Politique internationale

Ces derniers jours ont été particulièrement intenses en matière de politique internationale.

Commençons par l’entrée de la Palestine à l’UNESCO. La mission de l’organisation internationale est de « contribuer au maintien de la paix et de la sécurité en resserrant, par l’éducation, la science et la culture, la collaboration entre nations, afin d’assurer le respect universel de la justice, de la loi, des droits de l’homme et des libertés fondamentales pour tous, sans distinction de race, de sexe, de langue ou de religion, que la Charte des Nations Unies reconnaît à tous les peuples ». Alors je sais bien que certains États n’ont pas apprécié cette reconnaissance, que les États-Unis ont eu la mesquinerie de retirer leur contribution financière, mais pour ma part, je vois là une très bonne nouvelle. Cela ne résout pas le problème de la souveraineté d’un État Palestinien sur un territoire qui reste à préciser, mais cette décision permet de reconnaître l’évidence : il existe bien un peuple palestinien qui a une culture et qui, lui comme les autres, a aussi droit à l’éducation, la science, le respect et la justice. Cette reconnaissance ne va pas faire disparaître le conflit avec Israël, mais cela ne va pas non plus l’aggraver. Quelques instants de considération, de retenue et de recul ne peuvent qu’être salutaires et bénéfiques, aussi bien pour les Palestiniens que pour les Israéliens. Les valeurs portées par l’Unesco me semblent ouvrir la possibilité d’un tel moment.



Autre épisode international marquant, l’annonce d’un referendum en Grèce. Voilà une annonce surprise qui remet les choses en perspective. D’abord, oui la Grèce est largement fautive et responsable de sa situation actuelle, et oui les créanciers, États ou sociétés privées, sont tout à fait fondés à être fort mécontents de cette annonce qui a toutes les chances d’aboutir à un rejet des dernières décisions concernant la dette grecque. C’est vrai, comme il est vrai que le peuple grec est souverain et qu’en conséquence, il a parfaitement le droit de prendre ses décisions, fussent-elles a priori mauvaises. Les marchés doivent s’effacer devant la souveraineté des peuples. Je ne crois pas, à titre personnel, que le rejet du plan sur la dette grecque serait une bonne chose, et je souhaite que les Grecs prennent en considération leurs alliances et engagements au sein de l’Europe, et qu’au-delà de leurs malheurs, une mauvaise décision entraînerait toute l’Europe dans un ensemble de problèmes encore plus graves dont ils seraient responsables, mais encore une fois, ils sont souverains et nous sommes nous aussi coupables de pas mal d’erreurs, à commencer par le fait de ne pas avoir réussi à créer une souveraineté européenne commune, une citoyenneté européenne. Je regrette également qu’à force de cupidité et de cynisme, il n’existe plus d’autorité morale exemplaire capable de persuader chacun de faire les efforts nécessaires. Le système financier est largement responsable de la situation actuelle mais passé la tempête de 2008-2009, il a repris le « business as usual« . Les responsables politiques, au premier chef desquels on trouve le gouvernement français actuel, ont, pendant des années et encore jusqu’à il y a peu, joué avec la dette (souvenez-vous de la bonne dette de Sarkozy). Que le plus vertueux s’avance, parle vrai, et les peuples le suivront. Mais qu’entendrons-nous au G20 ?

Décidément, la Méditerranée est en effervescence, et balance depuis un an entre espoirs et craintes. Mon diagnostic n’a pas changé : il se passe à mon sens quelque chose de particulier et de spécifique dans le bassin méditerranéen. Il n’y a pas d’un côté les révolutions tunisiennes, libyennes, égyptiennes, de l’autre des soubresauts syriens, des contestations grecques, des indignés espagnols, et au milieu l’éternel désordre israëlo-palestinien. Non, il y a là un bassin pluri-millénaire qui s’est approprié les moyens modernes de communication et qui cherche à réinventer l’exercice de sa souveraineté. L’ancien monde est à l’agonie, le nouveau cherche à naître. Il nous faut des gouvernements capables de comprendre cet instant particulier et capables de s’engager dans une transition aussi douce et maîtrisée que possible. Vivement 2012 pour qu’en France au moins, on en finisse avec ceux qui nous ont mis dans le mur.

Où est passée la bonne dette ? Qui doit-on ruiner maintenant ?

Autant prévu que redouté, les États Unis ne sont plus un pays où l’on peut acheter des bons du trésor les yeux fermés. La perte de leur meilleure note est plus psychologique qu’autre chose, mais la finance mondiale qui faisait gris mine ces dernières semaines s’offre un plongeons supplémentaire en eau froide.

La cause de la défiance : la dette bien évidemment. Fini de s’amuser avec la « petite » dette grecque de 350 milliards d’euros, on s’intéresse maintenant aux plus de 14 000 milliards de dollar américains (soit environ 10 000 milliards d’euro). Nulle doute qu’avec nos près de 1600 milliards et une progression toujours pas maîtrisée, notre tour ne devrait pas tarder. Alors oui la crise y est bien pour quelque chose car il était nécessaire de soutenir l’économie et certaines sociétés qui se sont trouvées temporairement à court de liquidité. Oui, mais cela ne doit pas nous faire oublier la faute originelle de la droite qui a délibérément choisi de se financer à crédit, sans chercher d’autres voies. Rappelons-nous la théorie de Nicolas Sarkozy de « la bonne et mauvaise dette ».

Contrairement au PS dont les théories keynésiennes posent comme postulat que la dette est l’ennemie de la gauche, le gouvernement sarkofillon et l’ump ont délibérément choisi cette voie de la dette, pour nous amener là où nous sommes actuellement, ignorant par incompétence ou aveuglement idéologique que cette voie n’offrait aucun échappatoire en cas de problème. L’accident était inévitable.

Aujourd’hui, il est urgent de répondre à une double question :

  • comment payer ce que l’on doit ?
  • comment reprendre sa liberté financière vis-à-vis des marchés ?

Augmenter les taxes et impôts ou leur assiette (c’est-à-dire le nombre de personnes qui les paient), diminuer les dépenses, « manger » la dette par une inflation importante, refuser purement et simplement de payer. Le panel de solutions est connu, plutôt que de nier le problème il faut soit que ce gouvernement fasse pour une fois ce qu’il faut ou qu’il démissionne et rende rapidement les clés, reconnaissant son incroyable incompétence, abandonnant une politique vieille de presque 10 ans, politique qui à l’exception d’une année n’a jamais réussi à remettre la dette de notre pays dans la bonne direction.

La gauche est décidée à faire ce qu’il faut, et à la différence de la droite, l’expérience passée (1997-2002) montre qu’on peut lui faire confiance pour que cela soit aussi juste que possible et surtout, efficace.

Mais second point, comment reprendre sa liberté vis-à-vis des marchés, car on peut bien tempêter contre les financiers, si l’ump avait fait le choix d’avoir le choix, le rapport de force serait différent. En 1997 le gouvernement Jopin sous la direction de Dominique Strauss-Kahn a qualifié la France pour l’euro et nous avons choisi l’intégration européenne : il est temps d’achever le travail massacré par la droite : l’Europe doit se doter d’un organe de gouvernance dont le rôle est de veiller à harmoniser les éléments financiers structurants de l’Union, et cet organe doit pouvoir relever le défit d’agir selon des choix politiques démocratiques au niveau européen. Par ailleurs, on remarquera que des pays comme le Japon sont beaucoup plus endettés que nous mais sont moins « chahutés » par les marchés ; il y a une raison simple à cela : ces pays financent majoritairement leur dette en interne. Il me paraît donc souhaitable de réfléchir sur la possibilité d’un emprunt national forcé : transformer une partie de l’épargne des Français en emprunt remboursable à court terme (moins de 5 ans) à un taux d’intérêt à fixer. Cela me paraît être une des formes les moins douloureuses de contribution au sauvetage financier de notre pays.

La droite sarkozyste a échoué parce qu’elle a choisi depuis 10 ans une très mauvaise politique économique. Que les mois avant l’élection vont être longs et douloureux pour les Français ! Si Nicolas Sarkozy veut réussir ne serait-ce qu’une chose dans son épouvantable mandat, que ce soit sa démission.

Justice : la République Française vs Lagarde

Après le rapport de la cours des comptes concernant la gestion de l’affaire Tapie par madame Lagarde :



Après la demande des Députés de l’Assemblée Nationale :

Après la demande du procureur de la cours de cassation, la cours de justice de l’État a décidé d’ouvrir une enquête sur la directrice générale du Fonds monétaire international (FMI), Christine Lagarde, en requalifiant les motifs de l’enquête, passant d’une enquête pour « abus d’autorité » à une enquête pour « complicité de détournement de biens publics et complicité de faux ». Les faits retenus sont beaucoup plus graves car passibles de 10 ans de prison et 150 000 euros d’amende, contre 5 ans de prison et 75 000 euros d’amende pour « abus d’autorité ».

Cette ouverture d’enquête n’est pas une surprise, mais les motifs le sont et renforcent la gravité et l’impact des accusations. Nous sommes ici devant une affaire d’État, ayant des retombées internationales et allant porter un grave préjudice à la France à cause de l’incroyable maladresse de Nicolas Sarkozy.

Christine Lagarde a été nommée au FMI suite à la démission forcée de Dominique Strauss-Kahn accusé par une personne dont la crédibilité a été mise en doute par le procureur de NY en charge de l’affaire suite à des mensonges proférés sous serment. Bien qu’ayant accès à des informations qui auraient pu permettre de contrer les rumeurs médiatiques qui ont construit une culpabilité médiatique sur des éléments erronés, le gouvernement n’a pas cherché à rétablir les faits, affichant au contraire un silence officiel qui lui permettait d’éliminer un candidat de premier ordre pour 2012 et de proposer la candidature de Christine Lagarde au FMI.

Christine Lagarde est ici poursuivie par la République Française suite à un travail approfondi de la cours des comptes dont le rapport a été repris par les députés puis le procureur de la cours de cassation. Les différents corps de l’État n’ont agi ni à la légère, ni à la va-vite ce qui met Christine Lagarde dans une situation particulièrement difficile et nécessitera toute son énergie pour sa défense. A la différence du cas DSK, nous ne sommes pas ici dans une situation parole contre parole, d’un individu contre un autre.

Le gouvernement français, Nicolas Sarkozy en tête, a choisi non seulement de ne pas défendre l’image de la France dans l’affaire Strauss-Kahn, mais pire encore, a délibérément pris le risque d’aggraver les choses en proposant à la présidence du FMI une personne qui se retrouve aujourd’hui accusée de faits passibles de 10 ans de prison. En somme, et même si comme cela semble possible les charges devaient être abandonnées par la justice américaine dans l’affaire DSK, l’image de la France ne pourrait être restaurée par la faute impardonnable de Nicolas Sarkozy, l’instruction du cas Lagarde prenant du temps et étant étayée par des éléments particulièrement solides.

Jusqu’à l’aboutissement de la procédure, Christine Lagarde est présumée innocente, mais à l’évidence, aux yeux du monde la France en la personne de son président a commis une faute lourde.

Affaire Dreyfus Strauss-Kahn : comment ils essaient de tuer les combats de gauche

Prologue

Mai 2011 : un tweet d’un militant ump promptement relayé par le site de droite Atlantico révélait que Dominique Strauss-Kahn avait été arrêté. Cette information a été diffusée quelques minutes à peine après l’arrestation, avant tout autre média. En plus de l’arrestation, ce tweet faisait apparaître pour la première fois l’hôtel Sofitel alors que l’interpellation a eu lieu dans l’avion où avait pris place DSK.

Pendant plusieurs jours, la police, la justice américaine et les médias créent et diffusent mondialement la culpabilité médiatique de Dominique Strauss-Kahn, non seulement sans disposer d’aucun élément de preuve, mais également en diffusant des informations qui se révéleront erronées (comme les heures des faits établis puis corrigés par la police) ou fausses comme les accusations de fuite précipitée, les divers noms et nationalités de la plaignante, l’existence d’un film de vidéo surveillance, etc.

Le procureur de cette affaire, Cyrus Vance, fils d’un ancien secrétaire d’État de Jimmy Carter, se retrouve alors en charge d’un dossier qui pourrait le mener à la tête de la mairie de NY comme ce fut le cas jadis pour son prédécesseur Rudolph Giuliani.

A l’issue de ce prologue, l’objectivité est de reconnaître que nous n’avons qu’une seule certitude : une plainte contre DSK a été déposée et a été jugée recevable. Tout le reste n’est que conjectures ou pire, fantasmes.

Acte I : comment le FMI est « repris en main »

Si l’on met de côté les aspects personnels de cette histoire, la première vraie conséquence a été la démission de DSK de sa charge de directeur général du FMI. Plus que tout autre, DSK a réformé le FMI, lui donnant une orientation social-démocrate, permettant aux pays « émergés » et aux pays pauvres d’avoir un plus grand poids au sein de l’institution. Il a été également l’homme qui a montré que l’intervention coordonnée des États pouvaient réussir là où le libéralisme financier débridé avait généré le chaos. Il a été celui qui a annulé la dette d’un des pays les plus pauvres du monde, Haïti, qui a permis à l’Afrique de surmonter le pic de la crise grâce à des prêts à taux zéros, qui a permis à l’Europe de sauver (provisoirement) sa monnaie et aux pays comme la Grèce de ne pas être pillé (provisoirement aussi). C’est aussi l’homme qui était censé présenter un plan ambitieux de réforme des règles financières mondiales à travers une évolution monétaire majeure et l’introduction d’une assurance risque sur les transactions financières.

Cet homme devait être abattu, la première conséquence de l’affaire Dreyfus Strauss-Kahn est la défaite des réformistes keynésiens au niveau mondial. Depuis le dépeçage de la Grèce a débuté et la nouvelle direction du FMI sera assurée soit par un pur produit du modèle financier américain en la personne de Christine Lagarde, soit par Augustin Cartens, certes citoyen d’un pays émergeant, le Mexique, mais aussi pays appartenant à la sphère économique américaine.

En perdant le FMI, la gauche a perdu une bataille de la gouvernance mondiale.

Acte II : comment la lutte des classes se retourne contre les pauvres

Les avocats de la plaignante ont clairement mis l’accent sur un procès qui serait celui d’une femme pauvre contre un homme riche, d’une justice qui doit punir les riches et les puissants, d’une personne humble et sans moyens contre une star qui les a tous, d’un traitement judiciaire qui doit être le même pour tous.

Or comme le relève un certain nombre de juristes, le traitement médiatique judiciaire vus lors des premiers jours ne sert qu’à humilier et n’apporte en lui-même rien au procès sinon une condamnation préventive de l’agora. Le traitement égalitaire revendiqué, à juste titre, est en fait un nivellement par le bas, pour ne pas dire par la bassesse. Riche ou pauvre, faible ou puissant, le « perp walk » est une honte d’abord pour le système judiciaire : le nivellement par le bas n’est en rien une revendication égalitaire, un combat des humbles. Nous revendiquons une justice égalitaire, pas une humiliation égalitaire. Nous revendiquons une élévation des humbles, pas un abaissement des puissants.

Par ailleurs, les avocats qui défendent madame Diallo n’ont rien d’avocats de seconde zone commis d’office. Ce sont des stars du barreau dont le costume impeccable ne sort pas d’une boutique de prêt à porter premier prix. Leur plaidoirie à vocation universelle cadre mal avec leur personnalité et l’enjeu du procès. Encore une fois, cette affaire est l’occasion d’une mise en scène médiatique qui utilise la condition d’une personne humble à des fins qui n’ont que faire de la lutte des gens pour sortir de leur misère.

A nouveau la gauche est en train de perdre ici la bataille de la défense des humbles, cause reprise par des stars du système judiciaire américain. Même si c’est un combat pour la justice, la justice sociale ne peut être défendue par ce genre d’avocat !

Acte III : comment le syndicalisme est manipulé jusqu’au ridicule

La troisième audience a été le lieu d’une théatralisation supplémentaire. Un syndicat (Unite-Here) a profité de ce procès pour organiser un rassemblement spectaculaire et ici encore, médiatisé. Le rôle des syndicats est d’obtenir de meilleures conditions de travail aux salariés, de les défendre en cas de conflit, d’aider à faire progresser le droit du travail, de co-gérer certains organismes paritaires. Si des problèmes de sécurité se posent dans l’exercice du travail de ces femmes de chambre (ce que je veux bien admettre), en quoi cette manifestation contre un homme dont la culpabilité reste à établir va changer en quoi que ce soit la position de leurs employeurs ? Pire que cela, si le procès venait à établir l’innocence de l’accusé, ce syndicat se sera ridiculisé et aura ridiculisé ces femmes de chambre.

La bataille du syndicalisme n’est pas celle de juger la culpabilité de personnes dans des procès privés, c’est une bataille pour le progrès social, une bataille entre salariés et patrons, entre organisations syndicales et patronales, entre syndicats et État. Ici, Unite-Here ne peut que perdre, son âme ou son image au choix, et s’affaiblir dans de futures batailles qui seraient elles totalement de son ressort.

Acte IV : comment le féminisme s’égare

Certaines organisations féministes ont saisi l’occasion de ce procès pour faire entendre leur voix. Prenant dès le départ le parti-pris de la culpabilité de l’accusé, elles ont construit un amalgame entre des luttes déjà anciennes et les images de la culpabilité médiatique abreuvant largement télés et journaux du monde. Pour les mêmes raisons qu’évoquées précédemment, c’est un détournement de combat qui ne peut qu’aboutir à l’affaiblissement ou au ridicule.

Si DSK est coupable le tribunal le condamnera. Dans ce cas, la justice aura montré de façon exemplaire qu’une personne, homme ou femme, ne peut abuser d’une autre, homme ou femme, sans être sévèrement puni. Il ne s’agit pas d’une lutte d’un sexe contre l’autre, mais bien d’une loi universelle s’appliquant à tous qui démontre de façon éclatante que la dignité et l’intégrité des personnes n’est subordonnée à aucune exception. C’est un combat commun et universel des hommes et des femmes.

Mais si DSK est reconnu innocent, alors ces organisations féministes auront fait beaucoup de mal à ce combat pour l’égalité car elles auront montré que leur combat fait peu de cas de la vérité et de la justice, que la fin justifie les moyens, que quels que soient les faits, l’homme est l’ennemi à abattre. La violence et l’injustice ne sont pas des combat de la gauche !

Epilogue

L’épilogue de cette tragédie n’est pas écrit, et à vrai dire il n’est pas exclus que ce soit en fait une farce grotesque tant les incohérences et les manipulations sont grandes, provoquant les interrogations publiques de personnes peu suspectes de connivence avec l’accusé, comme Christine Boutin ou Vladimir Poutine.

Coupable ou non, pour l’heure les gagnants sont peu nombreux mais bien identifiables. Si au niveau mondial leur victoire semble acquise pour plusieurs années, les choses sont bien moins claires en France. J’ose espérer que l’hypothèse du complot co-alimenté par certain en France se révèlera fausse, car dans le cas contraire nous serions dans une situation encore plus scandaleuse que l’affaire Dreyfus.

Guaino, le cruciverbiste amateur

Ils sont sympas à l’UMP. On aurait pu pensé qu’après les réaffectation de Lefebvre et Paillé, après les bévues de Rantaplan à l’assemblée nationale, après l’évacuation sous le tapis d’Hortefeux et le retour de MAM aux réalités du canton de Saint Jean de Luze, la droite avait épuisé son stock de gaffeurs impénitents.

Et bien non ! Le ci-devant sieur Guaino, troisième premier ministre de ce gouvernement et tout frétillant d’être enfin sous les feux de la rampe a dignement pris le relais. Certes sa saillie verbale sur la croisade du preux chevalier pompadourien aurait pu en rester au niveau de la maladresse regrettable, mais quand on est à l’UMP, en matière d’ânerie, on aime persister et signer. Au lieu d’esquiver et d’admettre la maladresse, notre jihadiste de la définition littéraire nous a sorti ses dictionnaires à l’assemblée nationale pour essayer de nous convaincre par a plus b que décidément le mot croisade ne renvoyait en rien à une image impérialiste, extrémiste et religieuse, particulièrement sur les rives de la Méditerranée. Ceci dit, sans doute avons-nous mal compris son intention et peut-être ne cherchait-il ici qu’à rendre hommage au défunt maître Capello, ou peut-être s’agissait-il là d’un acte de contrition et que tel un pénitent de l’opus dei, Guaino cherchait là à serrer son cilice et se donner la discipline à l’assemblée, qui sait ?

Comme pour ma part j’ai quelques souvenirs d’histoire, je comprends combien ce terme de croisade est malvenu, combien il ne correspond en rien au sens que nous voulons donner à notre action en Libye. Et d’ailleurs, quel sens devons-nous y donner ?

Certes pas une action d’assassinat ciblée contre le camp Kadhafi. Ce type a beau être un tyran qui figurera en bonne place parmi les pires que nous ayons connu, des États de droits démocratiques doivent rendre justice par la loi, non par les pratiques que l’on reproche justement aux tyrans.

S’il y avait un brin de vision géopolitique au sein du gouvernement sarko-fillon-juppé-guaino, le projet euro-méditerranée aurait pu être cette vision, une vision de démocratie, de paix, de prospérité forgée par une histoire commune. Mais hélas, bien qu’ayant essayé de reprendre une idée qui n’était pas de lui, Sarkozy n’a même pas pu amorcer un démarrage dans ce sens. Du coup, au lieu d’une volonté commune des peuples de la Méditerranée, on va rapidement se retrouver avec une action occidentale de police internationale contre les musulmans d’Afrique du Nord, action qui risque fort de s’enliser qui plus est. En résumé, il y avait en Afrique du nord matière à un grand mouvement d’union démocratique, mais parce que nos dirigeants n’ont d’autres talents que la joute verbale plus ou moins foireuse, tout ceci risque fort de finir en une soupe indigeste. Hélas, mille fois hélas !

Dégageons-les, et commençons à le faire dès dimanche en allant voter.

DSK victime d’un lynchage médiatique en Grèce

Ce post m’a été envoyée par Catherine S. et c’est avec plaisir que je le relaie.

Selon un article d’Alexia Kefalas paru dans le Figaro du 14 mars, le ʺfilmʺ  de Canal + sur DSK aurait provoqué un tollé en Grèce et ce seraient les petites phrases lâchées par DSK « La Grèce est dans la merde » et « La fraude atteint des sommets en Grèce » qui seraient à l’origine de ce presque ʺincident diplomatiqueʺ entre la Grèce et le FMI.

Grecque par mes origines, cet article du Figaro, mais aussi l’écho de la presse française sur la prétendue bourde de DSK, m’ont vivement interpellée d’autant plus que j’étais en Grèce la semaine dernière pour raisons professionnelles et que je me souviens très bien du reportage que j’ai vu jeudi 10 mars sur Alpha News (alphatv.gr, Στρος Καν: « Η απάτη πάει σύννεφο στηνΕλλάδα » http://www.alphatv.gr. Il y était question de ce documentaire, la scène des manifestants était la même, mais après, on voyait Papandréou et DSK assis ensemble en train de discuter. Le son était coupé et le tout était reproduit en traduction simultanée accompagnée de quelques sous titres. Il faut savoir que la chaîne grecque avait passé cette information à l’ouverture du journal du soir et qu’elle n’en avait reproduit qu’un tout petit extrait.

Et voilà ce qu’a donné la version grecque du documentaire français : DSK aurait dit « La réalité est que la Grèce est dans le caca et très profondément même ! Quand une femme dit qu’elle ne peut plus acheter du pain, elle dit la vérité. Toute cette colère est légitime. Les gens dans la rue ont le sentiment d’avoir été trompés alors que ce sont eux-mêmes qui ont mijoté les ingrédients (de la crise) et qui ne payent pas d’impôts avant d’ajouter littéralement « la fraude monte jusqu’au ciel en Grèce ».

Ce qui a déchaîné l’opinion publique, ce n’est pas le documentaire de Canal + comme l’affirme la correspondante du Figaro mais l’interprétation des propos de DSK par les journalistes grecs qui ont divulgué l’information en rajoutant des choses et en grossissant les traits.

D’autre part, dans le petit extrait qu’ils ont montré, ils ont affirmé aussi que Papandréou aurait sollicité l’intervention du FMI dès fin 2009 (à peine deux mois après son élection) alors qu’à l’époque le discours officiel du Premier ministre était qu’il rejetait complètement cette éventualité. Il ne s’agissait-là que d’une consultation privée entre les deux hommes puisque la décision de demander l’intervention du FMI a eu lieu après le vote de la loi fiscale du 5 mars, autrement dit après le plan d’austérité du 14 décembre, celui du 5 janvier, celui du 5 février … . Déjà en février 2011, le journal grec « Kathimerini » avait titré « Stauss-Kahn, une bombe pour la Grèce » dans son quotidien du 20 février http://news.kathimerini.gr/4dcgi/_w_articles_politics_2_20/02/2011_433401 en annonçant que le documentaire à venir réserverait des révélations sur Nicolas Sarkozy.

De retour en France, j’ai visionné le documentaire incriminé et je dois avouer qu’il n’y a rien dans ce reportage qui m’ait choqué vraiment, si ce n’est la scène où un mannequin à l’effigie de DSK est pendu par des manifestants sur une place publique. Si l’expression « la Grèce est dans la merde » est un peu dans la limite du politiquement correct, je ne comprends pas l’acharnement des journalistes qui en ont fait une montagne.

À titre de comparaison, je vous mettrai la transcription des propos réellement tenus par DSK sur la chaîne française avant de vous présenter les commentaires grecs de ces mêmes propos. Ainsi vous pourrez juger par vous-mêmes, si oui ou non, ce n’est pas d’un lynchage médiatique dont il s’agit.

Extrait du documentaire français : ʺUn journaliste interroge les manifestants dans la rue « Que pensez-vous de DSK ? » Réponse de la première dame en grec : « Qu’il aille se noyer » avant l’intervention d’une deuxième qui dit : « Moi, je lui donne un euro pour s’acheter un petit pain grec au sésame (genre donuts salé). Voilà ce que j’ai, c’est tout l’argent qu’il me reste (en montrant quelques pièces de monnaie qu’elle tient dans sa main) ». « Oui, ils nous ont tout pris » lance une troisième, « ils ont appris qu’il y avait de l’or en Grèce et ils sont venus tout nous prendre … » et on voit une foule en colère et quelques personnes qui portent trois potences avec trois mannequins dont l’un à l’effigie de DSK. Le reportage continue : Pour les Grecs, le plan de sauvetage est surtout synonyme de trois augmentations de TVA, d’un gel des retraites, d’une diminution des salaires des fonctionnaires, d’un allongement de la durée du travail et des baisses de crédit dans l’éducation. À leurs yeux, un seul coupable : DSK. Réponse de l’intéressé : « C’est normal et inévitable qu’ils nous en veuillent, même si on n’y est pour rien. Ça, c’est le raisonnement à froid. La réalité est que ces gens sont dans la merde et ils y sont gravement. Quand la dame dit « je ne peux plus acheter mon pain », la formule est un petit peu exagérée, mais c’est quand-même vrai. Et donc la colère qui s’exprime tombe sur ces salauds du FMI qui viennent et qui leur ont tout pris. Ce n’est pas vrai, on ne leur a rien pris. C’est le contraire, on leur a apporté de l’argent. Mais cette colère est légitime, les gens dans la rue ont le sentiment qu’ils ont été blousés, trompés. Eux-mêmes, ils ont beaucoup bricolé, ils savent très bien qu’ils ne payent pas d’impôts, que c’est un sport national de ne pas payer d’impôts en Grèce parce que ça truande un maximum et d’un autre côté, si on n’était pas venu à la dernière minute, quand ils nous ont demandé de venir, ils seraient tombés au fond du gouffre, c’est-à-dire deux semaines plus tard, le Gouvernement ne payait plus les fonctionnaires, il commençait à avoir des files devant les banques pour y retirer les sous, les banques fermaient, donc l’écroulement total. C’est injuste ce qu’ils nous reprochent, mais c’est normal » avant de poursuivre en anglais « tout le monde du haut au bas de l’échelle sociale doit comprendre qu’il doit participer à l’effort et plus vous êtes riches, plus votre participation sera grande ». DSK a beau vouloir faire payer les riches, les plus remontés ne l’entendent plus depuis longtemps. (…)ʺ.

Comme on le voit, le langage de DSK est loin du langage populaire et vulgaire que lui prêtent les médias grecs qui pendant quelques jours ont passé cet extrait en boucle sur toutes les chaînes. On voit bien que ce n’est pas la bourde de DSK mais l’interprétation des propos de DSK qui a déchaîné l’opinion publique en Grèce ! C’est comme si les journalistes cherchaient un bouc émissaire et qu’ils l’avaient trouvé en la personne de DSK, car il est plus facile pour eux de taper sur un étranger que sur les politiciens du pays. Même si c’est dur à entendre, DSK a raison de dire que la fraude fiscale atteint des sommets en Grèce, c’est une réalité ! Oui les Grecs ont triché sur tous les plans (fraude, corruption, pots de vin etc.). Pour plus d’informations sur ce point, vous pouvez également lire mes deux autres posts ʺCrise grecque – Qui est responsable ?ʺ et ʺUn autre regard sur la Grèceʺ dont voici les liens : http://www.lepost.fr/article/2010/05/03/2059361_un-autre-regard-sur-la-grece-crise-grecque-qui-est-responsable_1_0_1.html

et http://www.lepost.fr/article/2010/05/03/2059354_un-autre-regard-sur-la-grece_1_0_1.html

Même le Ministre de l’économie grec, M. Papaconstantinou, l’avait dit ouvertement en admettant que l’économie souterraine était évaluée de 30 à 40 % du PIB. http://bruxelles.blogs.liberation.fr/coulisses/2011/02/la-dette-grecque-bientôt-restructurée.html

Depuis la sortie de ce reportage, la presse, les journaux télévisés et les émissions politiques se sont relayés pour réagir aux propos de DSK oubliant complètement le travail de journaliste qui consiste à vérifier ses sources avant de divulguer des déclarations aussi polémiques qui ne sont basées que sur des traductions. Ainsi, le documentaire de Canal +, si inoffensif en apparence, a donné libre cours à l’imagination des journalistes qui ont tous affirmé que DSK aurait eu des propos très durs sur la Grèce.

Ainsi le journal ʺKathimeriniʺ a titré dans son édition du 10 mars http://news.kathimerini.gr/4dcgi/_w_articles_politics_100073_10/03/2011_435299 que Strauss-Kahn s’était exprimée sur la Grèce en utilisant les pires des mots « La réalité est que ces gens sont dans le caca (…) même si c’est eux qui ont cuisiné un peu, ils ne payent pas d’impôts, c’est un peu un sport national, du vagabondage à l’extrême ».

Selon le journal ʺto vimaʺ

http://www.tovima.gr/opinions/article/?aid=388946&h1=true

DSK aurait dit « Les gens sont dans le caca et même très profondément. Toute cette colère est juste. Les gens dans la rue ont le sentiment d’avoir été escroqués. Et ce même si ce sont eux-mêmes qui ont mijoté cette cuisine, qui ne payent pas d’impôts. La fraude atteint des sommets. On n’avait pas besoin de la confession de Strauss-Kahn pour voir le trou noir dans lequel nous nous trouvons. Ce qui nous dérange, c’est quand certaines vérités sont dites par des étrangers et tout particulièrement par le patron du FMI qui, du moins selon l’avis de l’opposition, est responsable de tout le mal qui nous arrive ».

 

Le journal ʺta neaʺ

http://www.tanea.gr/default.asp?pid=2&ct=3&artid=4621749

a fait sa une sur DSK en titrant « Si nous n’avions pas été là, VOUS seriez tombés dans l’abysse » comme si l’intéressé avait tenu ces propos en s’adressant directement aux Grecs.

 

D’autres journaux ont cru utile d’écrire que selon DSK « Les Grecs baignaient ou nageaient dans le caca » ou encore « qu’ils étaient plongés dans le caca jusqu’au cou » en expliquant que DSK aurait parlé d’eux de la pire des manières imaginables, traitant tous les Grecs de voleurs, de fraudeurs, d’escrocs et de tout ce qu’on veut.

 

Comme vous le voyez, l’acharnement des journalistes est incroyable et ils vont jusqu’à lui prêter des mots qu’il n’a jamais prononcés.

 

Qu’en pensent les Grecs que j’ai rencontrés sur place de tout cela ?

 

Et bien, il y a ceux qui ont très bien compris que l’Europe les a sauvés et qui reconnaissent volontiers qu’il y a plus de choses qui ont changé en six mois dans ce pays que pendant dix ans sous les gouvernements précédents tout en affirmant que la vie est devenue très dure pour eux. Après, il y a les mécontents qui tapent à fond sur Papandréou, surtout les fonctionnaires et les indépendants qui voient leur activité asphyxiée depuis qu’ils ne peuvent plus tricher comme avant et puis, il y a ceux qui pensent sincèrement que la Grèce s’en serait mieux sortie s’il elle était sortie de l’euro en disant que tout allait bien avant et que tous leurs problèmes sont venus avec l’euro.

 

Après, il faut dire aussi qu’ils ont l’impression que l’effort demandé n’a pas été réparti équitablement. Selon eux, les salariés et les retraités seraient les plus pénalisés. Mais ce qui fait râler les Grecs, c’est surtout le fait que ceux qu’ils croient responsables de leur situation n’ont pas été traduits devant la justice. Ils ont le sentiment que certaines personnes se sont enrichies impunément sur leur dos alors qu’on vient leur prendre leurs dernières économies.

 

Pour les supposés propos de DSK, il faut dire qu’ils ont du mal à digérer et on peut le comprendre. Il y en a un qui m’a dit : « Et bien si nous, on est dans le caca, on n’a qu’à le payer avec notre caca, comme ça, il sera aussi dans le caca et l’Europe avec ». On a beau leur expliquer, ils ont tellement été bombardés avec cette information qu’ils ne vous croient plus quand vous leur dites que DSK n’a pas dit ces choses-là.

Pour ce qui est du prochain déplacement du patron du FMI dans ce pays, je pense qu’il est un peu prématuré et qu’il ferait mieux d’attendre que les choses se soient clarifiées. J’estime qu’il est en droit d’exiger une rectification, voire des excuses publiques de la part des médias grecs qui se sont tellement acharnés sur lui. Quelles que soient nos convictions politiques, quoi que l’on pense de DSK par ailleurs, j’estime que Dominique Strauss-Kahn n’a pas mérité un tel traitement de la part des Grecs.

http://www.lepost.fr/article/2011/03/18/2439234_dsk-victime-d-un-lynchage-mediatique-en-grece.html?doFbPublish=2439234

Stupeur et tremblements

Quelle terrible début d’année !

Après la révolte des peuples du bassin méditerranéen, la semaine passée a été celle d’un début de renversement contre-révolutionnaire en Libye et surtout, le Japon a connu une série de catastrophes qui laissera longtemps des traces profondes. Voilà qui mérite qu’on s’y arrête pour en tirer un certain nombre de premiers enseignements.

Le Japon d’abord. Plus que nul autre peut-être, le Japon c’est le pays qui se voulait celui du triomphe de la technologie. Même si chacun au fond de lui le sait, dure leçon que celle qui nous rappelle que l’homme est loin, très loin, d’avoir les moyens de résister aux fureurs de la planète. Le pays qui est sans doute le mieux préparé aux tremblements de terre et aux tsunamis n’a pas pu empêcher grand chose cette fois-ci : deux catastrophes naturelles qui s’enchaînent c’est une de trop, et les catastrophes industrielles qui en découlent ne font qu’achever le triste constat.

Les images qui passent en boucle doivent maintenant nous renvoyer à notre propre cas. Même si nous ne sommes pas sur des failles sismiques aussi actives que celles du Japon, la France (métropolitaine ou pas), a elle aussi ses points chauds, est elle-aussi sous la menace d’un tremblement de terre suivi d’un raz-de-marée. Le golfe du lion est par exemple un bon candidat. Par ailleurs, Xynthia nous a montré, à toute petite échelle à côté du Japon, ce que pouvait donner chez nous un raz-de-marée.
Or il me semble évident que notre urbanisme côtier en particulier, est très en dessous d’un niveau de sécurité ne serait-ce que raisonnable vis-à-vis de tels phénomènes, et qu’il est même très probablement condamné face à la montée prévue des niveaux de l’océan suite au réchauffement climatique. J’avais écrit il y a quelques années un texte sur les éléments qui rendaient nécessaire le lancement d’un nouveau programme d’urbanisme, je crois que ce texte trouve une de ses justifications ici.
Après la catastrophe naturelle, sont venues les catastrophes industrielles. D’abord il me semble que l’on se focalise un peu vite sur le nucléaire en oubliant le reste. Les incendies des raffineries et dépôts de carburants auront-ils si peu de conséquences ? Aucune usine chimique n’aurait-elle été détruite ou cela aurait-il été sans conséquence également ? Probablement non, mais il est vrai que notre prisme de lecture est un peu déformé lorsqu’il s’agit de nucléaire. Le débat mérite cependant bien d’être mené et les écologistes s’en sont naturellement emparés rapidement.
La question posée est de savoir s’il faut supprimer ou pas toute production d’électricité nucléaire. Les plus radicaux des écologistes nous répondent oui, avec les images des explosions des centrales nucléaires japonaises à l’appui. Pour ma part, je poserai la question un peu différemment : quelles mesures peut-on mettre en œuvre pour diminuer régulièrement et fortement le risque lié à la production d’énergie (nucléaire ou pas) ?
Les écologistes sont allergiques au nucléaire et en font une question première. Pour ma part, je n’en suis pas fan, mais la question première est la production sécurisée d’énergie. Aujourd’hui, si vous décidez du jour au lendemain de supprimer la production nucléaire (ce qui est possible), il faut que chacun soit prêt à diminuer sa consommation électrique des 3 quarts (concrètement, sur 24h vous coupez votre électricité pendant 18h et vous diminuez drastiquement votre consommation pendant le temps restant). Sans oublier que ce que consomme les ménages est finalement assez faible en regard des besoins industriels. Ne demandez donc pas qui l’acceptera, demandez-vous si vous le ferez et si oui, commencez maintenant.
Faut-il alors considérer (comme au Japon) que nous n’avons raisonnablement pas d’autre choix ? Il se trouve qu’au sein du mouvement social-démocrate, nous avons pas mal réfléchi sur le sujet, et pour ma part, j’avais écrit en coopération avec quelques camarades un texte sur le sujet il y a quelques années. Sur cette question, l’idée de sortir du nucléaire ne nous était pas apparue comme hérétique, mais nous avions tracé un chemin qui était certes long mais raisonnable. L’idée était de dire qu’il fallait diminuer régulièrement le nombre de réacteurs, mais qu’il était possible d’en construire de nouveaux, plus puissants et sûrs remplaçant les anciens. Si on construit 2 réacteurs de nouvelle génération pour remplacer 3 réacteurs d’ancienne génération, on comprend bien qu’à terme, il ne restera que très peu, voire plus de production nucléaire mais que l’objectif premier (produire de l’électricité bon marché pour tous) est conservé.
Couplée à l’idée d’un nouvel urbanisme capable de produire sa propre énergie (entre autre), nous aurions là deux nouveaux outils de grande qualité. Voici donc un sujet tout à fait d’actualité, sujet auquel les sociaux-démocrates ont réfléchi et sont à même d’apporter des propositions intéressantes. Nous avons bel et bien des choses à proposer aux Français pour 2012 !

Deuxième sujet, la Libye. Je serai plus bref. Autant j’approuve la position de Nicolas Sarkozy lorsqu’il met en avant la défense de la révolution Libyenne (pour une fois que je suis d’accord avec lui !), autant je trouve que cela a mal été mené et pour l’heure contre-productif voire préjudiciable. Oui à la défense de la liberté contre l’oppression, oui à l’idée d’aider ce peuple, oui à l’étendard des valeurs universelles défendues par la France, mais non à cette manière irréfléchie qui court-circuite manifestement et la diplomatie française et nos alliés, qui fait dans le déclaratif, accélère les actions militaires du régime dictatorial Libyen et lui laisse le temps de faire sa sinistre besogne. Si l’on est pas capable de montrer rapidement le nez de ses avions, si l’on n’est pas capable de prendre les risques à la hauteur de ses ambitions et de son discours, alors que l’on assume son cynisme et sa lâcheté et que l’on reste au chaud.

DSK sur France 2 : le verbatim

Le dimanche 20 février 2011, DSK était l’invité de Laurent Delahousse, sur France 2. Il y eu une excellente audience de 6.9 millions de personnes, soit 7% de plus que l’audience habituelle de France 2 à cette heure.

Voici une synthèse faite par BFM.

Voici un verbatim.

00:45 la crise est loin d’être terminée
00:50 l’éloignement crée une vision de la France par rapport au reste du monde comprendre les avantages et les difficultés
01:20 tout ce que je lis de la presse française, italienne, allemande, l’Europe est dans une situation difficile
01:50 le devoir de réserve au sein du FMI
02:22 je suis un homme plus libre que je ne l’ai jamais été. J’ai la possibilité de dire à tous les chefs d’État de la planète, ce qui va et ce qui ne va pas.
02:40 on a pas dominé la crise sociale, et particulièrement en Europe
04:52 le G20 et la Chine, on a évité l’effondrement mais on a pas évité les souffrances, chacun revient à ses petits problèmes nationaux
05:30 le risque de déclassement de l’Europe, croissance faible, dette forte, prix des matières premières
06:02 souffrance en France, en Europe, les classes moyennes, Jacques Julliard dans Marianne parle du chiffre effrayant du quart des salariés qui gagnent moins de 750 euros par mois
06:39 rigueur ? il faut des finances publiques qui tiennent la route… relancer la croissance, celle de l’Allemagne est plus forte que la française
07:00 d’autres politiques économiques doivent pouvoir être engagées, plus actives
07:37 il n’y a pas d’orthodoxie libérale là dedans, lorsque le FMI a été le premier à dire qu’il fallait faire du stimulus budgétaire, faire de la dépense, parce que sinon l’économie mondiale, on nous a dit “mais on ne reconnait plus ‘notre’ FMI » le fait est qu’il a changé.
07:52 on n’échappe pas à mener des politiques raisonnables, on peut pas se permettre d’avoir des choses qui dérapent… il faut aider les gens sur-endettés à se remettre de façon juste.
8:18 “Vous aimez Keynes, la relance, Jacques Delors avait proposé une politique de grands travaux » : c’est une grande idée, j’ai toujours été un fervent défenseur de la construction européenne, la France toute seule, l’Allemagne toute seule, l’Italie toute seule c’est trop petit face aux géants que sont l’Inde, le Brésil, la Chine ou les États Unis
08:47 On a besoin d’une impulsion européenne plus forte
08:58 ce qui compte c’est ce qui se passe pour les gens dans la rue, dans la vie de tous les jours qui cherche un boulot, qui le trouve pas, qui a du mal à payer ses notes d’électricité, ou son loyer, on peut pas rester aux considérations générales sur la croissance, les grands chiffres macro-économiques, la réalité de la vie, c’est ce qui fait que l’Europe s’en sortira ou pas.

(…)

09:13
Question
On se souvient de Jacques Delors, lui il y quelques années, il s’interrogeait. Il était l’homme le plus populaire à l’époque, il envisageait peut être d’être candidat, puis dans cette interview, faite par une intervieweuse de qualité, Anne Sinclair, il avait répondu finalement “je n’y vais pas”. Qu’est ce que vous évoque cette histoire là, de Jacques Delors
Réponse
J’avais regretté qu’il n’y aille pas.
[long silence]
Question
ça ne vous suscite pas plus de com…
Réponse
C’est de l’histoire.
[hésitation du journaliste… silence]

(…)

09:49 Le monde arabe.
10:16 autocritique, nous avons été trop concentrés, moi-même, sur la macro économie, pas assez sur les inégalités et le chômage, pour ces pays qui reviennent à la démocratie.
10:45 il n’y a pas de bienveillance envers la Tunisie… le jugement qu’on portait il y a deux ans ne portait pas assez sur les inégalités
11:14 il y a 3 mois en novembre au Maroc, on disait que la bombe à retardement dans le Maghreb est la démographie et le chômage des jeunes, c’est exactement ce qui s’est passé et en Tunisie et en Égypte.
11:34 j’ai une mission à remplir, je la remplis… je n’entre pas dans le débat politique français… j’ai toujours dans ma vie essayé de faire en sorte que ce que ma responsabilité et ce que mon devoir me dictait là où je pouvait être le plus utile, je fasse ce qui était le plus utile, eh bien je continue, et aujourd’hui, clairement, c’est au FMI que je travaille

(…)

12:18 question « Votre épouse a eu une idée, c’est qu’elle ne souhaite pas elle que vous fassiez un second mandat au FMI, est-ce que vous êtes un homme qui écoutez parfois votre épouse”
Réponse “Toujours, d’abord on en discute, c’est bien normal, ce qu’elle dit a beaucoup d’importance pour moi, quand elle a quitté 7 sur 7, on a a discuté, c’est elle qui l’a choisit,… quoique je fasse à l’avenir évidemment on en parlera ensemble et son avis comptera”
12:48 mon travail aujourd’hui c’est de faire en sorte que Pays par Pays, on essaye d’arranger les choses, que pays par pays, on essaye de convaincre les gouvernements, et c’est jamais la même chose qu’il faut faire, parce que chaque pays est différent, pour que la situation aille mieux, que les plus vulnérables soient protégés… ça occupe mon temps, c’est ce qui aujourd’hui me semble être ma mission et je la remplis.
13:20 je comprend que vous vouliez m’entrainer sur ce débat, je suis le directeur du FMI aujourd’hui, et je ne suis que ça.

(…)

13:28 sur les attaques… « dans le métier que je fais, je suis capable de supporter des critiques plus dures que celles là »
“mais je vais vous dire autre chose quand même, ce qui m’indigne… c’est qu’il y a mieux à faire pour les responsables européens, en général, français en particuliers, que de la polémique. Les élus ils sont là parce que des gens leur ont demandé de résoudre les problèmes des gens et leur temps, ils doivent le consacrer à résoudre les problèmes des gens, pas à se préoccuper de leur prochaine élection. c’est vrai ici, c’est vrai ailleurs… si les gouvernements ils se préoccupaient de ce pour quoi ils ont été élus plutôt que de savoir comment ils vont gagner les prochaines élections, les choses iraient mieux »

(…)

14:50 Aujourd’hui au FMI, je m’occupe concrètement des problèmes des gens, on a sauvé des pays de l’effondrement, l’Islande qui est le premier pays dans la difficulté et qui aujourd’hui est sauvé… dans la difficulté, dans la douleur, pour les citoyens… c’est mon travail de tous les jours de faire ce qui est utile pour les gens…
15:36 Ce qu’évoque le mot socialiste . “l’espoir, l’avenir, l’innovation”

Espoir, avenir, innovation, voici une conclusion plaisante en attendant la suite.

PS : que vous soyez militants, sympathisants, ou citoyens simplement curieux, vous pouvez rejoindre notre groupe Facebook du « cercle FB des ami(e)s de DSK« .