Le développement économique en Iroise III/III

Le numérique, le plus grand perturbateur du début du XXIème siècle

De nouveaux modèles économiques

Le premier bienfait de la révolution numérique est l’accès gratuit et universel à la connaissance, ce qui correspond à un progrès historique considérable. Qui contestera ici les bienfaits de la gratuité et de l’abondance, deux éléments caractéristiques de l’économie numérique ?

Mais il faut mettre cette révolution numérique au service des éléments « physiques » qui ont été jusqu’ici le support de l’économie classique et qui ne fonctionnent pas avec ce modèle. Ce problème peut être résolu par l’union de services numériques avec un élément physique traditionnel, les boitiers ADSL en étant sans doute l’exemple le plus largement répandu (nous payons pour les services internet, pas pour l’électronique du boitier). Cette nouvelle économie a déjà fait l’objet de travaux. Elle a été nommée « économie du quaternaire » par Michèle Debonneuil par exemple. Nous devons favoriser cette voie.

Cette économie semble devoir aussi se caractériser par une relocalisation de micro-productions au plus proche des consommateurs grâce à des machines outils alliant une haute technicité et une connexion directe au consommateur devenant un acteur direct de la chaîne de production des produits qu’il consomme. L’exemple de l’imprimante 3D qui sculpte du chocolat est peut-être le plus parlant. Il n’est pas très compliqué d’imaginer un système où le client envoie automatiquement une modélisation de son visage, paie pour lancer la fabrication puis va chercher sa tête en chocolat au coin de sa rue pour le repas familial.

On peut dégager divers éléments caractérisant la nouvelle industrie du quaternaire :

  • des machines-outils très paramétrables, de taille réduite et à faible coût
  • une implantation au plus près des consommateurs et/ou producteurs de matière première, parfois mobile,
  • des machines-outils connectées à un écosystème numérique performant (producteurs de matière première, partenaires, consommateurs)
  • un modèle d’affaires permettant la production de micro-séries voire de modèles uniques
  • une organisation du travail où les producteurs de matière première et les clients assument une partie de la R&D, du design, du marketing, de la commercialisation et de la logistique.

Le rôle des acteurs publics

Les outils numériques seront indispensables pour développer le livret carbone et permettre à chacun d’être responsabilisé face à son empreinte carbone.

Les outils numériques seront les compléments indispensables pour que les bienfaits de l’abondance énergique ne soient pas détruits par le gaspillage : les technologies de distribution intelligente de l’énergie électrique (smart grid) sont un exemple de ce que l’on sait faire pour répondre en partie à l’objection du gaspillage.

Mais de façon encore plus concrète et proche de nous, le numérique peut très rapidement changer le paysage économique de nos villes et villages du pays de Brest.

Le niveau de développement numérique des entreprises, particulièrement des TPE, PME, artisans et commerçants est à un niveau très en dessous de ce qui est optimal, et de façon générale, inférieur à ce qui se fait ailleurs en Europe. L’analphabétisme numérique est hélas un constat qui est doublement préjudiciable :

  1. les entreprises ne tirent pas les bénéfices d’une révolution qu’ils appréhendent mal
  2. ces entreprises se font concurrencer sur leur territoire par des entreprises géographiquement très éloignées qui elles ont compris les bénéfices de l’économie numérique

C’est aux politiques de remédier à cette situation, c’est à eux de tracer la voie de la solution et de faire ce qu’il faut avant que le désastre ne soit consommé. Une partie des actions à mener est relativement simple et peu coûteuse.

L’échelon politique local en charge du commerce et de l’industrie doit prendre à sa charge les infrastructures de développement numérique. En Bretagne cela a commencé à être fait à travers le plan de câblage haut débit, mais les tuyaux ne sont rien sans les contenus et les usages.

Il faut donc créer une plateforme numérique locale (au niveau des communautés de communes?) qui soit le point d’entrée du commerce numérique local et offre une vitrine à chaque entreprise. Cet espace doit être ouvert, largement paramétrable, évolutif. Si l’on prend une image par rapport à ce que font traditionnellement les communes, cet espace à créer doit être le pendant numérique des marchés traditionnels sur la place du village. Dans l’histoire, les communes qui ont su efficacement organiser leurs marchés ont été des communes riches.

Il faut de la même façon mettre en place des ateliers permettant aux acteurs économiques de tester les nouveaux outils tels que les imprimantes 3D, et de les aider à imaginer de nouveaux modèles d’affaire et à les rendre viables.

Nous sommes ici dans la sphère de compétence habituelle des collectivités, mais dans un nouvel espace à conquérir.

Il faut également organiser l’enseignement de l’économie numérique. La compréhension des nouvelles règles n’est pas en soi complexe, mais comment expliquer les bienfaits d’une bibliothèque à quelqu’un qui ne saurait pas que l’écriture existe ? La République a su gagner la bataille de l’alphabétisation avec des décisions fortes et ses « hussards », nous devons mettre en place un plan similaire.

L’Iroise a tous les atouts nécessaires pour relever avec succès ce défi. Nous avons les écoles de haute technologie, nous avons de jeunes entrepreneurs qui ne demandent qu’à déployer leur créativité, nous avons un tissu dense de TPE / PME. Il ne manque plus qu’une volonté politique éclairée.

Le développement économique en Iroise II

Le bilan carbone comme outil de gestion du défi climatique.

La première tentative de taxe carbone a avorté, en grande partie parce qu’elle mettait des territoires comme le pays de Brest dans des difficultés largement liées au surcoût des transports : espace majoritairement rural, éloignement géographique des centres de productions, réseau de transport ne permettant pas de se substituer à la voiture… Or tôt ou tard, il faudra utiliser l’arme fiscale pour gérer nos rejets de CO2.

Le choix qui se pose à nous est simple :

  • soit d’entrer en résistance pour sauver notre porte-monnaie à court terme, ce qui nous conduirait alors de façon certaine vers la catastrophe climatique
  • soit d’anticiper les mesures qui seront prises pour adopter très rapidement les bons comportements qui diminuent notre empreinte carbone.

Je défends pour ma part la seconde solution mais il faut rapidement mettre en œuvre un certain nombre d’actions :

  • promouvoir au plus près des citoyens une communication rationnelle et percutante sur nos rejets de CO2 et leur impact
  • se doter d’outils capables de donner un coût individuel en euros de nos rejets de CO2
  • favoriser les technologies et services qui permettent de faire des économies sur ces rejets

La bataille pour éviter à notre climat de ne pas avoir une température qui augmente de plus de 2°C est trop abstraite et improbable pour nos esprits : nous n’y croyons en fait tout simplement pas ou cela évoque au mieux une journée d’été ensoleillée. Or non seulement cette bataille est en passe d’être perdue mais en plus l’augmentation de température n’a rien d’idyllique et d’agréable. Il faut mettre en place des outils simples qui « parlent » à chacun, qui permettent de mettre en regard le CO2 que nous produisons ou que nous économisons avec quelque chose de simple et clair : un « livret carbone » valorisé en euros peut répondre à cet objectif. Ce livret serait crédité ou débité en fonction de notre comportement.

L’énergie, brique de base de l’économie

Même si son coût a nettement augmenté ces dernières années, nous sommes toujours dans une économie où l’énergie est abondante et bon marché. Et cela est excellent, je refuse le discours malthusien appelant au renchérissement de l’énergie pour gérer le problème du CO2.
Non seulement nous ne devons pas renchérir ce prix, mais nous devons au contraire faire tout ce qui est nécessaire pour diminuer ce prix pour idéalement l’amener à la gratuité pour la part qui est nécessaire à la satisfaction des « besoins vitaux » de chacun. Ceci est un idéal indispensable lorsque l’on prétend vouloir faire progresser notre société : l’action publique, à gauche au moins, doit viser à affranchir chaque citoyen des contraintes qui empêchent son émancipation et sa marche vers son développement personnel et citoyen.
En ce qui concerne les entreprises, l’objectif est différent mais l’impératif d’énergie à bas prix et abondante est le même. Chaque acte économique que nous faisons consomme de l’énergie. Chaque étape de fabrication ou de commercialisation cumule donc des surcoûts. On comprend alors que l’augmentation de l’énergie est un frein radical au développement économique, et que la pénurie « organisée » aboutit à l’impossibilité de croissance lorsque l’on a atteint le plafond énergétique autorisé. A contrario, une énergie abondante et peu chère est un argument concurrentiel majeur.
L’objectif est donc de développer les structures nécessaires pour disposer d’une énergie abondante et peu chère. Il n’en demeure pas moins que nous devons gérer différents les problèmes connexes déjà évoqués :

  • diminuer notre empreinte carbone (ce qui est vrai pour l’individu l’est bien sûr pour l’entreprise ou les collectivités)
  • ne pas mettre en péril nos écosystèmes en consommant plus de ressources qu’ils ne sont capables de produire.

Là aussi, l’Iroise dispose d’atouts non négligeables. Le pays est venté ce qui a permis de développer un réseau d’éoliennes terrestres. Il faut largement développer ce réseau énergétique offshore (éoliennes & hydroliennes, fermes cultivant les algues marines pour produire du bio-carburant, …). Mais il faut aussi trouver le moyen pour que la population tire un bénéfice direct de ce réseau, par des redevances payées par les exploitants par exemple. La population et les entreprises locales doivent bénéficier de la richesse climatique, ici la force des vents et des courants, c’est un bien commun dont on concède l’exploitation.
L’Iroise dispose également d’autres sources énergétiques pouvant être tirées du bois , de l’agriculture et de l’aquaculture. Ces secteurs ont l’avantage de capter du CO2. Il faut mieux organiser ces marchés.
Nous sommes clairement dans une zone géographique dont les atouts permettent d’arriver aux objectifs fixés, tant en matière de production, de coût, de réduction de l’empreinte carbone, d’abondance et de progrès pour toute la société.

Recherche sur une bio-ferme marine de production de carburant

La vidéo TED est en anglais, mais en synthèse :

  • Jonathan Trent présente un ensemble de recherches et de réflexions sur la production de bio-carburant à partir d’algues marines
  • Les algues ont la plus forte productivité en matière de bio-carburant
  • Une unité de production de bio-carburant marin consomme des rejets d’eau usée et du CO2, elle produit des algues et de l’oxygène
  • Une unité de production pourrait incorporer sa propre production d’électricité (solaire, éolien & hydrolien) et pourrait être couplé à d’autres éléments d’aquaculture.

Le développement économique en Iroise

J’entame ici le premier post d’une série de réflexions consacrées à l’économie en Iroise.

La pointe nord du Finistère est une zone économique tout à la fois caractérisée par un secteur primaire très présent, un pôle d’excellence technologique et scientifique avec des écoles et organismes de recherches visibles sur le territoire du Technopôle Brest Iroise, un tissu dynamique de TPE, PME, artisans et commerçants, sans oublier une attractivité touristique et résidentielle qui ne demande qu’à se développer.

L’Iroise est cependant desservie par son caractère péninsulaire à pointe de la Bretagne, ce qui a des conséquences tout à la fois économiques et démographiques : les habitants et les entreprises y naissent, y passent leur jeunesse, mais les grandes ambitions touchent rapidement les limites du territoire ce qui provoque trop souvent un départ des forces économiques vers des régions où la progression est plus facile. Peu de ces acteurs « oublient » leur terre d’origine, beaucoup auront à cœur d’y revenir ou d’y maintenir de l’emploi, mais il n’en demeure pas moins que le potentiel de richesse est souvent réalisé « ailleurs ». Ceci n’est d’ailleurs pas propre à l’Iroise, c’est vrai d’une grande partie de la Bretagne, mais le phénomène est clairement moins marqué au fur et à mesure où l’on se rapproche du centre de la France.

Les pouvoirs publics locaux et les entrepreneurs ont développé un certain nombre de stratégies pour amoindrir ce handicap en misant sur le militantisme économique local, en développant une expertise forte en matière de logistique, en développant des infrastructures de communication de qualité, etc… Tous ces efforts sont remarquables, ils sont très certainement un des éléments qui contribuent à avoir un tissu dense de TPE et PME, ils ont évité la désertification économique et démographique, mais ils ne sont pas arrivés à exploiter jusqu’au bout les atouts locaux.

Or, parmi les quatre défis qui se posent à nous (climat, énergie, démographie, numérique), il se trouve que trois d’entre eux au moins sont à même de bouleverser la donne économique :

  • le climat nous oblige à repenser la chaîne logistique de nos productions, de prendre en compte l’impact carbone de notre économie,

  • l’énergie qui pose problème à la fois parce qu’une trop grande proportion de ce que nous utilisons aggrave le bilan carbone, parce que le marché du pétrole (côté demande) risque fort de devenir de plus en plus imprédictible et soumis à de fortes tensions,

  • enfin le numérique qui change certaines règles économiques « classiques » en modifiant la géographie de chalandise et de production (territoire physique), en introduisant des mécanismes de gratuité des services, en modifiant les modèles économiques et sociaux des entreprises (on ne sait plus clairement définir où commence et où finit l’entreprise, qui est un acteur interne ou externe), en accélérant de façon incroyable les cycles de vie économique, en perturbant notre vision de la rareté et de l’abondance.

En économie, tout défi est à la fois un risque et une opportunité, l’Iroise peut éviter l’écueil des risques et tirer les bénéfices des opportunités. Les prochains articles explorerons quelques pistes pour cela.

Havard pour tous

Mi-octobre, je publiais sur mon blog une analyse de l’impact du numérique sur l’éducation et je signalais l’existence de cours universitaires gratuits de haut niveau sur internet.

Un de mes lecteurs attentifs vient de me faire parvenir la photo d’un article de courrier international paru fin octobre sur le même thème. Comme quoi…

Réindustrialisation ou numérisation de l’industrie ?

Pour alimenter la réflexion sur les grandes orientations de la politique industrielle, je vous relaie un dossier d’Ernst & Young sur « La révolution des Services ».

On pourra retenir en synthèse :

  • que l’industrie traditionnelle évolue vers une adjonction de services aux produits (et vice-versa)
  • les technologies de l’information sont au cœur de cette évolution, elles la rendent possible
  • qu’à travers ces nouvelles offres, le consommateur devient acteur du cycle de vie du produit (inventeur, concepteur, promoteur, …)
  • cette évolution radicale est toute à la fois source de croissance et une nécessité absolue si l’on souhaite sortir vainqueur de la bataille des défis économiques & sociaux.

Document : cliquer ici pour charger le document.

 

Question d’éducation (seconde partie)

Et pour l’école de mon village aujourd’hui ?

Contrairement à l’époque de Jules Ferry, la situation actuelle peut parfaitement être prise en charge au niveau local, puisque les ressources sont déjà universelles et largement gratuites.

Qui sait que l’on peut dores et déjà bénéficier gratuitement des cours des plus prestigieuses universités mondiales via Coursera ? Plus près de nous, Télécom Bretagne met en ligne un certain nombre de cours sous forme numérique.

Certes la majorité de ces cours sont en anglais, ne sont que des transpositions numériques encore basiques, mais ce n’est qu’une question de temps pour que la puissance du numérique fasse dépasser en qualité les cours originaux, pour que plus de cours soient en français. Sans oublier que nous verrons un jour arriver le traducteur universel.

Coursera et Télécom Bretagne nous montrent un chemin possible : la mise à disposition d’un enseignement de très haute qualité n’est pas très compliquée et bien moins chère qu’une université « en dur ». En matière d’éducation numérique, la priorité numéro une des collectivités et d’aller chercher la connaissance locale, toute la connaissance, et de la mettre en forme pour la rendre accessible à tous. Cette mise en forme pourra ensuite être agrégée au niveau national, ou plus exactement, au niveau de la communauté linguistique la plus large (francophonie en l’occurrence).

Si l’accès à la connaissance numérique s’offre à nous, nous ne pourrons en bénéficier pleinement qu’à une seule condition : que nous maîtrisions les principes de base du numérique, que nous en comprenions la logique. Pour faire un parallèle, lorsque nous apprenons à lire nous devons nous approprier l’écrit (les lettres et leur agencement en syllabes puis l’orthographe). Nous devons également nous approprier la grammaire.

Le numérique a son orthographe et sa grammaire. L’enjeu de la bataille est là : qui ne sait lire et écrire, ne peut prendre pleinement sa place dans le monde numérique. Qui ne maîtrise pas les outils et les modèles numériques ne peut accéder pleinement au monde qui se construit. Ceci est vrai pour toutes les générations, toutes les catégories socio-professionnelles, y compris les classes dirigeantes.

La République a su mettre en place des lois, un tissu dense d’enseignement et des « hussards » pour gagner la bataille de l’alphabétisation et de la connaissance pour tous.

La République doit mettre en place des structures similaires pour gagner la bataille de l’alphabétisation numérique. Qui ne sait pas correctement lire ne peut pas accéder à la connaissance d’une bibliothèque.

Question d’éducation (1ère partie)

L’éducation est peut-être l’une des plus belles victoires de la République. Nous avons élevé au rang des grandes valeurs la connaissance. Nous avons imposé l’école pour tous comme un bienfait universel.

Si la profonde révolution numérique amplifie l’élan vers la connaissance, elle va pourtant très probablement remplacer le modèle de l’école de Jules Ferry tel que nous le connaissons par quelque chose qui n’est pas encore clairement défini. Il faut s’attendre à un choc immense, un choc comparable à celui de l’invention de l’écriture par les Sumériens, puis à son « industrialisation » par l’imprimerie. Le numérique est l’équivalent de cette double révolution, mais en un laps de temps incroyablement court, rien de moins.

Dans un premier temps, la numérisation a permis la diffusion universelle de l’information (internet à la fin du XXème siècle).

Dans un deuxième temps, des outils ont permis de structurer ces informations pour permettre cette fois-ci la diffusion universelle de la connaissance (moteur de recherches évolués, wiki, …). À ce stade, la technologie numérique permet « l’externalisation » de notre mémoire et donne à chaque homme un niveau de connaissance (brute) sans équivalent.

Le numérique nous rend plus « savants ».

Nous abordons très probablement actuellement une phase où de nouveaux outils vont abattre les barrières des langues et des handicaps (traducteurs universels des langues, traducteurs son/écrit, …) et nous commençons à entrevoir les outils qui vont « augmenter » nos intelligences (vous demandez le temps qu’il fait à votre ordinateur et il vous conseille de prendre votre parapluie parce votre agenda lui a dit où vous alliez). Cette nouvelle étape permettra une « externalisation » d’une partie complémentaire de nos capacités cognitives.

Le numérique nous rend plus « comprenants ».

Cette série de changements s’accompagne d’un autre élément majeur, à savoir la gratuité in fine de la connaissance, ce qui est en soit à la fois un succès philosophique et un cataclysme économique puisque la connaissance est un élément fondamental de la valeur (s’il n’est pas l’élément fondamental d’une société qui ne serait fondée ni sur la religion, ni la puissance militaire, ni le capitalisme de marché !).

Du point de vue de l’éducation, les conséquences sont majeures. Tout d’abord, la connaissance que l’on met tant de temps à assimiler est maintenant disponible, accessible, gratuite et globalement plus riche et plus fiable et actualisée que ce dont peuvent se souvenir tous les Pic de la Mirandole réunis.

Comment justifier alors des années d’études si le savoir est accessible en quelques secondes ?

L’enseignement devra très probablement s’orienter vers l’enseignement de savoir-faire, l’enseignement de compétences, l’enseignement de la capacité à raisonner, le développement du sens critique, de la compréhension profonde des choses, et ceci dès le plus jeune âge. Mais même ces enseignements là seront en concurrence avec les capacités des outils numériques à venir : comme nous l’avons écrit, le numérique va également externaliser de façon incroyablement efficace certaines de nos capacités cognitives. L’enseignement ne serait dans ce cas nécessaire que pour permettre l’émancipation de l’homme par rapport à sa « greffe numérique ». Mais qui sera prêt à assumer des années d’efforts pour s’émanciper d’une connaissance universelle ?

Une telle évolution peut paraît effrayante et elle l’est. Pourtant elle ne fait que réaliser nos idéaux sur la connaissance universelle apportée à chacune et chacun. Il va falloir s’affranchir de ce paradoxe.