Débat des primaires socialistes : éclairage sur le nucléaire

Le débat d’hier soir a traité la question du nucléaire de façon un peu plus saillante que le reste. Comme c’est une question qu’à titre personnel j’ai travaillé avec mes camarades sociaux-démocrates depuis plusieurs années, je donne ici quelques éléments de réflexion et de choix.

Sortir du nucléaire ? par LCP

Tout d’abord, il faut constater que le corpus idéologique du PS a fondamentalement évolué sur la question écologique, que ce n’est plus un sujet subalterne et aussi que notre vision des choses n’est pas celle des écologistes. Nous avons une approche propre, qui ne conçoit pas la nature d’un point de vue « romantique ». D’ailleurs, le terme même de « nature » est à mon sens inapproprié pour le débat politique.

Par rapport à ce problème, nous devons considérer d’un côté les écosystèmes et de l’autre la société des hommes. Ces deux éléments s’imbriquent, la société des hommes ne peut avoir d’avenir dans des écosystèmes dégradés, mais dans tous les cas, nous plaçons l’homme au cœur de notre idéologie, de nos réflexions, de nos décisions. Nous voulons engager la France dans une démarche de développement durable, ce terme impliquant à la fois une prise en compte des écosystèmes et des paramètres économiques, sociaux et sociétaux de nos sociétés.

A contrario, les écologistes prônant la décroissance mettent d’abord en avant la « nature » puis engage la société dans un processus malthusien. C’est très différent de notre approche puisque nous acceptons d’agir sur les écosystèmes, de les modifier, du moment que ces actions préservent l’avenir à la fois de ces écosystèmes et des sociétés humaines. Nous travaillons pour le bonheur d’hommes et de femmes libres, émancipés, maîtres de leur destin.

C’est à partir de cet éclairage qu’il faut comprendre notre orientation nucléaire. François Hollande fixe un cap de sortie du nucléaire car cette technologie pose des problèmes de sécurité et a potentiellement un impact très fort sur nos écosystèmes (ceux qui ont oublié Tchernobyl ont eu la mémoire rafraîchie avec Fukushima). Cependant, cette sortie du nucléaire doit être faite en gardant à l’esprit l’intérêt des citoyens qui est de façon immédiate d’avoir de l’énergie, puis de diminuer l’empreinte carbone de nos sociétés, puis de passer à des énergies plus satisfaisantes pour les écosystèmes. Ces différents aspects pouvant d’ailleurs être traités de façon complémentaire. Par ailleurs, nous sommes sociaux-démocrates et la négociation est notre outil de travail. Nous fixons donc un cap, nous mettons sur la table les besoins (le besoin énergétique augmente, le parc de production vieillit, certaines énergies deviennent obsolètes, certaines technologies changent la donne), et à chaque étape nous voulons engager une discussion, ferme mais ouverte, pour trouver la meilleure solution. Certains ont une vision plus dirigiste et étatiste, les sociaux-démocrates privilégient des choix plus concertés et consensuels.

Flamanville est un excellent exemple. Une nouvelle technologie arrive. Que vaut-elle ? C’est une technologie nucléaire et nous voulons en sortir : si on ajoute une centrale alors pour progresser sur la voie de sortie du nucléarie, il faut en fermer au moins deux (Fessenheim et Chinon sont de bons candidats pour cela). Est-ce que cela a un sens ? Comme on ne comblera pas le déficit de production d’énergie, par quoi complète-t-on ? Des éoliennes ? Des hydroliennes ? Du solaire ? Des économies d’énergie ? De l’intelligence dans la consommation ? Le débat est ouvert, menons-le sereinement et reprenons-le à chaque étape.

La voie est claire : on veut sortir d’une filière dangereuse et impactant trop les écosystèmes. Les outils sont clairs : on affiche les buts, les contraintes, et on négocie les choix en cherchant le consensus, ce qui n’empêche pas d’être ferme sur la nécessité d’atteindre les buts. A chacun de voir s’il est d’accord ou pas avec cette approche, c’est la notre, et François Hollande l’incarne très bien dans cette primaire.


Textes de réflexion :

 

Education : un petit film remarquablement iconoclaste

Voici un film américain (traduit en français) qui donne un éclairage du formatage de nos modes d’éducation scolaire. L’expérience du trombone est particulièrement instructive et rejoint nombre de tests d’économie comportementale.

A visionner, à méditer…

Nucléaire, éolien et gaz, le défi énergétique : illustration en Iroise (Bretagne)

Dans mon texte des défis, j’avais mis en avant quatre obstacles majeurs à traiter pour les politiques d’avenir de la France  :

  • la rupture climatique et ses conséquences écologiques (dont j’ai traité un aspect concret avec mon post sur les algues vertes en Bretagne)
  • la bascule démographique
  • la dématérialisation numérique de nos sociétés(c) creative commons : Otourly
  • et enfin la rupture énergétique.

C’est une illustration concrète de ce dernier point que je voudrais aborder dans cet article, en prenant pour illustration l’Iroise (où j’habite). Pour ceux qui localisent mal ce pays breton, c’est le bout de la pointe nord du trident Breton (là où se trouve d’ailleurs la pointe la plus à l’ouest de la France continentale, qui n’est pas la pointe du Raz comme on le croit trop souvent, mais le cap Corsen).

La Bretagne dans son ensemble et l’Iroise en particulier, illustrent très bien les ambiguïtés et incohérences des choix énergétiques Français.

De part sa situation géographique, l’Iroise, comme la Bretagne, est déficitaire en énergie et sa situation en bout de ligne fragilise la distribution, à tel point qu’il n’est pas exceptionnel d’avoir une ou deux coupures de courant dans l’année. Et à chaque pointe de consommation réapparaît le spectre de la coupure de délestage. Comme les prévisions de consommation sont plutôt largement à la hausse (imaginez ce qui se passera lorsque chacun rentrant chez lui entre 18h et 19h avec sa voiture tout électrique et la branchera pour la recharger…), la question de construire des générateurs se posent avec force.

On le sait, l’énergie en France est d’abord nucléaire. La Bretagne a deux singularités concernant ce mode de production : Brennilis et Plogoff. Brennilis nous instruit sur la difficulté à démanteler une centrale nucléaire (le nucléaire ne pose que deux petits problèmes : on ne sait pas quoi faire lorsque cela explose, pas plus qu’on ne sait gérer correctement les déchets). Quant à Plogoff, cela montre le rejet et la peur, plus ou moins rationnels, que représente culturellement le nucléaire.

Pour les sociaux-démocrates, le nucléaire est tout à la fois la seule solution actuelle pour produire à grande échelle l’énergie qui nous est indispensable, et une solution technologique dont il est souhaitable de sortir, mais selon une démarche rationnelle qui prend en compte aussi bien les aspects de sécurité, économique, et sociaux. Fermer les centrales sans rien proposer qui soit au minimum équivalent est une tartufferie, continuer sur le tout nucléaire inacceptable. La démarche proposée est que pour chaque centrale que l’on serait amené à construire parce que c’est nécessaire, on en ferme au moins autant en fermant les plus dangereuses (Chinon, Fessenheim par exemple au démarrage de Flamanville), et que l’énergie supplémentaire manquante soit produite par des moyens complémentaires (éolien, hydrolien, …). Ouvrons à chaque étape une négociation : ce dont on a besoin et ce qui peut permettre de répondre à ces besoins. Ce processus aboutira plus ou moins rapidement à la disparition complète du nucléaire en fonction des meilleures solutions à une époque donnée et des efforts communs que chacun consentira à faire.

La notion d’effort commun n’est pas un vain mot et c’est peut-être la principale difficulté. En matière d’énergie, chacun est prompt à exiger de consommer sans restriction, et tout aussi prompt à refuser de produire près de chez lui de quelque façon que ce soit. On pourrait croire que la production d’énergie par éolienne est plébiscité dans une région qui a refusé avec tant de fougue le nucléaire. Hélas, le champ d’éoliennes que j’aperçois de ma fenêtre rencontre son lot d’opposants, avec des arguments qui tiennent parfois plus du fantasme que d’autre chose. Si les éoliennes dans les champs posent problèmes, alors construisons-les en mer. Mais là aussi, des collectifs contestent immédiatement les projets d’implantation. Soit, construisons alors une centrale classique au gaz. Patatras, un nouveau comité anti-centrale au gaz se met en place.

Non à une Centrale Gaz/Fuel à Guipavas

Reste donc les efforts d’économie et de production domestique. Hélas, si on peut espérer à terme équilibrer les besoins des foyers, cela n’est absolument pas suffisant pour les entreprises, même lorsque la plupart sont des TPE/PME comme en Iroise. Que dire alors des bassins industriels lourds ?
On sait produire toute l’énergie nécessaire, on sait même en produire une bonne partie d’une façon qui respecte les écosystèmes. Mais quel que soit le mode de production, l’obstacle principal est l’acceptation locale. Nous sommes dans un système où le citoyen se sent systématiquement agressé lorsqu’il s’agit de construire une centrale. Or on peut facilement deviner que cette opposition n’est pas forcément rationnellement fondée, et qu’il est possible que cette opposition soit plus le résultat d’une approche qui donne le sentiment que l’on imposera une solution coûte que coûte, fruit d’une erreur de méthode, fruit d’une incompréhension, peut-être aussi d’une administration d’État qui apparaît trop arrogante.

Je n’approuve pas cette opposition systématique, pas plus que je n’approuve les passages en force. Face à un problème objectif d’une consommation électrique qui n’est pas satisfaite par une production suffisante, il me semble possible de trouver des solutions sans déclencher à chaque fois une guerre picrocholine.

Liberté, Egalité, Fraternité : Appel de Thorens-Glières

En 2004, à l’occasion de l’anniversaire des 60 ans du programme conseil national de la résistance, un premier appel avait été lancé :


Appel du Conseil National de la Résistance par Baptiste_L06

Cet appel a été prolongé le 14 mai dernier à Thorens-Glières.


Appel de Thorens-Glières

La substance de l’appel de Thorens-Glières :

Avec l’association « Citoyens Résistants d’Hier et d’Aujourd’hui » nous appelons tous les partis politiques, toutes les candidates et candidats à un mandat public dans le cadre des élections présidentielle et législatives de 2012 à prendre 3 engagements qui mettront réellement en application la devise républicaine « Liberté Egalité Fraternité ».

Premièrement, afin de garantir l’égalité :

Lancer immédiatement le travail législatif et réglementaire qui permettra de reconstituer les services publics et institutions créés à la Libération pour aller vers une véritable démocratie économique et sociale. Possible en 1944, cette démarche l’est d’autant plus aujourd’hui alors que le pays n’a cessé de s’enrichir depuis. Droit à la santé pour tous, droit à une retraite, droit à l’éducation, droit au travail, droit à la culture demeurent les seuls véritables garants de l’égalité républicaine. Une égalité qui n’a de sens que dans le respect du droit des étrangers.

Deuxièmement, afin de garantir la liberté :

– Approfondir la forme républicaine du gouvernement afin de séparer clairement les pouvoirs et renforcer la démocratie parlementaire au détriment de notre régime présidentiel personnalisé.

– Développer de nouvelles pratiques de la démocratie dans laquelle l’action de la société civile sera reconnue et restaurer les conditions du principe d’ailleurs défini à l’article 2 de la constitution actuelle : « gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple ».

– garantir la qualité du débat démocratique et la fiabilité des contre-pouvoirs, en assurant à nouveau la séparation des médias et des puissances d’argent comme en 1944.

Ces 3 axes de débats devront aboutir à une démarche souveraine d’ « Assemblée constituante » vers de nouvelles pratiques républicaines.

Troisièmement, afin de garantir la fraternité :

Travailler les coopérations avec les peuples et les pays, en refusant l’actuelle dictature internationale des marchés financiers qui menace la paix et la démocratie.

Favoriser résolument des solutions soutenables pour les équilibres écologiques, dans les limites de développement compatibles avec la survie humaine.

Écarter de la marchandisation totale les besoins vitaux de l’être humain comme l’eau, la nourriture et l’énergie.

Pour mémoire, j’avais pris ce programme du CNR comme point de départ du texte « Refondations, PS, Socialisme et Social-démocratie, Le dormeur doit se réveiller« 

Egalité hommes – femmes et anthropologie politique

Même si c’est du grand n’importe quoi, j’aime bien cette époque car c’est une époque de changement !

Les affaires politiques qui font l’actualité en ce moment et celles qui ne le font pas (encore) devraient nous inciter à réfléchir au-delà de l’indignation bien-pensante (quand elle n’est pas jouissivement fallacieuse), à la projection à bon compte de fantasmes plus ou moins avoués sur ceux qui se sont fait prendre, ou encore à la récupération pure et simple du moment que cela permet de monter à la tribune.

Alors amis internautes, relisons un peu les choses au-delà des maux que l’on nous donne à voir.

Justice

Tout d’abord, George Tron et Dominique Strauss-Kahn nous permettent, avec bien moins de talent que Tocqueville, de nous pencher sur la démocratie américaine et de la comparer à la nôtre, du point de vue judiciaire tout au moins.

Même type d’affaire, mais quelle différence à l’arrivée.

Les États-Unis c’est le pays où sur la base d’un seul témoignage et d’une journée d’enquête faite dans le bruit médiatique d’affirmations non-fondées suivi de rétropédalages, n’importe qui est coupable quoi qu’il arrive en attendant que la justice statue effectivement sur les faits. C’est le pays où la justice et la police sont intimement liés au pouvoir politique exercé non par l’exécutif, mais par la pression des citoyens, ce qui serait parfait si le citoyen en question pouvait agir rationnellement à partir d’une réflexion étayée par les faits, ce qui à l’évidence n’est pas le cas.
A contrario, la France est un pays où le témoignage (ici double) amène plus lentement aux premières décisions de procédure judiciaire, parce que l’image de l’accusé est protégée, parce que l’instruction cherche aussi bien à prouver la culpabilité que l’innocence, parce que la justice a forcément besoin de temps.
Le système français est de fait plus lent, plus soumis aux aléas du pouvoir politique (sous la pression de l’exécutif et non des citoyens) mais il apparaît plus serein et préserve incontestablement mieux monsieur Tout-le-monde d’un éventuel broyage et d’une erreur judiciaire.
Alors nulle doute que notre système est perfectible, mais à l’évidence ce cas permet de montrer à quel point la volonté du pouvoir sarkozyste de se rapprocher du système américain est une hérésie.

Société

Au-delà de la justice, ces affaires sont également un enseignement sur notre époque. A première vue, nous avons sous les yeux le résultat d’une société où la conquête du pouvoir n’est que la bataille entre mâles dominants, conquête qui une fois réussie permettrait à ces derniers d’en « consommer » tous les fruits. Il est fort probable que notre système sociétal (politique, professionnel ou privé) n’ait pas assez traité des dérives sexuelles rendues possibles par l’accès aux responsabilités, par contre je conteste que cela se résume à un problème des hommes à l’encontre des femmes.

Pourquoi ?

D’abord parce qu’il me semble que si ces affaires mettent en cause d’abord des hommes, c’est pour un ensemble de raisons qui font que les hommes ont plus l’occasion d’être mis en accusation ; en particulier :

* la probabilité : les postes de pouvoir sont majoritairement attribués à des hommes parce que structurellement le système privilégie un type de conquête qui leur est favorable : d’un point de vue probabiliste, les abus seront donc majoritairement masculins
* la culture : même si des progrès ont été fait, le schéma cognitif de l’homme prédateur et de la femme proie reste bien établi ce qui facilite l’adoption d’un tel schéma et son acceptation (pour s’en convaincre, il n’y a qu’à relire les commentaires sexistes dont certains d’ailleurs prétendent dénoncer les affaires en cours)
* le tabou : parce que si la dénonciation de tels faits est psychologiquement difficile pour ces femmes, pour des hommes victimes elle apparaît carrément impossible, ce qui est aussi le cas dans le cas de harcèlement ou de viol homosexuel homme ou femme.

Au-delà de l’actualité, je crois que ce serait une grande erreur de ramener un problème structurel d’organisation de notre société à un problème d’homme prédateur vs femme proie. Il faut dépasser l’heuristique de disponibilité affichée par les médias et les groupes de pression. Inversez le rapport homme / femme aux postes de pouvoir et vous ne changerez rien aux dérives. A l’inverse, travaillez à « dé-sexualiser » le rapport de pouvoir et vous aurez plus de chance d’arriver à une situation normale.

Le combat contre ces abus est un combat de tous les hommes et de toutes les femmes, pas des uns contre les autres. Ne pas l’aborder ainsi revient à renforcer le problème, éventuellement en inversant le sens, mais surement pas à le résoudre.

Conclusion

Loin de poser clairement un débat sociétal, le traitement actuel de ces affaires renforce des schémas de domination homme / femme, avec pour seul vrai enjeu de savoir qui a le droit de dominer qui. C’est l’expression d’un fantasme, au mieux d’une erreur d’analyse, ce n’est pas le sens d’un combat de gauche, du mien en tout cas. Nous devons travailler à établir des relations interpersonnelles apaisées, égalitaires d’un point de vue général et équitables et respectueuses au sein de nos organisations humaines.
Nous devons également regarder sexuellement les hommes pour ce qu’ils sont aujourd’hui et non pas pour l’image distordue que nous en avons. Sur ce dernier point je vous renvoie à une chronique de Boris Cyrulnik sur France Info (« hommes, sexe et amour« ), c’est très étonnant.

Malgré ses défauts, la justice française vaut mille fois mieux que la justice américaine. Quant aux relations hommes / femmes au sein de notre société, il faut travailler pour qu’elles valent mille fois mieux que ce qu’elles sont aujourd’hui.

Une vision social-démocrate pour la politique étrangère de la France


En attendant que nous nous choisissions un leader qui portera nos couleurs en 2012, et pour combler un tant soit peu le peu d’échos (pour ne pas dire la pauvreté) des propositions en la matière des candidats déclarés, je vais prendre ma plume de blogueur citoyen pour dessiner les contours d’une politique étrangère vue par un militant social-démocrate.

Le bilan

Commençons donc par tracer un bilan de bientôt 10 années de gouvernement UMP. Que reste-t-il de saillants dans nos mémoires ?

Napoléon III capitule devant Bismark

En matière militaire, la réintégration de la France au sein de l’OTAN, notre enlisement en Afghanistan, et comme allégorie de l’ensemble le périple grotesque du Clemenceau ancien vaisseau amiral, fierté de la marine française. J’ai beau chercher quelques éléments à décharge, et j’aurais aimé pouvoir citer une évolution positive de l’action de l’armée française en Afrique par exemple en retenant l’épisode Bgabo, mais le pas est difficile à franchir.
En matière européenne, c’est là catastrophique. L’Europe n’existe plus que par son administration et sa monnaie, elle a été vidée de son élan créateur et n’a jamais réussi à être régénérée par une vitalité démocratique et citoyenne. Quel gâchis ! Chirac autant que Sarkozy n’ont jamais été capables de retisser des liens comparables à ceux qui unissaient Helmut Kohl et François Mitterrand. Pire, la France est redevenue le pays dont on se méfie. Il y a dans l’époque comme un parallèle entre Bismark / Merkel et Napoléon III / Sarkozy. Est-il encore temps d’éviter Sedan ?

Mais à mon sens, les plus gros dégâts sont à porter au discrédit personnel de Nicolas Sarkozy. Il est l’homme qui a permis à Poutine de gagner sa guerre en Ossetie, il est l’homme qui a rendu les plus grands honneurs de la République à Kadhafi et Assad, aujourd’hui plus que jamais despotes totalitaires tortionnaires de leurs peuples, celui qui ne comprend ni la révolution Tunisienne, ni celle d’Égypte. C’est encore l’homme grossier qui snobe l’ouverture du G20 alors que la France en reçoit la présidence. C’est aussi l’homme qui a réussi à nous fâcher avec le Mexique (encore un goût de Napoléon III) pour une question juridique qu’il a voulu utiliser à son profit.

Qu’oppose Nicolas Sarkozy à ce bilan ? Le sauvetage culotté mené par Cécilia Sarkozy au début de son mandat, et la grossesse de Carla Bruni exhibée au G8 de Deauville. Voilà une source de méditation.

Et le PS ?

Aurions-nous fait mieux ? Que pourrons-nous faire d’autre que d’être ballotés comme un fétus de paille sur le torrent mondial ? En bon social-démocrate je crois qu’il est possible de répondre à ces questions en partant d’une idée déjà fort ancienne puisqu’on la retrouve dans « La flamme et la cendre ». Il s’agit de la politique euro-méditerranéenne. Cette idée a tentée d’être reprise par Nicolas Sarkozy, mais sous sa direction cela n’a abouti qu’à une espèce de curieux et inutile club.

Il y a deux éléments fondamentaux au cœur de ce projet : la Méditerranée a longtemps été le cœur de la culture et du commerce européen. La Méditerranée a réuni les peuples, elle a irrigué la gloire des peuples, elle a été la richesse des peuples. Le projet euro-méditerranéen a pour ambition de recréer au troisième millénaire les conditions d’une renaissance unissant le bassin de la péninsule ibérique à la mer noire. En pratique cela signifie favoriser les échanges commerciaux du bassin, retisser le lien culturel qui unit tous ces pays, et se donner les moyens militaires pour résoudre, au nom de l’intérêt de tous et sur des valeurs méditerranéennes communes des conflits comme ceux du Maghreb. Ceci inclut également une vraie implication dans le conflit israëlo-palestinien. La gauche a trop longtemps démissionné devant ce conflit, partagée entre le soutien aux palestiniens et la résolution du problème de territorialité d’Israël. Il me paraît faux autant que lâche de considérer que le temps finira à lui seul par arranger les choses. On peut le voir soit de façon mystique et citer les prophètes, soit de façon rationnelle en constatant que le temps augmente inexorablement les moyens de destruction, mais en l’état, si l’on continue ainsi, la seule issue est la mort symbolisée par les prophéties de destruction de Jérusalem. Il paraîtra sans doute facile de donner son avis du fond de la Bretagne sur un conflit plus que millénaire, mais la seule issue que je vois est de créer les conditions d’un seul état confédéral israëlo-palestinien. Ceci a peut-être une chance de marcher si c’est appuyé par la reconstruction d’une identité méditerranéenne partageant les mêmes valeurs, dont la démocratie appuyée par une force de police méditerranéenne.

Enfin je n’ignore pas que l’Europe ne se limite pas à sa mer du sud. Il me paraît important de construire le pendant au nord en renouant cette fois avec l’histoire de la Hanse, ce qui permet alors de faire le lien avec le voisin russe. Le projet Hanse-Méditerranée doit à mon sens soutenir la politique internationale Française en attendant d’avoir recouvré assez d’honneur et de crédit pour retrouver notre place sur la tribune mondiale.

Conclusion

Réflexions sans doutes trop courtes et trop rapides publiées sur le blog d’un citoyen anonyme. Il ne tient qu’aux candidats de 2012 de faire plus et mieux, de dépasser les cris de la cours de récréation et de projeter une vision d’avenir qui redonne à la France sa place dans le concert international. Commençons par l’Europe, et lorsque ce sera fait, le monde nous admirera et nous écoutera à nouveau.

Plaidoyer pour un nouvel urbanisme


Depuis longtemps j’utilise régulièrement une petite loi universelle personnelle qui dit que lorsque l’on a un problème qui semble impossible à résoudre, il faut essayer de trouver un autre problème à résoudre et chercher une solution pour les deux en même temps (je suis preneur d’une référence si quelqu’un a déjà découvert cette vérité profonde avant moi…).

Et bien cela tombe bien en ce moment puisque le futur président de la République française aura à résoudre une équation impossible qui inclut la relance de l’économie, le sauvetage des finances, la bascule énergétique (d’abord pétrole ensuite nucléaire), le changement climatique (pas sûr que nous en restions longtemps à la douce langueur d’un printemps hors norme) et bien sûr nos rééquilibrages démographiques.

Donc, côté problèmes impossibles nous sommes servis.

En plus de ma petite loi universelle personnelle, j’avais co-écrit il y a déjà bien longtemps un texte intitulé « Le O.U.I. de la Social-Démocratie française : Outils – Utopies – Idéologie« . L’idée de ce texte un peu méthodologique était d’avoir un énoncé politique qui permette à la fois de dire où l’on va (l’utopie) et comment on y a (les outils).

Et bien je crois que pour résoudre nos problèmes insolubles, il existe un outil puissant, outil que Dominique Strauss-Kahn avait mis à son programme lors des primaires de 2006 (mais beaucoup trop timidement à mon sens). Cet outil c’est l’urbanisme, ou plutôt la création ex-nihilo d’un nouvel urbanisme capable à la fois de prendre en compte les impératifs de basculement énergétique (nouveaux modes de consommations énergétique, mais aussi nouveaux modes de production), capable de prévenir les effets catastrophiques du changement climatique (souvenez-vous de Xynthia), capable aussi de retisser les liens sociétaux si distendus, capable enfin de relancer de façon coordonnée l’économie (de façon rentable dans le temps qui plus est !). J’avais décrit plus précisément l’intérêt de cette approche dans le texte « Des villages pour le XXIème siècle : Reconstruire une France solidaire répondant aux défits« , mais que ce soit à travers la construction de villages ou simplement de nouveaux quartiers, l’outil me semble extraordinairement puissant et bel et bien en mesure de résoudre les plus graves de nos problèmes.

C’est de plus un outil simple à comprendre, un outil qui s’ancre dans l’histoire de nos sociétés (connaissez-vous les quartiers castor ou des gens comme Robert Owen ?), c’est un moyen fantastique pour associer les citoyens à la mise en œuvre d’un changement politique majeur, c’est un moyen de gérer au mieux le risque futur lié aux changements climatiques et c’est un moyen fantastique de construire les infrastructures de la société du XXIème siècle.

Nous tenons-là à mon sens l’outil de la construction d’un destin commun et solidaire, l’outil d’un État qui intervient quand il faut où il faut, qui donne le cap et l’impulsion, qui permet aux citoyens de participer activement et librement à la construction de cet avenir. Voilà un outil que les sociaux-démocrates ont dans leur besace : il est temps de l’offrir à tous les Français !

Mais pourquoi la République refuse-t-elle à ces enfants le droit d’exister ?!

Ceux qui lisent régulièrement mes écrits savent que j’ai une sensibilité particulière pour toutes les questions touchant au droit de la vie et de la mort, en encore plus particulièrement aux droits touchant aux enfants.

L’actualité du jour me donne l’occasion, plutôt triste et très irritante à vrai dire, d’y revenir.

J’ai déjà évoqué le combat de Sylvie et Dominique Mennesson pour donner à leurs jumelles une identité aux yeux de la loi de la République. Ces enfants, nées aux États-Unis d’une chaîne d’amour, de solidarité et de bonté se voient refuser le droit d’avoir une existence légale en France parce que la GPA (Gestation Pour Autrui) n’y est pas reconnue. Le couple se bat maintenant depuis plus de 10 ans pour devenir une famille « normale » aux yeux de la loi et espérait aujourd’hui voir la Cours de cassation reconnaître officiellement l’existence des deux petites filles.

En vain.

Au nom de l’Etat, la justice a refusé une fois encore à ces enfants le droit d’exister officiellement jugeant « contraire à l’ordre public, la décision étrangère qui comporte des dispositions heurtant des principes essentiels du droit français« , et ceci alors même que le ministère public était favorable à leur reconnaissance. C’est un non-sens total, un aveuglement, un acharnement, qui plus est en violation des conventions internationales sur le sujet. L’affaire devrait donc maintenant être portée auprès de la Cour européenne des droits de l’homme.

Peut-être est-ce un mal pour un bien futur, mais ce jugement est rendu la même semaine où le parti socialiste publie le socle du futur programme à la présidentielle. Le thème de la famille y est abordé dans le sens de son évolution. Il me paraît important de donner une plus grande ambition encore à cette proposition, en mettant le projet d’enfant au cœur de cette réforme. Un État n’a pas d’avenir s’il ne favorise pas le projet d’enfant d’un couple quel qu’il soit, et quel que soit le moyen de son arrivée au sein de ce couple (du moment où il n’y a de préjudice pour personne).

Par ce post, j’apporte une fois encore, mon soutien à Sylvie et Dominique en leur demandant d’embrasser leurs petites filles de ma part. La loi finira forcément par reconnaître la vie et l’amour.

En 2006 le courant social-démocrate était en avance d’une élection sur la vieille idéologie PS, il l’est toujours

Martine Aubry s’est déclarée ouverte à l’idée d’une politique qui tracerait une voie de sortie du nucléaire. Grande nouveauté au PS ? Retournement spectaculaire ? En fait non. Si en 2006, François Hollande alors 1er secrétaire avait bien voulu ouvrir les portes et fenêtres des idées, sans doute ce débat aurait-il eu lieu à l’époque sous l’impulsion des sociaux démocrates.

Voici quelques textes publiés à l’époque.

DANS LE LIVRE « 365 JOURS » (éditions Grasset & Fasquelle, 2006)

PAGES 218-219 (propositions lors des vœux à la presse en janvier 2006)

Axe n° 3 : Le développement durable

« Proposition 8 : Réussir le pari du postnucléaire.

Nous assistons actuellement à un accroissement de la dépendance énergétique. On l’a vu récemment avec la crise du gaz entre la Russie et l’Ukraine ou l’augmentation du prix du pétrole. Nous connaissons les difficultés du nucléaire dans un pays comme le nôtre. Pour y répondre, il faut consacrer un effort de recherche massif aux questions de l’énergie propre. La France a fait dans les années 1950 le pari du nucléaire et elle l’a réussi. Elle doit aujourd’hui faire le pari du postnucléaire et le réussir. »

PAGES 270-272 Mardi 13 septembre

« En Haute-Marne et dans la Meuse, référendum local sur la question des déchets nucléaires. Situé aux confins de la Haute-Marne et de la Meuse, le site de Bure doit accueillir un centre d’enfouissement des déchets nucléaires.

La presse nous apprend aujourd’hui que les riverains demandent un référendum local à ce sujet. Nous sommes là au croisement de plusieurs sujets de société très actuels, au premier rang desquels la demande croissante de « participation ». Avec l’élévation du niveau d’éducation et d’information et les possibilités de débat offertes par l’Internet, les citoyens se forgent de plus en plus leur propre avis sur les sujets qui les préoccupent ou qui touchent leur cadre de vie. Ils veulent prendre une part directe aux décisions. Notre système démocratique ne peut manifestement plus fonctionner sur le seul principe de la délégation.

La pratique du référendum local n’est pas forcément la bonne manière de répondre à cette attente légitime, car la question est trop souvent biaisée. Dans l’exemple de Bure, il me paraît clair que personne – même parmi ceux qui approuvent globalement le choix nucléaire de la France – ne dira qu’il veut accueillir des déchets radioactifs près de chez lui, si on lui pose la question sous cette forme ! Le conflit national entre intérêt individuel et intérêt général ne peut néanmoins plus être tranché par les seuls élus. Les Français ne l’entendent plus ainsi : nous devons introduire de nouveaux instruments de consultation pour permettre la nécessaire « appropriation citoyenne » des grands sujets de société.

Le nucléaire fait typiquement partie de ces domaines où les choix semblent parfois imposés par des instances scientifiques et industrielles situées hors d’un contrôle démocratique visible par les citoyens. En ce qui concerne par exemple les déchets radioactifs le Parlement a voté en 1991 une loi – la « loi Bataille », du nom d’un de mes collègues socialistes qui en était le rapporteur. Cette loi prévoyait une longue phase d’étude permettant à la fois d’analyser les conséquences de leur enfouissement en couches profondes et d’explorer d’autres techniques de traitement des déchets. Il n’est pas sûr que ce protocole ait été parfaitement respecté. Le Parlement doit en principe se prononcer l’an prochain : il faut s’attendre à un joli débat.

L’autre question soulevée par cette affaire est bien évidemment celle de notre politique énergétique. Je suis convaincu que le choix du nucléaire a été bénéfique pour la France. Il a permis de réduire notre dépendance énergétique. Il serait parfaitement absurde de le remettre en cause du jour au lendemain. Mais je suis conscient de ce que le nucléaire ne résout pas à long terme le problème de l’accès aux ressources. Et, surtout, qu’il pose le problème épineux des déchets. Le projet Iter, qui démarre à Cadarache, permettra d’expérimenter l’utilisation d’un composé plus abondant et beaucoup moins nocif : l’hydrogène.

Mais je crois que nous devrons concentrer nos efforts des prochaines décennies sur l’ensemble des énergies propres et renouvelables. La France a réussi dans le domaine du nucléaire dès les années 1950. Elle devra réussir de la même manière dans les énergies nouvelles. Or nous sommes très en retard dans ce domaine. Je ne prendrai qu’un exemple : celui des piles à combustible qui, demain, alimenteront les moteurs électriques de nos voitures et de nos camions. C’est un enjeu décisif puisque les transports terrestres sont une des principales sources de pollution.

Que constate-t-on ? Que Toyota a pris une avance considérable avec ses voitures hybrides. Que les autres constructeurs japonais suivent. Que Peugeot continue à produire des voitures diesel. Que Renault a renvoyé le problème à Nissan ! C’est là que la détermination publique fait défaut. En France, dans ces domaines, il faut une incitation de l’Etat. »

PAGES 274-275 Vendredi 7 octobre

« Je participe à Dunkerque à un colloque sur la politique industrielle organisé en commun par Dominique Voynet et Michel Delebarre. Je veux convaincre, notamment les Verts, que l’on peut mener une politique industrielle respectueuse de l’environnement. Je veux aussi saisir l’occasion de montrer que je ne suis pas, comme certains l’imaginent parfois, un affreux « nucléocrate ».

Je ne suis évidemment pas devenu un croisé de l’antinucléaire. Je persiste à penser que la France a fait un bon choix dans les années 1950 et qu’elle continue d’en percevoir les dividendes. Je suis aussi convaincu que l’électricité d’origine nucléaire nous sera nécessaire longtemps encore. Pour beaucoup de militants Verts, cela suffirait à justifier mon excommunication. Je crois pourtant avec la même force que nous devons tout faire pour raccourcir la période pendant laquelle les réacteurs nucléaires que nous possédons nous seront encore indispensables en investissant massivement dans la recherche et le développement des énergies propres comme dans les économies d’énergie.

Dominique Voynet sait tout cela. Et c’est même pour cela qu’elle m’a invité à venir aujourd’hui. […] »

DANS UNE INTERVIEW A LIBERATION (2006)

« Le monopole privé est la pire des situations », itw au journal Libération du 7 septembre 2006 sur le projet de fusion GDF-Suez.

http://www.liberation.fr/evenement/010159722-le-monopole-prive-est-la-pire-des-situations

Et le nucléaire ?

« Il n’y a aucune raison pour que le sujet soit tabou. Nous avons un avantage en matière nucléaire que nous avons intérêt à maintenir. Sur ce sujet, je ne suis pas pour la politique de l’autruche, consistant à jouer à cache-cache avec les Verts. Il faut aller beaucoup plus loin dans la transparence, notamment sur la question lancinante des déchets et de la sécurité. »

Pourquoi la politique énergétique ne constitue-t-elle pas un sujet majeur du projet socialiste ?

« Je veux présenter aux socialistes d’abord, au pays ensuite, les grands problèmes que le président sera amené à traiter. Il y a des problèmes malheureusement traditionnels : l’emploi, le pouvoir d’achat, la solidarité. Mais il y a aussi de grands problèmes internationaux, parmi lesquels, les questions liées à l’après pétrole : l’épuisement de la ressource, son prix, ses conséquences environnementales, ainsi que ses conséquences géopolitiques notamment l’instabilité que crée la dépendance en hydrocarbures, et aussi le débat sur le nucléaire et les énergies renouvelables. La préparation de l’après pétrole me parait absolument décisive. Et cela relève du président de la République. »

Enfin, plus modestement vous trouverez d’autres références et un texte sur la place de l’écologie dans le renouveau social-démocrate créé écrit après notre échec de 2006.
En 2006, nous aurions pu être prêts, nous avions ce qu’il fallait pour gagner 2007. Souvenons-nous en pour préparer les mois qui viennent et l’élection de 2007.