « discuter » est de montrer ses muscles et ensuite de ne pas hésiter à s’en servir. C’est aussi en franche rupture par rapport aux dernières années où l’UMP considérait le dialogue social comme un show dont la conclusion était écrite par avance par le gouvernement. La vraie négociation et le compromis me semblent une bonne façon de faire, le chemin raisonnable entre le diktat et la révolution.

Le compromis est-il bon ? Équilibré ? Ceux qui le contestent ne le pensent pas mais les arguments qu’ils avancent sont au minimum excessifs (fin du CDI, machine à fabriquer du chômage, précarisation accrue des femmes, ..). Or ce qui est excessif a une furieuse tendance à être vain et à ôter toute crédibilité à une cause même lorsqu’elle pourrait être juste.

Le compromis est-il légitime ? C’est un point d’argumentation que j’ai entendu dernièrement : les signataires du compromis ne seraient pas représentatifs d’une majorité de salariés. La légitimité syndicale est un terrain glissant que mes camarades feraient bien de pratiquer avec prudence. Nous savons parfaitement que les organismes paritaires ont beaucoup de mal à trouver un mécanisme qui permet d’avoir des représentants effectivement représentatifs du monde du travail. Ceci vaut d’ailleurs aussi bien pour les salariés, les indépendants et les dirigeants. Bonnes ou mauvaises, les règles sont ce qu’elles sont, on peut discuter pour en changer, mais en attendant on les applique.

Un compromis entre organisations sociales & patronales peut-il avoir force de loi ? En effet, la question se pose car on demande aux parlementaires d’accepter l’accord en l’état et de ne pas le modifier. Voilà une vraie question de fond, une vraie réflexion à avoir sur le fonctionnement de notre République. Dans les discussions en cours sur l’acte III de la décentralisation, on se pose la question du rééquilibrage des pouvoirs, de la manière de prendre une décision au bon niveau de compétence et de connaissance. Mais n’est-ce pas ce qui est tenté ici ? Les députés ont-ils une compétence et une connaissance supérieure du monde du travail à celles des organisations syndicales & patronales ? Y-a-t-il un sens à demander à ces organisations de se mettre d’accord sur des textes si ces textes sont détricotés ensuite ? A contrario, la force du suffrage universelle qui soutient l’action des députés n’est-elle contrariée si les députés ne servent que de chambre d’enregistrement ? Il me semble qu’il manque un principe clair de fonctionnement dans cette histoire : le parlement doit fixer le cadre de la loi, et dans ce cadre, les acteurs sociaux doivent avoir la place pour trouver des compromis. Peut-être est-ce le cas, mais l’image renvoyée par les échanges autour de l’accord compétitivité emploi n’est pas la bonne.

La crise actuelle est la conséquence d’un dysfonctionnement profond de la finance, une perte de repères et de contrôle. Mais si la crise dure, c’est parce nous ne sommes pas structurellement prêts à rebondir, à relancer la machine, à recréer des emplois. Une évolution est nécessaire et elle ne peut pas être cosmétique. Cet accord a été établi pour aller dans ce sens. Je défends le chemin du compromis, de la négociation apaisée. Pour cela il faut changer à la fois les mœurs, les usages et peut-être améliorer le cadre législatif pour que chacun ait un cadre clair d’action. Même si tout n’est pas parfait actuellement, loin de là, le gouvernement Ayrault engage des moyens qui rompent avec le passé, qui ouvrent la discussion, qui donnent un autre horizon que « on n’y peut rien ». Ce sera long et difficile, mais en attendant je ne vois aucune raison de croire que cela échouera et qu’il faut faire chauffer les chaudrons de la révolution. La gauche doit savoir être vigilante, comme avec le mariage pour tous hier, ou encore avec le non-cumul des mandats aujourd’hui, mais elle doit aussi mettre toute son énergie pour faire avancer le pédalo…

La République 2.0 et l’acte III de la décentralisation

Marylise-LebranchuLa réforme sur la décentralisation portée par Marylise Lebranchu continue à avancer à petits pas, mais à avancer. L’idée générale (qu’on me pardonne le raccourci trop synthétique) et de rééquilibrer les pouvoirs et compétences entre les différentes collectivités et institutions de la République, conseils régionaux, conseils généraux (désormais appelé conseils départementaux),  EPCI, communes, communautés de communes, métropoles, …

Il me semble que sur le fond, c’est une excellente chose et que cette orientation est en phase avec les attentes de l’époque et des évolutions de la société. Je ne suis pour ma part ni jacobin ni indépendantiste et je suis convaincu que la République se porte bien lorsque ses citoyens ont le sentiments que les décisions et leur application sont faites au bon niveau de connaissance et d’écoute de leur vie. Il faut trouver le meilleur équilibre entre la vision et les grandes orientations politiques sans lesquelles rien n’est possible et la vie quotidienne de chacun sans quoi rien n’a de sens.

Je dois pourtant confesser un certain malaise avec les discussions en court. Le fond des travaux n’est pas en cause mais ces travaux prennent à mon sens beaucoup trop la forme d’une discussion, d’un échange, d’une négociation entre élus, ou plus exactement entre techniciens de l’action publique. Si cela devait effectivement être le cas, je craints fort que non seulement les citoyens ne nous donneront pas un satisfecit pour cette réforme pourtant majeure, mais qu’en plus ils nous reprocheront d’avoir élargi le fossé entre l’élu et le citoyen.

La réponse qui est généralement donnée lorsqu’on dit que le citoyen n’est pas suffisamment impliqué dans l’action politique, est que ce citoyen ne prend que rarement ses responsabilités lorsqu’on lui demande de se manifester. Il est  exact que très peu d’entre nous ont, ne serait-ce qu’une fois, assisté à un conseil municipal par exemple et que nous ne nous précipitons pas aux réunions d’information sur l’action publique. A contrario, les primaires socialistes ou encore plus récemment les ateliers du changements PS ont montré l’appétence et l’intérêt des gens pour la politique.

Ce paradoxe me semble pouvoir être expliqué de la façon suivante : les Français s’intéressent à la politique, ils veulent tisser un lien fort avec leurs élus, ils veulent pouvoir exprimer leurs attentes, leurs espoirs ou leur déception, mais ils ne se sentent pas, avec raison, compétents pour prendre et assumer des décisions dont beaucoup d’éléments leur échappent. Alors à quoi bon ? Et c’est pourquoi les expériences de démocratie participative ont généralement des succès d’estime mais ne débouchent pas sur des actions de fond. Mais cela ne veut pas dire que les citoyens sont hors jeux ! Ce qui marche très bien, c’est lorsque ces personnes ont l’occasion d’agir, de s’impliquer. Faites une réunion locale sur la prise en charge de la misère et vous n’aurez sans doute pas un grand succès. Pourtant, si vous cherchez des gens impliqués dans des associations comme les restos du cœur, vous n’aurez pas de mal à en trouver (surtout en Finistère). Si la démocratie participative est une idée qui fonctionne mal, la démocratie coopérative est elle une réalité de tous les jours !

Et c’est sur cette démocratie coopérative que nous pouvons avoir l’espoir de réconcilier la réforme de l’acte III de la décentralisation avec les citoyens. Ouvrons dans la loi la possibilité d’expérimenter la délégation d’un certain nombre réflexions et de mise en œuvre de l’action publique. Que les élus fassent leur travail de contrôle, accompagnent la réflexion, mais qu’ils donnent la possibilité aux associations de citoyens de s’impliquer dans la mise en œuvre. Pour réaliser cette jonction entre les élus et les citoyens, il ne manque qu’un instrument puissant de coordination. Or un tel instrument existe : aujourd’hui, on sait mettre en œuvre des plateformes numériques qui permettent de co-construire des choses et de les mettre en œuvre en commun. Dans le domaine privé, des sociétés comme Local Motors (États-Unis) ou encore My Major Company (France) ont révolutionné les modèles économiques en impliquant le consommateur dans la conception & la vente de produits. L’acte III de la décentralisation doit permettre de changer le modèle politique en impliquant le citoyen dans la discussion et la mise en œuvre de l’action publique.

Il faut ouvrir ce champ expérimental, ce sera le premier pas vers la République 2.0, une République où la démocratie ne s’exprime pas qu’une ou deux fois par ans, où le citoyen n’est pas que le spectateur de notre destin collectif. L’action publique doit pouvoir être assumée par tout citoyen qui le souhaite, dans le cadre normal de l’action politique locale. Osons !

Communiqué commun de tous les députés et sénateurs PS du Finistère

« Cette nuit, le domicile privé de Chantal Guittet députée du Finistère a été dégradé par des vandales. Nous ne connaissons malheureusement pour le moment ni leur identité, ni les motivations qu’ils pensaient servir en agissant ainsi. Dans tous les cas, de tels comportements par leur lâcheté et par leur brutalité sont nuisibles et inqualifiables. Par essence, les élus sont à l’écoute des préoccupations de leurs électeurs et attentifs aux crises que traversent les divers secteurs de notre département. Avec leurs moyens et toute leur énergie, ils agissent au quotidien pour que des réponses durables soient apportées. S’en prendre ainsi à leur intimité ne peut appeler qu’une condamnation totale ».

Patricia Adam, Jean-Luc Bleunven, Maryvonne Blondin, Gwenegan Bui, Richard Ferrand, Jean-Luc Fichet, Gilbert Le Bris, Annick Le Loch, François Marc, Jean-Jacques Urvoas

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Perte du sens et de la responsabilité. La colère d’un individu est compréhensible, les égarement d’un groupe toujours inacceptables.

Je tiens à exprimer ici mon soutien et ma sympathie à nos élus en général et à Chantal Guittet en particulier.

Je suis contre le cumul des excuses bidons !

Ecoutez-nous !Il y a parfois des débats politiques qui chatouillent mon neurone de l’agacement.

L’histoire à rebondissement du non-cumul des mandats est en passe de devenir un de ces débat-là.

Les faits

Tout d’abord, cette loi est une bonne loi (jusqu’ici peu de gens osent se prononcer contre son principe) car elle permet tout à la fois le renouvellement du personnel politique, son rajeunissement, accélère le mouvement vers la parité, permet aux élus de se consacrer plus pleinement à leur mandat exécutif. Excusez du peu !

Si ce n’était pas suffisant, un sondage récent de LH2/nouvel obs confirmait que 71% des personnes interrogées approuvait le principe du non-cumul (ce qui est plus qu’une majorité qualifiée des 2/3).

De plus, les militants PS sont également largement pour, au point que le premier d’entre eux a inscrit cette proposition dans son programme électoral présidentiel :

Enfin, pour ce qui concerne les socialistes finistériens, cet engagement apparaît particulièrement fort dans notre fédération.

Les excuses bidons

Là où le militant que je suis commence à être sérieusement titillé, c’est lorsque certains de nos élus viennent nous distiller, épisode par épisode mais finalement avec constance, une série d’excuses pour nous expliquer que décidément, cette excellente réforme, cette promesse, ne peut pas être appliquée ma brave dame :

  • Parce que c’est trop tôt (en l’occurrence, dans un an ce serait trop tôt). Non, il n’y a rien de trop tôt pour appliquer une réforme voulue depuis des années et qui ne nécessite que la volonté d’y aller. Si par un concours de circonstance extraordinaire on venait à avoir localement un déficit de candidats, on pourrait accepter l’argument du trop tôt, mais en s’y prenant plus d’un an avant une élection je ne crois pas que cela se produira.
  • Parce que cela nécessite une réforme constitutionnelle et qu’on aura pas le temps (encore !). Oui, surtout si on retarde la convocation du congrès… Par ailleurs, ce qui ne serait pas décidé par la loi peut parfaitement être fait par la volonté d’un ou plusieurs partis. Que quelques partis s’engagent volontairement sur cette voie et tous les autres se retrouveraient sérieusement en porte-à-faux…
  • Parce qu’il faut être élu local pour être au Sénat (et dans une moindre mesure à l’assemblée). Cet argument est celui qui m’agace le plus car il touche aux principes de notre démocratie. Une élection dans la République ne se fait pas au sein d’un collège privilégié voire d’un cercle aristocratique. Au contraire ! Le citoyen il me semble demande à avoir des élus qui leur ressemblent plus, c’est à dire qui ont une connaissance effective de leur vie quotidienne, qui ont ou ont eu un métier hors de la politique.
  • La seule objection qui mérite à mon sens d’être traitée tient au statut de l’élu. Si le cumul est si farouchement défendu par certain, c’est qu’avec deux mandats on a moins de chance de se retrouver sans emploi et sans revenu, et que pour un élu, le passage de la vie ordinaire à la vie politique et vice-versa est compliqué. Il y a un vrai risque à quitter son emploi pour s’engager au service de tous, et ce risque aboutit parfois à des injustices. Mais on ne répare par une injustice par une compromission au détriment de la démocratie. Des progrès ont été faits vis-à-vis du statut de l’élu, ce travail doit aller à son terme.

Conclusion

Ces atermoiements sur le non-cumul des mandats deviennent insupportables. Je ne peux qu’appuyer avec force les propos d’Harlem Désir : «Je réaffirme la proposition du Parti socialiste d’adopter une loi sur le non-cumul des mandats applicable dès le prochain renouvellement électoral, en 2014» et je n’hésiterais pas à m’engager avec force sur cette mesure que nous avons validée collectivement et que les Français attendent avec de plus en plus d’impatience.