L’échec des alternatives à gauche


Si le dernier baromètre BVA-L’Express-Orange-France Inter ne change pas la donne en tête (DSK est toujours plébiscité alors qu’Aubry se renforce un peu face à Sarkozy en cas de 2nd tour), il n’en va pas de même pour les outsiders de gauche.

Le plus frappant semble être l’échec de la stratégie de la gauche radicale mais aussi des écologistes.

Malgré tout son bruit et sa fureur, Jean-Luc Mélenchon est en train d’échouer dans les grandes largeurs dans sa stratégie de dézingage du futur candidat PS (surtout lorsqu’il s’agit de DSK) en faisant moins que Bayrou ou Besancenot. On constate que la gauche « radicale » ne fait pas recette avec sa vindicte anti « social-traitre » qui n’apparaît pas crédible : seul 1% de plus des votants potentiels voteraient Mélenchon plutôt que PS selon que le candidat PS est Dominique Strauss-Kahn ou Martine Aubry. Clairement être « contre » ou ressortir les vieilleries idéologiques ne suffisent pas, Mélenchon ne réussit pas à réinventer une politique, pire il semble sombrer dans les eaux troubles des méthodes d’un autre temps si l’on en juge par les lâchages qui commencent au sein de son camp (voir la démission de Christophe Ramaux).

Chez les écologistes, le cas Eva Joly est assez étonnant. Plutôt plébiscitée en qualité de candidate chez les écologistes, ses intentions de vote à la présidentielle sont au niveau catastrophique des autres candidatures (un groupe qui tourne autour de 5% pour faire simple). Triomphants aux européennes, les écologistes là non plus ne semblent pas avoir réussi à construire un discours en phase avec les attentes.

Au sein du groupe des outsiders du PS, c’est là aussi un constat d’échec. On aurait pu croire que les progrès de François Hollande pouvaient lui laisser espérer une ouverture dans cette présidentielle, que nenni, il ne réussit pas à apparaître à l’horizon. Finalement, semaines après semaines, le choix qui se dessine revient invariablement sur DSK ou Aubry, ce qui donne aux primaires socialistes un goût de plus en plus décalé : si ces primaires ne doivent pas décider d’un candidat, il est urgent de leur donner un sens !

A droite, les choses se passent pour l’heure en Le Pen fille et Sarkozy Père. L’extrême droite apparaît aussi forte que l’UMP faible, ce qui donne une équation d’une logique implacable : l’UMP ne peut gagner qu’en s’alliant au FN. Je ne doute pas que certains à droite y songent déjà.

Comment s’essuyer les pieds sur le paillasson de la misère tunisienne ?


Les troubles, pour ne pas dire plus, en Tunisie pourraient être l’occasion d’une réflexion sur bien des choses : notre approche géopolitique en Afrique du Nord, nos complaisances avec des pays certes amis mais peu ouverts aux idées démocratiques, notre empruntement à donner notre avis lorsqu’un problème touche une ancienne colonie, les modèles de développement du bassin méditerranéen, la misère générée par la crise mondiale actuelle, plein de choses qui interpellent et dont la réponse permettrait de faire avancer les choses et le monde.

Ca, ce serait dans un monde responsable, ouvert au questionnement et un minimum généreux.

Mais non, pour certains, il semble bien plus profitable de prendre une situation de crise économique, politique et social d’un pays voisin, pour la transformer en une bonne soupe pré-électorale franchouillarde !

Que dire de la désespérance des jeunes tunisiens ? Mais que tout cela est lié à l’ignoble DSK, l’imam sioniste affameur des peuples ! La preuve ? Fastoche, en 2008 il a fait un discours sur les espoirs qu’il fondait sur le modèle de développement tunisien et sa capacité d’aller de l’avant !



En plus, Ben Ali ayant mis une sardine sur la veste de DSK, nous avons là la preuve de l’odieux complot. CQFD.

Sur ce, nos voisins d’en face de la Méditerranée seront donc heureux de savoir que leur combat n’est pas vain puisqu’il permet d’orchestrer une belle campagne de buzz à visée franco-franchouille :
http://www.google.fr/search?q=strauss-kahn+tunisie&ie=utf-8&oe=utf-8&aq=t&rls=org.mozilla:fr:official&client=firefox-a

Vous ne manquerez pas de remarquer le copier / coller des titres : « la Tunisie est le bon exemple à suivre » (rien que 274 articles à ce jour reprenant ce titre et répétant inlassablement la même chose » http://www.google.fr/search?hl=fr&safe=off&client=firefox-a&hs=Te6&rls=org.mozilla%3Afr%3Aofficial&q=strauss-kahn+%22la+tunisie+est+un+bon+exemple+%C3%A0+suivre%22&aq=f&aqi=&aql=&oq=&gs_rfai= ).

Il vous suffira de cliquer sur les liens pour savoir qui est à l’initiative de cette gentille orchestration.

Qu’en conclure ?

Sans doute qu’en 2008 DSK avait mis un peu trop d’espoir ou de diplomatie dans ses propos. Dont acte, au moins cela confirme-t-il qu’il n’a pas toujours raison et qu’il a besoin d’une équipe avec lui.

Mais aussi, qu’hélas, un bon nombre de militants manquant substantiellement d’arguments sont prêts à surfer sur le malheur des autres pour alimenter leur tambouille locale.

Et qu’au final, le PS ferait mieux d’être un peu plus courageux en matière de relations étrangères, qu’après la Côte d’Ivoire c’est la Tunisie qui nous interpelle, et que la désespérance des peuples ou les égarements des gouvernants valent une meilleure réponse que celle qui est actuellement donnée.

Il y a du boulot, la refondation que j’appelle de mes vœux, c’est aussi cela.

Gagner en 2012 !

En réponse à différents commentaires toujours aussi violents que peu constructifs, je vous renvoie à un texte diffusé entre autres sur le blog de Jean-Jacques Urvoas et qui traite de la campagne de 2012, de notre envie de la gagner (j’espère que cette envie dépasse au PS le seul courant social-démocrate !).

Ce texte est celui d’un courant du PS, courant qui aura quoi qu’il arrive son candidat, courant connu pour son attachement à la réflexion, à la modération, au dialogue, entre autres bonnes choses.

Bonne lecture et avec un peu d’avance, bonne, très bonne, excellente année 2011 (en attendant 2012) !

Slate.fr place Dominique Strauss-Kahn à la 2ème place du classement des penseurs de ce monde. Et le PS ?

DSK classement des penseurs du monde Slate.fr (site spécialisé sur l’analyse des relations internationales Foreign Policy) publie pour la deuxième année son classement des 100 «penseurs mondiaux».

Et qui trouve-t-on à la deuxième place ? Le directeur du FMI, ex aequo avec Robert Zoellick (le patron de la Banque mondiale) récompensé entre autre pour avoir «réussi à empêcher la faillite de la Grèce, de la Hongrie, du Pakistan et de l’Ukraine sans entraîner trop de résistance» et avoir «imposé sa marque sur la géopolitique en convaincant l’Allemagne de s’impliquer pendant la crise grecque et en participant à empêcher une guerre monétaire internationale».

Le deuxième Français est une Française, Christine Lagarde qui n’apparaît qu’en 22ème place. On n’y trouve pas Nicolas Sarkozy (tient pourquoi ?) alors que Barrack Obama est juste derrière DSK.
Dans le match du leadership international entre Sarkozy et DSK, ce dernier a encore marqué un point.

Le directeur général Carlos Lopez de l’Institut des Nations unies pour la formation et la recherche (UNITAR) rend hommage à DSK. Et le PS ?

DSK sera le 8 décembre le prochain grand invité des “Rendez-vous mondiaux de Genève”, organisés par l’Institut des Nations unies pour la formation et la recherche (UNITAR).

Son directeur général Carlos Lopes explique les raisons du choix qui s’est “naturellement” porté sur Dominique Strauss-Kahn.

Cet extrait est tiré d’un article publié sur le blog de la TSR.

Peut-être cela aidera-t-il certains socialistes à sortir de leur enfermement et regarder au-delà des apparences et des habitudes.

Tiens, la France a déjà changé de président !

Notre ventilateur élyséen vient de gratifier le monde d’un acte manqué fort révélateur. Figurez-vous que le sommet du G20 qui est en train de s’ouvrir en ce moment même, s’ouvre sans le grand homme.

Faut-il y voir un effet secondaire gaulliste, personnage auquel il a essayé, sans rire, de s’idendifier ces derniers temps ?

Faut-il y voir le plaisir de faire quelques tours et détours avec son tout nouveau Air-Sarko-Zéro avant d’aller en Corée ?

Ou finalement, considère-t-il qu’il s’est déjà auto-remanié et qu’il n’est plus à la tête du pays (pour peu qu’il y ait jamais vraiment été) ?

En tout cas, les Coréens qui nous attendent pour nous transmettre la présidence du G20 sont quelque peu chagrinés par la légèreté du Top Gun Elyséen.

Bah, tout cela n’est pas bien grave, DSK est lui bien sur place, il est au courant des affaires du monde, comprend quels en sont les problèmes, et cela sera une bonne occasion pour les chefs d’Etat présent de prendre un peu d’avance en l’appelant Mister Président Strauss-Kahn.

Une vie, mille vies, une histoire de France

C’est l’histoire d’une vie, ou de plusieurs mêlées qui en bien des points est aussi un bout d’histoire de la France, à moins que ce n’en soit son essence tout entière.

Ces souvenirs qui ne sont pas entièrement les miens mais qui sont un bout collectif de mon héritage, se réveillent au matin d’une date anniversaire le temps d’une commémoration, le temps d’un oubli de l’oubli que la bienséance croit devoir obliger.

De Gaulle

Ce matin le grand Charles est mort. Mais a-t-il jamais vécu celui qui pour beaucoup n’est qu’une statue au rond point d’une trop large avenue, une image sépia, une voix de gramophone ? De cet homme a survécu le temps qu’il avait décidé d’achever, le temps où le poète s’appelait Camus, où le vent s’appelait Harmatan et apportait des parfums de silice mêlés d’épices oubliées, apportait aussi l’écho de la révolte des peuples soumis à la botte salvatrice du colonisateur, demi-dieu usurpateur trop sûr de sa supériorité pour voir dans les yeux des presque-esclaves la possibilité d’un avenir rédempteur.

En ce temps-là, l’homme blanc, qu’il soit né sur la terre coloniale ou que son enfance ait été happée au hasard des voyages d’un père envoyé construire une route à Tunis, un port à Agadir, ou militaire à Alger, cet homme blanc semblait être invariablement contaminé par un je-ne-sais-quoi intemporel local que le citoyen d’après l’histoire ne peut que pressentir, ou ressentir au hasard d’un instant que ceux qui vécurent la-bas laissent filtrer comme un effluve de leur passé. Mon père n’a passé là-bas que le temps d’une guerre qu’il n’avait pas souhaitée, mais lui aussi avait ramené dans sa mémoire des ciels gorgés de lumières, des terres vastes et sèches, des senteurs hélas mêlée d’odeur de poudre, de sueur et de sang. L’empire était trop grand pour l’homme blanc qui, trop sûr de lui, avait oublié de rester humble devant l’histoire des peuples. Pour l’avoir oublié, il s’est cru ensuite devoir pêcher par excès d’humilité en ne partageant pas assez les souvenirs de ce qu’il y avait de beau et de bon là-bas. La terre a tremblé, la fureur nous a chassé.

alger

En ce temps-là, l’homme blanc était chrétien et triomphant, il donnait au juif le droit d’être un citoyen besogneux de l’empire mais refusait à l’indigène la citoyenneté, parce que l’indigène d’Afrique du nord avait adopté la religion des descendants de la servante et non celle de la femme du maître. Oh République, mère-enfant, que de maux t’aurais-tu épargnés si tu avais eu foi en la laïcité ! L’empire fut déchiré, le citoyen a presque été réhabilité, mais le mal est resté telle une infection chronique et honteuse : le chrétien myope de plus en plus matérialiste regarde avec méfiance le supposé sioniste séditieux et le musulman potentiel paria terroriste. Peu importe que le juif apprenne à parler l’arabe, que le musulman porte fièrement les couleurs de la France, ou que le chrétien se laisse prendre par la langueur de Marrakech le temps de quelques vacances, ceux-là ne s’aiment pas même s’ils ne savent pas pourquoi.

Est-ce vraiment mon histoire, moi qui suis de ce temps-ci ? Qu’ai-je à voir avec ceux qui hier se sont haïs et aujourd’hui s’évitent ? Rien, si ce n’est que ce matin le grand Charles est mort, que des bribes d’histoire me sont revenues à ma mémoire, que ce chrétien égaré, ce juif errant ou ce musulman caché, je les ai croisé dans mon présent, qu’il y a parmi eux des hommes qui sont mes amis et des femmes que j’ai aimées, qu’ils sont d’aujourd’hui avec des liens qui mènent à un passé que nous avons tort de vouloir oublier. Les colonies sont évanouies, mais n’oublions pas la part noble que nous y avons laissé. Elle est toujours là, elle n’attend qu’une ondée de l’histoire pour faire refleurir ces prairies pas si lointaines.

Des faits en réponse aux fantasmes

Je n’avais pas spécialement l’intention de faire 2 posts sur Dominique Strauss-Kahn en une semaine, mais l’actualité et surtout la lecture d’un certain nombre de billets écrits manifestement sur une autre planète m’y incitent fortement.

L’actualité, c’est la visite officielle du directeur du FMI à Alger le 4 novembre dans le cadre d’un séminaire international.

Les billets d’une autre planète sont ceux qui essaient de construire une littérature autour de DSK le “droitiste ultra libéral, qui ne jure que par la finance et n’a que faire du petit peuple qu’il opprime et saigne à blanc”. Ma phrase pourrait n’être qu’un effet de manche caricatural si elle n’était pas bien en dessous de la prose de certains.

Comme d’habitude, regardons les faits, ou plutôt en l’occurrence les écrits, à savoir quelques extraits du discours de DSK à Alger.

Le petit peuple ne l’intéresse pas ?
Dans le monde entier, la création d’emplois est l’une des principales tâches qui s’imposent aux autorités (…) Le chômage n’est pas seulement un grand problème économique, c’est aussi un grand problème social — dont le coût humain est énorme pour tous ceux qui perdent leur emploi et pour leur famille.

Seule la finance du moment l’intéresse ?
Mais les dépenses doivent s’effectuer à un rythme mesuré. Cela permettra de préserver la stabilité macroéconomique, c’est-à-dire notamment de maintenir le taux de change réel à un juste niveau. Cela permettra aussi aux générations futures de bénéficier des recettes tirées aujourd’hui des ressources naturelles non renouvelables.

Le FMI est toujours l’organisation ultra-libérale qui saigne les peuples et soutient les dictatures ?
La transparence est une première étape importante de la responsabilisation — et c’est une question à laquelle le FMI aide à donner toute son importance. Pour soutenir les efforts que les pays membres déploient dans ce domaine, nous avons élaboré le Guide sur la transparence des recettes des ressources naturelles ainsi que le Code de bonnes pratiques en matière de transparence des finances publiques. Nous fournissons aussi une formation et une assistance technique aux pays membres en mettant à profit nôtre expérience étendue de ces questions dans le monde entier.

Voilà quelques éléments de ce qui a été dit par DSK à Alger, voilà quel est vraiment le discours de Dominique Strauss-Kahn.