Qu’est-ce qu’être « de gauche » ? Mélenchon, Royal et DSK

Pour essayer de contrer l’attente qui monte des Français depuis plusieurs mois déjà, ses adversaires politiques de gauche pensent avoir l’argument imparable qui tue : DSK ne serait pas de gauche (sous-entendu, donc la gauche ne peut pas le choisir et voter pour lui).
Il semble que deux groupes en particulier se soient appropriés cet argument : la gauche que j’appelle radicale dont Jean-Luc Mélenchon semble devoir devenir le héraut, et certains royalistes semblant ne pas accepter la décision de Ségolène Royal de ne pas se présenter contre Dominique Strauss-Kahn en 2012.

Au-delà du positionnement tactique de chacun, il est intéressant de se demander ce qu’est être de gauche avant de jeter l’anathème sur tel ou telle.

Adoptant la méthodologie d’un bon étudiant à l’esprit ouvert, je me suis d’abord intéressé à ce que les autres répondaient à cette épineuse question.

Une étude TNS Sofres de 2005 en France posant à 1000 personnes la question « Pour vous, être de gauche, aujourd’hui, qu’est-ce que c’est, qu’est-ce cela veut dire ? » a montré que :
– 27% des gens de gauche ont répondu : « Le social : “faire du social”, “faire plus de social” »
– 17% des gens de gauche ont répondu : « Le dialogue, l’ouverture, l’écoute : “être à l’écoute des citoyens, des hommes, des individus”, “c’est prévoir, c’est le dialogue” »
– 12% des gens de gauche ont répondu : « L’aide aux plus fragiles : “aider les plus démunis”, “aider le peuple”, “aider les pauvres” »

→ social, dialogue, écoute, prévoir, aider

Du point de vue économique

Être de gauche, c’est être anti-libéral, notion très vague finalement dans l’esprit des gens, mais qui peut se résumer à un refus de la liberté totale du marché, voire pour certains secteurs refuser la marchandisation. Suivant les tendances, cela signifiera refuser une quelconque liberté du marché (gauche révolutionnaire) avec des nuances qui aboutiront à l’autre bout du spectre, à une régulation du marché, régulation déterminée par l’intérêt général (position social-démocrate). Naturellement, pour la gauche révolutionnaire, la social-démocratie sera considérée être à droite (et affublée du doux nom de social-libéralisme).

En ayant une considération particulière vis à vis des plus faibles, la gauche se veut plus morale que la droite dont la finalité économique est d’abord de permettre à l’individu de réussir même si cela signifie que les plus faibles perdent. La révolte contre l’injustice est une attitude classique, la volonté de réforme en est une conséquence. À la notion de justice sociale, la droite répondra plutôt par la notion de charité, acte individuel là encore.

→ agir sur le marché dans le sens de l’intérêt collectif, réformer

Être de droite en matière économique c’est d’abord n’entraver en rien le marché, ni par la réglementation, ni par l’impôt. Le marché doit être « pur », il existe une justice immanente (« la main invisible du marché »).

→ liberté absolue, laisser-faire le marché

Du point de vue « référentiel mental »

A gauche on se réfère à la famille en tant que groupe, au cadre social, à la société citoyenne, l’individu est largement contraint par son environnement. L’individu est d’abord un citoyen qui a des droits et des devoirs vis à vis du groupe.
L’homme de gauche veut agir avec force sur son environnement pour le changer et améliorer le sort de chacun, en particulier des plus faibles.

Du point de vue individuel, le combat de gauche est d’abord celui de l’émancipation et la construction de la possibilité d’un choix libre et éclairé : c’est en ce sens que l’éducation a un sens très important pour l’idéologie de gauche. L’émancipation permet également à l’homme de gauche d’être et d’agir potentiellement en dehors de la décision d’un pouvoir politique.
Cette émancipation permet également à l’homme de gauche de ne pas être contraint par sa naissance. Comme le dit Jean-Luc Mélenchon «On a connu de grands bourgeois de gauche et des prolétaires d’extrême droite. Bien sûr, la condition sociale joue un grand rôle dans la perception de l’existence, mais on ne peut pas réduire un homme à cela. »

→ l’individu se définit par rapport au groupe, émancipation, agir et réformer le groupe

À droite on se réfère à l’individu qui est seul arbitre de ses choix, et au chef (ce qui est un peu paradoxal). Le chef est le représentant de l’ordre : l’ordre, la justice, l’intégration par l’uniformisation des comportements depuis le jeune âge (voir les mouvements scouts par exemple) sont les outils de structuration de la société de droite. L’individu en toute occasion dispose de son libre-arbitre (héritage chrétien), libre arbitre cependant contraint par l’ordre rigide et omniprésent de la société.

→ Le triptyque travail (individu libre de son sort et donc de construire son avenir), famille, patrie (chef, autorité) est un bon résumé du référentiel mental de la droite. Au nom de l’ordre établi, l’homme de droite est plutôt conservateur.

Alors, sont-ils de gauche ?

Jean-Luc Mélenchon Ségolène Royal Dominique Strauss-Kahn
social Élément important du discours Élément important du discours Élément important du discours
Dialogue, écoute Vision musclée du dialogue Vision ambiguë du dialogue Dialogue et contrat sont les outils classiques des sociaux-démocrates
Prévoir La planification était l’outil classique de la gauche « radicale », est-ce toujours le cas ? ? DSK essaye d’introduire un système d’assurance pour gérer les risques de la finance mondiale
Aider / solidarité Élément important du discours Élément important du discours Élément important du discours
agir sur le marché dans le sens de l’intérêt collectif Oui, adepte de l’autorité de l’État Idéologie peu claire : entre blairisme et social-démocratie de l’Europe du Nord Oui, adepte de la régulation qui structure et oriente le marché.
agir et réformer le groupe L’État fort pour réformer la société
Conservateur en matière d’évolution idéologique.
Vision d’un État fort mais décentralisé ?
Conservateur dans certains de ses choix (système présidentiel par exemple).
Prendre les problèmes à l’origine pour changer la donne : politique de la petite enfance. Doctrine du réformisme radical.
l’individu se définit par rapport au groupe oui Confus : DA est un organisme de promotion du chef. oui
émancipation ? Confus : référence à des outils de droite (encadrement militaire) Oui
liberté absolue Refus Refus Refus
laisser-faire le marché Refus Refus Refus
travail Valeur non marquante dans le discours Valeur non marquante dans le discours Valeur non marquante dans le discours
Famille ? Exemple personnel donnant une vision déstructurée de sa conception de la famille. A fini par prendre position pour une évolution du mariage homosexuel. Attaché à la famille et à son évolution (mariage homosexuel)
Ordre / Autorité non Ordre « juste », tribunaux citoyens, autorité du chef non
Le chef vs le groupe Le groupe Le chef Le groupe

Même si mon tableau peut être sujet à caution (nulle doute qu’il sera contesté), on voit tout de même sans ambiguïté que DSK n’a pas grand-chose d’un « homme de droite ».
En fait cette étiquette lui vient très probablement de sa formation d’économiste, d’ex-ministre au Minefi et naturellement directeur du FMI : toutes ces « boîtes » sont étiquetées à droite dans l’imaginaire collectif et finalement, Marx le grand bourgeois théoricien de l’économie pourrait sans doute être taxé d’homme de droite lui aussi…

Sur le fond, le réformisme radical, le contrat négocié, l’attachement au groupe plus qu’à l’individu, l’importance du social dans la vision de l’économie et de la société font de Dominique Strauss-Kahn un homme qui appartient idéologiquement à la gauche, mais à une gauche en évolution, pas à une gauche crispée sur des outils du siècle dernier. Sur les points particuliers de l’ordre (élément principal pour Bourdieu) ou de la vision globale du général à l’individu (élément principal pour Deleuze), DSK apparaît là aussi comme un homme de gauche, largement plus en particulier que Ségolène Royal qui a fait de l’ordre juste son crédo.

Bourdieu : Royal est de droite Deleuze : etre de gauche

Après ce petit comparatif à partir de critères et non d’anathèmes, chacun pourra regarder les campagnes de communication des comités en gauchitude à leur juste valeur. Mais sur le fond, on ne juge pas un homme politique à l’étiquette qu’on lui colle, mais à son parcours, à ses connaissances et compétences avérées, à sa capacité démontrée à avoir amélioré le sort de chacun, à sa bonne volonté, à l’équipe qui l’entoure et enfin à la promesse d’avenir qu’il porte.

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sources :
Terre Politique
Médiapart
Nouvel Obs
Vidéo de Gilles Deleuze
Débat Moscovici/Mélenchon
Bourdieu

Pauvre France, décidément…

Je lis ce matin une brève annonçant la naissance du portail France.fr, portail officiel de notre pays aillant comme ambition de servir de vitrine pour renseigner les touristes, les étudiants ou les entreprises étrangères.

Curieux et intéressé de voir enfin une initiative voulant montrer un beau visage de notre pays, je clique avec intérêt et j’arrive sur ceci :

Portail France.frEn plus, ils n’ont même pas été fichu de mettre une carte de France correcte (à moins que la Bretagne et le Nord aient fait récemment sécession) ! Pauvre, pauvre pays qui est le mien décidément. Je ne sais pas quel ministère est en charge de ce truc mais il semble bien qu’en Sarkozye, il n’y en a pas un pour relever les autres…

Lorsque Sarkozy renouvelle les séries comiques de l’été

Comme c’est l’été, la télé nous a offert hier soir une de ses éternelles redifusions mais avec une évolution en forme de parodie politique de la filmographie de Louis de Funès et des comédies bien françaises.

Le film

Commençons par le décor inspiré à l’évidence de cette scène de la cage aux folles où la salle à manger kitch et olé olé a été remplacée pour l’occasion de la venue de Galabru (notable et politicien) par un décor on ne peut plus monacal. Qu’on se le dise, le moment se voulait grave et profond.

Le jeu d’acteur

Pour le film lui-même, il faut bien avouer que le scénario était convenu mais que l’acteur s’est employé à nous montrer tout son talent :

D’abord touché, sombre, soucieux, presque triste sur l’affaire Bettencourt / Woerth. Ah quelle belle envolée tout de même lorsqu’il réitère sa confiance à Eric Worth, homme honnête et compétent. Quelle sollicitude lorsqu’il lui conseille, juste un conseil pas un reproche ni même un ordre, de mettre fin à ce petit problème de conflit d’intérêts. On attend avec impatience le jour où Sarkozy réitèrera ce même conseil en direction d’Alain Marleix, secrétaire d’Etat à l’intérieur et aux collectivités, en charge de la nouvelle carte électorale et accessoirement secrétaire national de l’UMP en charge des élections, ou encore d’un certain Nicolas, à la fois président de tous les Français et accessoirement président de l’UMP.

L’instant tragique

Et puis il y a aussi l’indignation limite colère pour défendre Liliane et s’emporter contre ceux qui n’aiment pas l’argent.

L’acteur est ici très bon mais on s’étonnera que le scénariste ait été si peu crédible : je pense qu’il doit s’agir d’un scénariste américain qui ne comprend pas très bien la culture judéo-chrétienne…

Excellent également le coup de mamie Liliane payant une montagne d’impôts : des millons chaque mois (en fait moins de 20% de son revenu semble-t-il). Par contre on ne peut qu’être choqué par cette scène où l’acteur affirme une fois de plus sa détestation de la famille en jugeant anormal, presque indécent, de bénéfier à la fois de l’allocation logement et d’une demi part d’IRPP.

La meilleure blague

Ma scène préférée restera sans doute celle où, dans une réplique digne d’Audiard, Nico nous fait ce merveilleux lapsus au début du film à propos de Courroye en mélangeant les fonctions de juge et de procureur. Décidément, il a bien fait d’arrêter d’être avocat (mais il aurait dû choisir autre chose que président…).

On ne vantera jamais assez le comique de situation !

Les faiblesses du scénario

La scène nous expliquant les raisons de la panade économique actuelle me semble un peu trop cliché et ne convaincra que les spectateurs peu cinéphiles : on y apprend que tous nos maux économiques ont un nom : les 35h (malgré les 8 ans que l’UMP est au pouvoir tout de même…). Le scénario trop court manque ici terriblement de crédibilité.

Même problème lorsque Sarkozy se présente à la fois comme celui qui a imposé contre vents et marée le maintien de l’ISF et celui qui tiendra jusqu’au bout pour maintenir le bouclier fiscal (dont la justification est l’existence d’un ISF supposé confiscatoire). Ce n’est ni cohérent ni crédible.

Un nouvel opus ?

Pour la suite, je suggèrerai un peu plus de glamour et plus d’action et de musique : c’est l’été après tout et il faut bien oublier un temps les mois calamiteux que nous venons de vivre !

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Vous trouverez [ ici ] et [ ici ] quelques critiques sur l’incohérence du scénario.

Lettre à mes camarades sociaux-démocrates et à nos sympathisants

Socdem

L’été va tant bien que mal marquer une pause dans le débat politique, et après la pause viendra le temps de la montée en puissance du grand marathon qui nous amènera en 2012.

Depuis ces dernières semaines, nombre d’initiatives voient le jour, individuelles autant que collectives, venant d’anonymes autant que d’élus du PS socdem (Christophe SIRUGUE, Maire de Chalon-sur-Saône, député de Saône-et-Loire, Benjamin GRIVEAUX, conseiller général de Saône-et-Loire, Céline PINA, conseillère régionale d’Ile-de-France, Françoise TENENBAUM, adjointe au Maire du Dijon, conseillère régionale de Bourgogne, Françoise VERJUX-PELLETIER, adjointe au maire de Chalon, conseillère générale de Saône-et-Loire, Jean-Renaud ROY, militant, fédération du parti socialiste de Paris, pour ne citer que les acteurs du dernier appel) ou n’ayant pas jusqu’ici affiché une étiquette particulièrement marquée social-démocrate (Jean-Pierre Mignard pour ne citer qu’un des plus étonnants).

Les initiatives fleurissent, les groupes de soutien essaient de se constituer, les blogs se réveillent et, nouveauté de cette future élection, les groupes estampillés DSK sur la coopol font florès (plus d’une douzaine avec le label DSK). Belle volonté, bel enthousiasme, espoir revigorant.

Je crois que le temps est donc venu de penser à coordonner tout cela pour nous rendre visible, lisible, attractif, tout en respectant l’esprit de la social-démocratie, et c’est là que ma lettre prend son sens. Le mouvement social-démocrate que nous avons commencé à réformer, rénover, refonder, est un mouvement qui est excellemment représenté par des hommes et des femmes de qualité, mais des hommes et des femmes de qualités qui s’identifient à nos idées et pas l’inverse. Et pour ce qui concerne la prochaine échéance, il est trop tôt pour l’heure de nous identifier ou de n’être identifiable qu’à travers un candidat qui n’est pas déclaré et qui n’a aucun intérêt à le faire avant l’année prochaine.
Par contre il est plus que temps de préparer le terrain pour ce candidat, de rendre vraiment identifiable le mouvement qui est le nôtre aux yeux des militants PS, des sympathisants et de tous les français en attente d’un renouveau politique, et de faire clairement comprendre quels sont nos idéaux :

  • l’humaniste et l’esprit des lumières comme morale et non la religion,
  • une société de citoyens solidaires et non un groupe d’individus en compétition perpétuelle,
  • la raison, la volonté et les compétences et non l’irrationalité et le spectacle,
  • l’égalité de tous et l’équité pour chacun et non le corporatisme ou la loi du plus fort,
  • la liberté économique encadrée par une régulation dans l’intérêt commun et non le renoncement néo-libéral ou le collectivisme d’État,
  • la liberté individuelle respectueuse de l’autre et de la loi et non l’État tout puissant, l’État policier, le gouvernement des juges, l’ordre moral ou militaire
  • la réforme radicale, progressive, continue de la société et non la révolution ou le renoncement

Il est plus que temps de faire clairement comprendre quels sont nos outils :

  • le dialogue et non l’injonction,
  • la négociation et non l’imposition du point de vue le plus fort,
  • le contrat et non le dictat ou la vérité révélée
  • la réflexion et le travail collectif et non le verbiage populiste
  • la pédagogie et non la violence de l’imposition des décisions

Au-delà des principes et des outils, il nous faut constituer un réseau socdem identifiable, ce qui me semble vouloir signifier :

  • afficher la présence de figures morales de la social-démocratie, c’est-à-dire des figures éloignées de la polémique et dont la vie au service de nos idées les honore et honore notre mouvement. Alain Bergounioux et Catherine Tasca me semblent parfaitement illustrer cet aspect, et je suis sûr qu’ils ne sont pas les seuls à le pouvoir. Que ces militants de tant de combats et de victoires soient nos juges de paix lorsqu’il nous faudra avoir du recul au milieu de la bataille, que ces grandes figures soient garantes de la grandeur de nos ambitions et de notre probité,
  • remobiliser les cadres actifs socdem, cheville ouvrière de la construction de notre mouvement : je ne peux que souhaiter que Jean-Christophe Cambadélis et Pierre Moscovici reprennent leur action interrompue et qu’ils soient rejoints par tant d’autres qui aujourd’hui montrent leur volonté de faire gagner nos idées : Collomb, Destot, Huchon, Patriat, Sabban, Trautmann, Touraine, Urvoas, et tant d’autres qui me pardonneront de ne pas pouvoir les citer tous.
  • et de façon plus pragmatique nous donner un outil fédérateur sur internet, un point administratif d’entrée, un visuel socdem, du matériel de campagne, …

La campagne pour les primaires aboutira à désigner un candidat. Le temps des sociaux-démocrates est arrivé mais ce candidat, quelles que soient ses qualités, quelles que soient ses capacités, quelles que soient ou aient été ses responsabilités nationales et internationales, ne nous affranchit pas de faire notre travail. Dans ce moment du calendrier, c’est à nous d’être à la hauteur de nos espoirs, c’est à nous d’être à la hauteur du candidat que nous exigeons d’avoir. Ne retombons pas dans les erreurs passées du PS : il n’existe pas de sauveur capable à lui seul de pallier nos déficiences. Par contre, si nous sommes capables de montrer qui nous sommes vraiment, de sublimer le travail de réflexion largement entrepris depuis 2006, de dissiper le brouillard de fantasmes répandus par nos adversaires au profit de la vérité nos idées, alors le chemin sera grand ouvert pour le candidat d’exception que nous aurons mérité et que nous appelons de nos vœux, alors l’appel sera tellement puissant que sa candidature sonnera comme une évidence, au bon moment.

alain-bergouniouxTascaDSKSabbanmoscoviciTourainecambadelistenenbaumdestotTrautmannurvoas

Bataille pour la succession de Sarkozy : Copé 1 – D2V 1

Comme je l’avais évoqué dans mon post précédent, la bataille pour le leadership de l’UMP a commencé.

C’est François Copé qui a dégainé le premier en infligeant un camouflet à Eric Woerth et au gouvernement en rejetant sa loi sur le dialogue social dans les TPE.

Ce matin, c’est au tour de Dominique de Villepin de poser des banderilles à France Info :

– Il appelle à la résolution du problème de conflit d’intérêts d’Eric Woerth, rappelant s’il en était encore besoin que les responsabilités de trésorier d’un parti politique sont incompatibles avec un exercice ministériel (on notera à ce sujet l’absence de réaction du gouvernement, ce qui laisse penser à un sérieux aveu de faiblesse). Il en profite au passage pour tacler Nicolas Sarkozy en jugeant qu’il n’était pas sain et normal de se comporter ouvertement comme un chef de parti lorsque l’on est Président de la République.

– Deuxième élément en direction à la fois de Nicolas Sarkozy et de François Copé, il évoque un malaise au sein des parlementaires UMP et ne rejette pas l’idée de la constitution d’un groupe Villepiniste.

– Enfin, il continue de régler ses comptes en dénonçant à mots à peine couverts la “proximité” des pouvoirs politiques et judiciaires dans l’affaire Bettencourt à travers les liens entre Nicolas Sarkozy et le procureur de la République.

Le parlement semble donc être le champ de bataille de la conquête de l’UMP, et pour l’heure, avec un gouvernement en déconfiture les troupes encore fidèles à Nicolas Sarkozy semblent être réduites au rang de spectateur, à moins qu’elles n’aient tout simplement disparues…

Voici l’interview de D2V sur France Info :

D2V France Info

Dissolution, Démission, Elections anticipées

FranceBruno Roger-Petit a publié un post émettant trois hypothèses suite à la dislocation en vol de l’Airbus Sarkozy : dissolution de l’assemblée nationale, démission de Sarkozy, élections présidentielles anticipées. Comme ma réponse est un peu longue, je la publie sous la forme d’un nouveau post.

Dissolution de l’AN : c’est un coup possible (à la Chirac) que j’avais envisagé il y a déjà plusieurs mois chez Moscovici. L’idée est de perdre (assurément) la nouvelle législative pour se refaire une santé à travers une cohabition. Le problème étant pour Sarko un peu plus complexe puisqu’il s’agirait d’une double cohabitation : avec le PS mais aussi avec son parti qu’il a largement entrainé dans le trou, déçu et pire encore ici, totalement discrédité. Il faudrait dans l’absolu pour que cela marche un gouvernement d’union nationale et réussir in fine a apparaître comme le sauveur. Plus que délicat pour qui a tout raté depuis 2007.

Démission de Sarko : depuis le départ une telle hypothèse se pose (du moins je me la pose depuis 2007 et n’est-ce pas Léotard qui a écrit “cela va mal finir” ?), elle devient plus crédible mais Sarko n’est pas là pour la grandeur ou un dessein pour la France. Ce qui l’intéresse c’est lui, il sait qu’il n’a plus vraiment de chance d’être réélu, il fera tout pour rester à l’Elysée, quitte à ne plus gouverner.

Élection anticipée : même si j’avais tord pour la démission de Nicolas Sarkozy, elle n’interviendrait qu’au bout de plusieurs mois de bataille (pour l’heure, aucune instruction judiciaire n’est ouverte sur les effets collatéraux de l’affaire Bettencourt), voire une bonne année. Or l’élection présidentielle n’est plus très éloignée et l’on pourrait sans doute à quelques mois près, conserver le calendrier prévu.

Politiquement, quels en seraient les impacts ?

Clairement cela signifierait une purge sanglante au sein de l’UMP avec une lutte entre Copé et D2V pour le leadership du parti. Il n’est cependant pas certain que l’UMP y survivrait et il est plus probable qu’un de ses partis satellites récupère la mise.

Pour le PS, cela simplifierait un de ses problèmes techniques qui est celui de l’organisation d’une primaire qui comme je l’ai montré, souffre d’un vice intrinsèque qui est celui de l’impossiblité de garantir l’équité des candidatures. Lâche soulagement…

Enfin, point finalement le plus important au regard de l’histoire, cela signifierait un marqueur important de la lente agonie de la Vème République dont les principes fondateurs ont perdu de leur force, et ici de leur probité, à force d’être tordus, amendés, contournés. Que manque-t-il aujourd’hui à cette Vème République ? Un vrai contre-pouvoir moral, le regard sévère de la probité et de l’intérêt général, la hauteur et le recul garants de la grandeur et de l’honneur de la France.

DSK, une bière et deux barjots

DSK Moscovici Melenchon

L’express vient de publier une interview-débat entre Pierre Moscovici et Jean-Luc Mélenchon, débat faisant suite à la diatribe de Mélenchon au sujet de Dominique Strauss-Kahn, envolée dont je m’étais fait l’écho il y a quelques temps.

Je trouve pour ma part l’échange excellent. Mélenchon est souvent excessif mais il sait débattre sur le fond et évite la mousse des idées faciles comme on peut le constater avec sa réplique sur le salaire de DSK. Il sait aussi acter des succès comme les batailles menées avec brio par DSK sous le gouvernement Jospin. Nous sommes loin des réactions de certains militants qui sautent sur n’importe quel argument du moment que cela a une chance, même illusoire, de ternir l’adversaire.

Sur le fond, j’en reste à une de mes anciennes idées : l’alliage entre social-démocratie et gauche « radicale » est très complexe à réaliser, mais il est possible et si nous le réussissons alors nous serons invincibles. Je me suis retrouvé quelques fois à ferrailler avec eux contre nos adversaires pour nos valeurs (j’ai en particulier le souvenir de l’histoire de la Shoah au CM2 que Nicolas Sarkozy voulait imposer suite à je ne sais quelle évaporation de tout jugement moral) et à chaque fois je me suis retrouvé avec des militants en qui je pouvais avoir confiance dans la bataille.

Camarades de la gauche radicale vous m’exaspérez sans doute autant que nous vous exaspérons mais nos valeurs profondes sont les mêmes et c’est ensemble que nous pourrons les défendre et progresser. Alors continuons sans doute de nous engueuler autour d’un verre, mais allons ensemble au combat.

Retraites : le gouvernement Sarkofillon joue de la vuvuzela aux Français

Vuvuzela umpLe gouvernement Sarkofillion a annoncé ce matin par la bouche d’Eric Woerth ses décisions en matière de retraite. Pas grand chose de fondamentalement neuf par rapport à ce qui était pressenti, en synthèse un volet pour augmenter les prélèvements et un volet administratif pour ajuster le moment où l’on entre dans la case retraite.

Une chose m’agace suprêmement : si le volet des prélèvements sera applicable dès l’an prochain, la majorité du dispositif prendra effet en… 2018.

Huit ans, soit une décision UMP qui ne sera ni appliquée pendant le mandat Sarkozyste, ni pendant le mandat suivant.

Huit ans d’attente pour résoudre un problème calamiteux aujourd’hui.

Une décision prise sur la situation connue d’aujourd’hui pour une situation que l’on ne connaît pas dans huit ans (car le problème est initialement démographique mais ne se résume pas à cela !).

Sarkofillon prétend décider de la politique d’un gouvernement en place dans huit ans alors qu’il n’arrive pas à donner le début d’une décision efficace pour aujourd’hui. Cela tient de la fuite en avant à la vitesse de la lumière !

Je trouve cela d’une irresponsabilité sans nom ! Depuis 2002 et jusqu’à il y a peu, l’UMP nous expliquait que tout allait bien et que les déficits avaient du bon. Mais à force d’irresponsabilités et surtout suite à une sanction-avertissement des marchés qui se sont acharnés sur la Grèce parce que c’était l’élément faible du troupeau européen, Sarkozy semble avoir été saisi d’un doute, donc il décide de prendre des mesures pour… 2018.

En l’état, la seule question à se poser est donc : qui l’UMP va-t-elle ruiner par cette inepte non-décision ?

Pour mémoire, voici deux petits films qui expliquent la position du PS : http://bloggy-bag.fr/presse/video.html